- 3 JUIN 2021
- PAR MOUAIS, LE JOURNAL DUBITATIF
- BLOG : LE BLOG DE MOUAIS, LE JOURNAL DUBITATIF
Pouvez-vous vous présenter ainsi que le manifeste des psychologues ?
Je suis Frédéric Tordo, psychologue clinicien, travaillant en libéral principalement, docteur en psychologie clinique, et psychothérapeute. Par ailleurs, je suis également enseignant-chercheur en psychologie clinique.
L’origine du Manifeste des psychologues cliniciens et des psychologues psychothérapeutes (MPPP) est numérique. Sur un groupe Facebook dédié à l’« univers psy », j’ai posté un premier message qui revenait sur le rapport de la Cour des comptes de février 2021, et qui proposait de généraliser au plus vite le projet de remboursement des consultations de psychothérapies pratiquées par des psychologues. Très rapidement, j’ai contacté Caroline Fanciullo, une psychologue clinicienne et amie, pour pouvoir écrire avec elle une première version du Manifeste, un texte qui reprenait d’une manière synthétique tous les problèmes que présentaient le projet de remboursement. Deux autres versions du texte ont ensuite été postées sur le post initial, grâce aux très nombreux retours des psychologues présents dans le groupe. Enfin, et dans la foulée, nous avons créé un groupe Facebook avec une poignée de psychologues : le MPPP était né. Et les choses se sont ensuite enchaînées. En une semaine, nous étions 1 000 sur le groupe. Actuellement, nous sommes 3 500 psychologues, et les inscriptions se font toujours plus nombreuses.
L’objectif premier de ce mouvement spontané est de nous regrouper, en réaction au projet de remboursement, et de construire une grande manifestation numérique. Dès le départ, nous avons également réfléchi à l’organisation de groupes de travail (communication, écriture d’un rapport, etc.), afin que les psychologues se sentent acteurs du mouvement. Les membres du groupe se sont rapidement sentis concernés, en donnant de leur temps pour défendre la profession, pour eux comme pour les patients.
Pourquoi militez-vous aujourd’hui contre l’actuelle proposition de remboursement des psychologues ?
Parce que ce projet est une négation globale de la profession de psychologue. Ou plus justement, c’est une utilisation des compétences des psychologues cliniciens tout en niant paradoxalement les compétences qu’ils mettent en œuvre. En l’état, la proposition de remboursement des consultations de psychothérapies n’est pas respectueuse ni de nos savoir-faire, ni de notre identité professionnelle, au regard notamment de notre code de déontologie. Nous ne pouvons plus construire notre cadre de travail librement : la durée des séances, l’accès au psychologue, le nombre des séances... tous ces paramètres fondamentaux pour l’élaboration d’un cadre clinique approprié ne nous sont plus accessibles. Pour être remboursé, la durée d’une séance est par exemple fixée à 30 minutes, remboursée 22 euros, sans possibilité de dépassement d’honoraires. Le patient n’avance pas de frais pour sa consultation, et le protocole dans le cadre de ce remboursement est sur-encadré par de multiples passages chez le médecin généraliste ou le psychiatre, au détriment de la relation de confidentialité avec le psychologue.