Psychiatrie : la réforme est-elle dangereuse ?
Plaidoyer pour soigner la folie autrement
Par Claude LOUZOUN, psychiatre, Pour le collectif Mais c’est un Homme.
Désormais, même le contrôleur général des lieux de privation de liberté s’inquiète du cours sécuritaire imposé à la psychiatrie. C’est bien là dans la logique de la politique de la peur et du discours du président de la République du 2 décembre 2008 à Antony (92). Un projet de loi, qui sera débattu à l’Assemblée nationale et au Sénat début 2011, déploie cette orientation. Il introduirait une « garde à vue psychiatrique » de soixante-douze heures et pourrait maintenir une personne dans une contrainte à des « soins sans consentement » renouvelables à merci. Ce « soin sans consentement » inscrirait la personne dans un fichier national des malades mentaux, mettrait la personne concernée sous surveillance (pourquoi pas par géolocalisation), sous traitement contraint (l’injonction de force de neuroleptique retard, au besoin à domicile, en serait le modèle), sous gestion du préfet au nom de l’ordre public et du soin conçu comme mesure de sûreté.
La personne présentant des troubles psychiques n’est pas porteuse de la dangerosité sociale. Son refus de soins, éventuel, ne doit en aucun cas la conduire à la trappe psychiatrique sous-tendue dans ce projet de loi. Nous ne pouvons accepter que quiconque soit considéré comme un homme sans qualité, sans discernement, objet de soins contraints à perpétuité.
Nous disons à ses partisans, sans crainte de nous tromper, que ce projet de loi n’est pas simplement le moyen de bien soigner quelqu’un qui ne veut pas l’être. L’appel Mais c’est un homme va plus loin : nous proposons une alternative de rassemblement pour préserver ou retrouver un autre type de relation – critique – de la psychiatrie au contrôle social et aux libertés individuelles, pour défendre une certaine représentation de la folie et de la psychiatrie, tout opposée à ce qui est affirmé aujourd’hui, pour assumer dans une tension dynamique le respect des libertés de la personne et l’engagement de la responsabilité de soignant.
Des décennies de psychiatrie contemporaine illustrent qu’il existe une éthique et des pratiques qui montrent que l’on peut accueillir et soigner la folie autrement. Ce sont elles qui doivent imposer ou soutenir les contenus de la loi. Elles soutiennent qu’un tel type de soins peut et doit être conçu comme exceptionnel et limité dans la durée, qu’il signe une limitation ou une privation de liberté et qu’en tant que tel il relève de l’autorisation et du contrôle du juge judiciaire.
Ouvrons dès lors le débat (*). Après Toulouse, Chambéry, Bordeaux, ce sera le cas ce soir à Paris en présence de parlementaires, de professionnels et d’usagers de la psychiatrie, de défenseurs des droits de l’homme et de magistrats. De 17 heures à 21 heures, à l’espace Jean-Dame, 17, rue Léopold-Bellan 75002.
(*) « Mais c’est un homme… L’appel contre les soins sécuritaires » est disponible et peut être signé sur le site www.maiscestunhomme.org.
Claude LOUZOUN
Plaidoyer pour soigner la folie autrement
Par Claude LOUZOUN, psychiatre, Pour le collectif Mais c’est un Homme.
Désormais, même le contrôleur général des lieux de privation de liberté s’inquiète du cours sécuritaire imposé à la psychiatrie. C’est bien là dans la logique de la politique de la peur et du discours du président de la République du 2 décembre 2008 à Antony (92). Un projet de loi, qui sera débattu à l’Assemblée nationale et au Sénat début 2011, déploie cette orientation. Il introduirait une « garde à vue psychiatrique » de soixante-douze heures et pourrait maintenir une personne dans une contrainte à des « soins sans consentement » renouvelables à merci. Ce « soin sans consentement » inscrirait la personne dans un fichier national des malades mentaux, mettrait la personne concernée sous surveillance (pourquoi pas par géolocalisation), sous traitement contraint (l’injonction de force de neuroleptique retard, au besoin à domicile, en serait le modèle), sous gestion du préfet au nom de l’ordre public et du soin conçu comme mesure de sûreté.
La personne présentant des troubles psychiques n’est pas porteuse de la dangerosité sociale. Son refus de soins, éventuel, ne doit en aucun cas la conduire à la trappe psychiatrique sous-tendue dans ce projet de loi. Nous ne pouvons accepter que quiconque soit considéré comme un homme sans qualité, sans discernement, objet de soins contraints à perpétuité.
Nous disons à ses partisans, sans crainte de nous tromper, que ce projet de loi n’est pas simplement le moyen de bien soigner quelqu’un qui ne veut pas l’être. L’appel Mais c’est un homme va plus loin : nous proposons une alternative de rassemblement pour préserver ou retrouver un autre type de relation – critique – de la psychiatrie au contrôle social et aux libertés individuelles, pour défendre une certaine représentation de la folie et de la psychiatrie, tout opposée à ce qui est affirmé aujourd’hui, pour assumer dans une tension dynamique le respect des libertés de la personne et l’engagement de la responsabilité de soignant.
Des décennies de psychiatrie contemporaine illustrent qu’il existe une éthique et des pratiques qui montrent que l’on peut accueillir et soigner la folie autrement. Ce sont elles qui doivent imposer ou soutenir les contenus de la loi. Elles soutiennent qu’un tel type de soins peut et doit être conçu comme exceptionnel et limité dans la durée, qu’il signe une limitation ou une privation de liberté et qu’en tant que tel il relève de l’autorisation et du contrôle du juge judiciaire.
Ouvrons dès lors le débat (*). Après Toulouse, Chambéry, Bordeaux, ce sera le cas ce soir à Paris en présence de parlementaires, de professionnels et d’usagers de la psychiatrie, de défenseurs des droits de l’homme et de magistrats. De 17 heures à 21 heures, à l’espace Jean-Dame, 17, rue Léopold-Bellan 75002.
(*) « Mais c’est un homme… L’appel contre les soins sécuritaires » est disponible et peut être signé sur le site www.maiscestunhomme.org.
Claude LOUZOUN