A l'accueil d'un cabinet médical. Photo Pascal Bastien. Divergence
Plus de 5 millions de Français n’ont pas de médecin traitant et la part de territoires manquant de praticiens ne cesse d’augmenter. Un problème qui devrait s’accentuer avec le départ à la retraite d’une génération qui n’a pas compté ses heures.
De plus en plus de Français font face à un manque chronique de médecins généralistes. Ils sont désormais 6 % de la population de l’Hexagone à être concernés, d’après une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) publiée vendredi. Sachant que trois mois plus tôt, en novembre 2019, une enquête de l’association UFC-Que choisir établissait que près d’un généraliste sur deux (44 %) refuse désormais de devenir le médecin traitant de nouveaux patients. Bilan, 10 % des assurés sociaux français de plus de 17 ans n’ont pas de médecin traitant, ce qui représente 5,2 millions de personnes selon les chiffres 2018 de l’assurance maladie.
Guyane
La situation est connue, les alertes sont régulières, les médecins eux-mêmes font part de leur crainte de voir des territoires de plus en plus importants se désertifier. L’étude de la Drees précise cet état des lieux préoccupant. Le nombre de personnes vivant dans un territoire «sous-doté» en médecins généralistes est passé de 2,5 millions en 2015 à 3,8 millions en 2018. «La part de la population française» vivant dans une zone sous-dense (c’est-à-dire ayant accès à moins de 2,5 consultations par an et par habitant) est «faible mais elle passe, en quatre ans, de 3,8 % à 5,7 %». En clair, la demande ne cesse de croître alors que l’offre de soins baisse. Les départs à la retraite d’une génération de médecins accroissent fortement le problème, l’arrivée de jeunes médecins ne les compensant pas «en raison de l’effet prolongé des numerus clausus [le nombre d’étudiants en médecine accédant à la deuxième année, ndlr] appliqués au cours de ces dernières décennies», souligne la Drees.
A l’échelle régionale, la Drees pointe la Guyane française comme le territoire le plus touché avec 44,2 % de la population (environ 120 000 personnes) en «zone sous-dense» : «La situation est particulièrement dégradée en Guyane» qui «subit» une «très forte croissance démographique (+10,3 %)». Autres régions concernées, la Martinique (18 %) et la Guadeloupe (17,5 %). En métropole, en Ile-de-France (14,6 %) et dans le Centre-Val-de-Loire (12,3 %), «le nombre de médecins généralistes a diminué respectivement de 4,2 % et de 5,8 %, en dépit d’une croissance démographique positive.»
La Drees alerte aussi sur le fait que la carence médicale est logiquement liée à «une problématique plus globale d’aménagement du territoire» : «Les territoires les mieux dotés en médecins généralistes sont aussi les plus attractifs, tant du point de vue de la croissance démographique que des équipements (sportifs, culturels, commerciaux et scolaires).»
Urgence
La suppression du numerus clausus à la rentrée 2020 et les mesures incitatives adoptées par le gouvernement, avec le soutien aux maisons de santé, le développement des stages en médecine générale ou le versement d’une bourse à l’attention des jeunes médecins qui choisiraient de s’installer dans un désert médical, devraient permettre d’inverser la tendance, assure le directeur de l’assurance maladie. Mais les effets de cette réforme ne se feront sentir que dans plusieurs années alors qu’il y a urgence… Gageons qu’Olivier Véran, successeur d’Agnès Buzyn au ministère de la Santé et auteur d’un mémoire sur les déserts médicaux, en a pleinement conscience.
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