Nicole Belloubet à la prison de la Santé à Paris, le 12 avril 2019. Photo Stéphane de Sakutin. AFP
La chancellerie table sur la construction pour 35 millions d’euros de trois centres de détention axés sur la formation et le travail des prisonniers pour préparer l’après-incarcération.
La chancellerie maintient son objectif affiché vers la réinsertion professionnelle pour tous les détenus. Il y a d’abord eu la mise en place en grande pompe d’une Agence pour le Travail d’intérêt général dédiée à développer sur l’ensemble du territoire cette alternative à la peine sèche. Il y a aujourd’hui le projet Inserre, soit la construction pour 35 millions d’euros de trois «prisons expérimentales», centrées sur la formation et le travail des prisonniers pour préparer l’après-incarcération. La première, à Arras (Pas-de-Calais), devrait être livrée le plus tôt possible, les travaux commençant «sans délais», annonce le ministère ce vendredi dans un communiqué de presse. Pour Donchery (Ardennes) et Toul (Meurthe-et-Moselle), il faudra attendre 2022 et 2023.
«Entretien d’embauche»
Chaque établissement sera doté de 180 places. L’objectif annoncé ? Orienter «100% des détenus» vers une formation ou un travail effectué à l’intérieur de la prison, en partenariat avec les entreprises locales et les collectivités territoriales. Peu de détails ont pour le moment émergé sur le fonctionnement de cet établissement. La garde des Sceaux explique à la Voix du Nord, qu’il «s’agit d’une prison expérimentale par le travail […] avec un entretien d’embauche, une rémunération… Nous ciblerons les domaines à haute valeur ajoutée comme le numérique». Avant d’ajouter être «persuadée que pour lutter contre la récidive, il faut que les gens soient formés et aient accès à un travail».
En 2018, la chancellerie avait prévu dans son plan prison la création de structures d’accompagnement vers la sortie (SAS). Un établissement a vu le jour à Marseille, d’autres sont prévus dès 2020 à Poitiers (Vienne), Bordeaux (Gironde) et Longuenesse (Pas-de-Calais). La différence entre les SAS et ces prisons expérimentales ? «Le premier intervient en fin de peine. Le deuxième dès le début», souligne le ministère, contacté par Libération. Pour le moment, la généralisation de ce projet n’est pas au programme. «Laissons sortir de terre ces trois établissements. Pour la suite, nous verrons», martèle-t-il.
«Effet de communication»
Si «sur le papier le projet est intéressant», Cécile Marcel, directrice de l’Observatoire international des prisons (OIP), émet quelques réserves, notamment au sujet de «l’absence de transparence sur la construction de ces établissements» : «Nous craignons que ce dispositif soit en réalité l’arbre qui cache la forêt, qu’il soit réservé à une minorité méritante, alors que ceci devrait être la norme.» Seuls les détenus condamnés à une peine de moins de cinq ans pourront bénéficier de ces nouvelles prisons. «Un réel problème, pointe Marcel, qui regrette ne pas avoir été inclus dans la consultation. C’est un effet de communication. Ils ne veulent pas mettre en place un dispositif qui pourrait bénéficier à l’ensemble des criminels pour éviter des cris de l’opposition. Ce projet devrait être accessible par tous.» Du côté du ministère, on relativise. «Il fallait trouver un critère objectif, c’est ce qui a été retenu. Il faut être réaliste.»
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