«Les psys ont tué mon fils», accuse une mère
SUICIDE | Un jeune Vaudois diagnostiqué schizophrène avait menacé de se défenestrer. Sa maman a attendu de l’aide sept mois durant. En vain. Son fils a passé à l’acte. Témoignage et explications.
http://www.24heures.ch/vaud/actu/psys-tue-fils-accuse-mere-2009-08-14
© FLORIAN CELLA | Jeudi dernier, Nicole Cottet-Pineau a publié un faire-part vindicatif dans nos colonnes. Elle en veut aux psychologues, à qui elle reproche de n’avoir pas cru à la dangerosité de l’état de son fils. Après l’enterrement, elle témoigne «pour faire bouger les choses».
SYLVAIN MULLER | 15.08.2009 | 00:05
«La famille de Cédric Lamotte a la douleur de faire part de son décès, survenu à cause de l’incompétence des psychologues.» Paru jeudi dans nos colonnes, ce faire-part révélait à la fois la douleur et la détresse d’une famille. «Le 13 janvier, mon fils a été déclaré atteint de schizophrénie, explique sa maman, Nicole Cottet-Pineau. Comme son frère souffre de cette maladie depuis plusieurs années, Cédric a déclaré au médecin qu’il préférait se jeter par la fenêtre. J’ai passé sept mois à chercher de l’aide. Lundi matin, j’ai encore cherché à joindre son psychologue, mais on m’a répondu qu’il était en vacances et que quelqu’un me rappellerait.» Personne n’a rappelé, et Cédric a mis sa menace à exécution. «Aujourd’hui, je me fiche des éventuelles réactions à ce faire-part; je veux juste que sa mort serve à faire bouger les choses.»
Sentiment d’abandon
Le désespoir et l’incompréhension face à l’absence d’encadrement et de soutien, malgré un diagnostic de schizophrénie posé. Ce sentiment est partagé par Michel Rubattel, papa d’un malade. «On se sent complètement abandonnés. D’un côté, on nomme un tuteur, car notre fils ne peut plus se gérer; et, de l’autre, quand on s’inquiète de savoir comment il va et s’il prend ses médicaments, on nous répond qu’il est majeur et donc libre de ses choix. Les parents n’ont rien le droit de faire, si ce n’est de répondre au téléphone quand on nous appelle pour dire qu’on a perdu sa trace. C’est complètement incohérent.»
Interdit de soigner contre la volonté d’un malade
Responsable du Centre d’expertises psychiatriques, sur le site de Cery, du département de psychiatrie du CHUV, le professeur en psychiatrie Jacques Gasser apporte quelques pistes de réponse, sans donner de détails en raison du secret médical. «Le début de la maladie est effectivement très délicat, confirme le professeur. La prise régulière de médicaments est nécessaire pour que le patient puisse mener une vie normale. Mais le droit interdit de traiter contre son gré une personne capable de discernement.» Il en résulte donc parfois la situation contradictoire que vivent les familles: les malades sont pris en charge lors de crises, mais plus suivis lorsque leur état s’améliore. Se croyant guéris, ils stoppent leur traitement de leur plein gré, ce qui provoque une rechute. «Tout repose sur l’acceptation de la maladie. Malheureusement, certains patients doivent passer par plusieurs de ces cycles avant d’accepter de prendre un traitement toute leur vie», déplore le professeur.
La problématique est la même pour la justice de paix, qui doit décider de l’éventuelle nomination de curateurs ou de tuteurs. «Nous sommes totalement dépendants de l’expertise psychiatrique, constate Nicolas Perrinjaquet, le premier juge de paix des districts de Lausanne et de l’Ouest lausannois. Par contre, le but de ces éventuelles nominations est seulement de sauvegarder le patrimoine des malades. Les curateurs et les tuteurs n’ont aucune responsabilité médicale.»
Evolution des traitements
Président de l’Association vaudoise des psychologues, Raphaël Gerber souligne aussi l’évolution de la société: «Il y a deux siècles, les malades mentaux faisaient l’objet de mesures de contention et d’enfermement. La prise en charge de la souffrance psychique a, heureusement, nettement progressé et la liberté individuelle a pris beaucoup d’importance. Mais la schizophrénie reste une maladie à la fois grave et dont les causes ne sont pas complètement déterminées.»
Voir www.lilot.org et www.graap.ch
SUICIDE | Un jeune Vaudois diagnostiqué schizophrène avait menacé de se défenestrer. Sa maman a attendu de l’aide sept mois durant. En vain. Son fils a passé à l’acte. Témoignage et explications.
http://www.24heures.ch/vaud/actu/psys-tue-fils-accuse-mere-2009-08-14
© FLORIAN CELLA | Jeudi dernier, Nicole Cottet-Pineau a publié un faire-part vindicatif dans nos colonnes. Elle en veut aux psychologues, à qui elle reproche de n’avoir pas cru à la dangerosité de l’état de son fils. Après l’enterrement, elle témoigne «pour faire bouger les choses».
SYLVAIN MULLER | 15.08.2009 | 00:05
«La famille de Cédric Lamotte a la douleur de faire part de son décès, survenu à cause de l’incompétence des psychologues.» Paru jeudi dans nos colonnes, ce faire-part révélait à la fois la douleur et la détresse d’une famille. «Le 13 janvier, mon fils a été déclaré atteint de schizophrénie, explique sa maman, Nicole Cottet-Pineau. Comme son frère souffre de cette maladie depuis plusieurs années, Cédric a déclaré au médecin qu’il préférait se jeter par la fenêtre. J’ai passé sept mois à chercher de l’aide. Lundi matin, j’ai encore cherché à joindre son psychologue, mais on m’a répondu qu’il était en vacances et que quelqu’un me rappellerait.» Personne n’a rappelé, et Cédric a mis sa menace à exécution. «Aujourd’hui, je me fiche des éventuelles réactions à ce faire-part; je veux juste que sa mort serve à faire bouger les choses.»
Sentiment d’abandon
Le désespoir et l’incompréhension face à l’absence d’encadrement et de soutien, malgré un diagnostic de schizophrénie posé. Ce sentiment est partagé par Michel Rubattel, papa d’un malade. «On se sent complètement abandonnés. D’un côté, on nomme un tuteur, car notre fils ne peut plus se gérer; et, de l’autre, quand on s’inquiète de savoir comment il va et s’il prend ses médicaments, on nous répond qu’il est majeur et donc libre de ses choix. Les parents n’ont rien le droit de faire, si ce n’est de répondre au téléphone quand on nous appelle pour dire qu’on a perdu sa trace. C’est complètement incohérent.»
Interdit de soigner contre la volonté d’un malade
Responsable du Centre d’expertises psychiatriques, sur le site de Cery, du département de psychiatrie du CHUV, le professeur en psychiatrie Jacques Gasser apporte quelques pistes de réponse, sans donner de détails en raison du secret médical. «Le début de la maladie est effectivement très délicat, confirme le professeur. La prise régulière de médicaments est nécessaire pour que le patient puisse mener une vie normale. Mais le droit interdit de traiter contre son gré une personne capable de discernement.» Il en résulte donc parfois la situation contradictoire que vivent les familles: les malades sont pris en charge lors de crises, mais plus suivis lorsque leur état s’améliore. Se croyant guéris, ils stoppent leur traitement de leur plein gré, ce qui provoque une rechute. «Tout repose sur l’acceptation de la maladie. Malheureusement, certains patients doivent passer par plusieurs de ces cycles avant d’accepter de prendre un traitement toute leur vie», déplore le professeur.
La problématique est la même pour la justice de paix, qui doit décider de l’éventuelle nomination de curateurs ou de tuteurs. «Nous sommes totalement dépendants de l’expertise psychiatrique, constate Nicolas Perrinjaquet, le premier juge de paix des districts de Lausanne et de l’Ouest lausannois. Par contre, le but de ces éventuelles nominations est seulement de sauvegarder le patrimoine des malades. Les curateurs et les tuteurs n’ont aucune responsabilité médicale.»
Evolution des traitements
Président de l’Association vaudoise des psychologues, Raphaël Gerber souligne aussi l’évolution de la société: «Il y a deux siècles, les malades mentaux faisaient l’objet de mesures de contention et d’enfermement. La prise en charge de la souffrance psychique a, heureusement, nettement progressé et la liberté individuelle a pris beaucoup d’importance. Mais la schizophrénie reste une maladie à la fois grave et dont les causes ne sont pas complètement déterminées.»
Voir www.lilot.org et www.graap.ch