par Julie Richard publié le 28 mai 2021
Si le premier confinement a stoppé net les envies de marmots, il semblerait que la crise sanitaire n’ait pas totalement découragé les Français des couches-culottes. Selon les chiffres de l’Insee publiés jeudi, le nombre de naissances enregistrées en avril a augmenté de 4 % par rapport au même mois de l’année 2020. «On observe dès février une remontée des naissances qui correspond aux bébés conçus à la sortie du premier confinement», explique Isabelle Robert-Bobée, cheffe de la division des enquêtes et études démographiques à l’Insee.
Après plus d’un an de baisse, les indicateurs repartent donc à la hausse. Il faut dire qu’avec 736 000 naissances en 2020, la France n’avait jamais connu pire année depuis 1975. La baisse du mois de janvier 2021 avait marqué les esprits : le nombre de naissances enregistrées par l’Insee avait chuté de 13 % par rapport à janvier 2020. «Le confinement a généré beaucoup d’inquiétudes sur les perspectives d’avenir. […] Donc ce n’est pas très surprenant de voir un tel choc sur les naissances neuf mois plus tard», expliquait à Libération Arnaud Régnier-Loilier, directeur de recherche à l’Institut national d’études démographique.
Effet de récupération
Pour les démographes contactés par Libé, il faut voir dans cette hausse soudaine la conséquence d’un report des naissances du premier confinement. La méconnaissance du virus et de ses effets sur les femmes enceintes, l’absence de visibilité à long terme et les difficultés de revenus engendrées par la crise ont probablement joué un rôle non négligeable dans la décision de reporter les projets de parentalité. «De même que la fermeture des centres de procréation médicalement assistée», ajoute Isabelle Robert-Bobée.
Deux mois plus tard, la sortie du confinement et l’euphorie générée par un retour à la vie normale ont sans doute aidé à sauter le pas. C’est en tout cas ce que laissent supposer les chiffres d’avril. Gilles Pison, chercheur associé à l’Institut national d’études démographiques (Ined) et professeur au Muséum national d’histoire naturelle, préfère parler d’effet de récupération. «Au vu du bilan des crises économiques passées, on observe souvent qu’elles n’empêchent pas les naissances. Celles-ci sont momentanément interrompues et on assiste à une récupération en fin de crise», explique-t-il.
Trop tôt pour dire si ça va durer
Le phénomène se maintiendra-t-il ? Pour les démographes, il est encore trop tôt pour se prononcer avec certitude. Gilles Pison, lui, est sceptique. «Pour les enfants conçus à partir d’octobre, il est possible qu’on enregistre à nouveau une baisse des naissances jusqu’à la fin de l’année 2021», affirme-t-il. En effet, si le reste de l’été 2020 a été marqué par une baisse des contaminations, la situation sanitaire s’est vite dégradée à l’automne. Les deuxième et troisième vagues, plus longues, meurtrières et violentes pourraient également avoir freiné les ardeurs parentales. «Il faudra regarder mois par mois», se contente de préciser l’Insee.
Sur le long terme, impossible de prévoir ce que va donner la courbe, pour les démographes. Mais Gilles Pison se veut optimiste : «On espère qu’avec la vaccination, on assiste d’ici à neuf mois à un regain de fécondité.»
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