Ordre infirmier : guerres internes et disette financière
30 novembre 2011
L'ordre infirmier s'est fait discret ces dernières semaines. Toujours englué dans une crise interne, il récupère cependant des cotisations en hausse. Deux mois après le lancement de son plan de restructuration, que devient l'ONI ? Revue de détails.
Adopté début septembre, le plan de restructuration de l'Ordre infirmier prévoit un retour à l'équilibre financier en mai 2012. Pour cela, il s'appuie sur deux leviers : la hausse du nombre de cotisants et la baisse des dépenses, avec un plan social drastique et la suppression des locaux départementaux.
Des cotisations en hausse
Pour revenir à l'équilibre, l'ONI prévoit de franchir la barre des 90.000 cotisants en janvier 2012. Selon les données du 28 novembre 2011, 79.490 infirmiers sont désormais à jour de cotisation, contre 66.564 infirmiers le 12 septembre dernier - à la veille du lancement du plan de restructuration - soit une hausse de 19 %.
Il semble donc que la stratégie adoptée début septembre, les nombreuses lettres de relance envoyées aux récalcitrants et les menaces de déconventionnement à l'encontre des infirmières libérales portent leurs fruits. Cependant, selon le plan de trésorerie de l'ONI dont nous avons obtenu copie, l'Ordre tablait sur 85.559 cotisants fin novembre 2011, il est donc légèrement en dessous de ses objectifs.
A ce jour, 73,7% des inscrits à l'Ordre ont réglé leur cotisation, tandis que la barre des 106.000 inscrits (20% de la profession) a été franchie courant octobre.
Plan social en cours
Proche du dépôt de bilan fin août, l'ONI a engagé un vaste plan social. Désormais, il n'y aura plus qu'une assistante pour 15.000 infirmiers, c'est à dire une assistante par région, contre une par département actuellement. 76 postes vont donc être supprimés.
La procédure de plan social étant en cours, les régions ne savent pas encore de quelles assistantes elles vont devoir se séparer, ni quand celles-ci vont cesser le travail.
Grogne dans les départements
Les élus départementaux ne décolèrent pas. Ce sont en effet eux qui supportent la majorité des coupes budgétaires : pertes des assistantes et suppressions des locaux. Dans plusieurs départements, tout ou partie des bureaux des conseils départementaux (CDOI) ont démissionné afin de montrer leur désaccord.
Ces économies signifient en effet la fin de leur travail de proximité, les permanences locales étant supprimées. Afin de limiter la casse, certains CDOI cherchent à récupérer des locaux gratuits auprès des mairies et des hôpitaux.
D'une manière générale, c'est un sentiment de gâchis qui émane des témoignages de ces élus. Mais leur colère se dirige plus contre le ministère de la Santé, accusé de lâchage, que contre le bureau national de l'ONI. L'Auvergne et l'Aude ont ainsi déposé des plaintes en Tribunal de grande instance contre les établissements hospitaliers qui emploient des infirmiers non inscrits à l'Ordre.
Si ces plaintes, en cours d'instruction, ont peu de chances d'aboutir, il s'agit surtout pour leurs initiateurs de mettre la pression sur les Agences régionale de Santé et les hôpitaux pour qu'ils contraignent les infirmiers à s'inscrire.
Une grogne qui touche aussi les infirmières libérales. Souvent favorables à l'Ordre, beaucoup refusent aujourd'hui de financer à elles seules un organe destiné à toute la profession.
Menacées par l'ONI de déconventionnement si elles ne sont pas inscrites au tableau de leur département, elles sont la principale cible de la campagne actuelle de recouvrement des cotisations, d'autant plus que leur contribution individuelle est plus élevée que celle des salariés : 75 euros contre 30 euros.
Pas d'élection faute d'argent
Dernière illustration en date des difficultés toujours bien réelles de l'ONI : le ministère de la Santé a décidé le 23 novembre de prolonger de deux ans le mandat des élus ordinaux et d'éviter ainsi l'organisation d'élections "compte tenu des difficultés matérielles et financières auxquelles l’ordre est confronté". Si l'ONI a évité de justesse la mort clinique en août dernier, il reste aujourd'hui en soins intensifs.
Amélie Cano