par Gilles Finchelstein, Directeur général de la fondation Jean-Jaurès publié le 4 juin 2021
Revenu universel, revenu de base, le retour, voire l’éternel retour ? Il serait compréhensible d’éprouver un sentiment de lassitude ou même d’acharnement devant un débat qui revient toujours et ne débouche jamais. Et pourtant ! Les travaux menés par Solutions solidaires et notamment l’enquête réalisée avec la Fondation Jean-Jaurès permettent de relancer ce débat à nouveaux frais et dans un nouveau contexte. La pandémie, en effet, a placé sous une lumière crue la situation des jeunes et notamment les difficultés financières auxquelles ils devaient faire face. Elle a permis, qui plus est, de porter un regard différent sur les contraintes financières en les desserrant et en les relativisant. Alors, pourquoi évoquer le temps des synthèses ?
Il y a eu la thèse. Le revenu universel. La campagne présidentielle de 2017. Benoît Hamon. Un fort impact médiatique. Une graine d’utopie concrète plantée dans le débat public. Mais une proposition qui a souffert d’être ambiguë sur ses finalités et peu crédible sur son chiffrage. Une proposition qui, peut-être, répondait à la formule : «Avoir raison trop tôt, c’est un grand tort.»
Il y a eu l’antithèse. Le revenu de base. La demande d’expérimentation, soutenue par près d’une vingtaine de présidents de conseils départementaux – tous socialistes –, d’une fusion d’un certain nombre d’allocations. Un gros travail d’expertise technique. La crédibilité des gestionnaires des aides sociales sur le terrain. L’accent porté sur la nécessité d’un versement automatique des aides – pour éviter ce que l’on appelle le non-recours – et d’un élargissement de ces aides aux jeunes de 18 à 25 ans. Mais une proposition qui a perdu en lisibilité lorsque le président de la République, avec le revenu universel d’activités, a semblé reprendre le mot de la thèse et les idées de l’antithèse – pour ne rien en faire à l’arrivée…
Engagement des collectivités locales
Le temps des synthèses peut aujourd’hui s’ouvrir à partir d’un certain nombre de principes : un revenu ouvert aux jeunes, une réforme sans perdants – c’est-à-dire qui évite que les pauvres financent les très pauvres –, une cible élargie aux milieux populaires. Il ne s’agit pas seulement d’une synthèse entre le revenu universel et le revenu de base. Il s’agit aussi d’une synthèse, ou plutôt d’un réalignement, entre clivages politiques et sociologiques. Jusqu’à présent, ce projet provoquait l’enthousiasme des sympathisants de gauche mais le scepticisme des ouvriers et des employés. Le sondage de l’Ifop montre que les uns et les autres peuvent se rejoindre. Il s’agit encore d’une synthèse autour de la conditionnalité des aides. Elles doivent être automatiques. Elles peuvent être contractualisées avec des engagements réciproques des collectivités locales qui accompagnent et des citoyens qui en bénéficient. Il s’agit enfin d’une synthèse autour du travail : le but n’est pas d’édifier une société de l’oisiveté mais de fournir les «coups de pouce» qui permettent à tous ceux dont la situation est fragile, précaire, incertaine, ou à tous ceux qui sont tentés par une réorientation professionnelle, de pouvoir se projeter dans l’avenir avec un peu plus d’assurances.
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