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mardi 21 avril 2020

Les enfants ne sont pas les agents du Covid que l'on croit

Par Nathalie Raulin — 
Une école de Toulouse gardant des enfants dont les parents sont obligés d'aller travailler, le 16 avril.
Une école de Toulouse gardant des enfants dont les parents sont obligés d'aller travailler, le 16 avril. Photo Lionel Bonaventure. AFP

Dans une étude sur le cluster de Haute-Savoie, publiée le 11 avril aux Presses universitaires d'Oxford, des chercheurs français ont établi la faible contagiosité d'un enfant contaminé.

Faut-il craindre que la réouverture des écoles à partir du 11 mai, annoncée par le chef de l’Etat ne soit le prélude à une nouvelle vague épidémique ? L’intention de l’exécutif à peine connue, plusieurs syndicats de l’éducation nationale ont donné de la voix, le Snuip-FSU dénonçant notamment une annonce «tout sauf sérieuse […] alors que l’on sait que l’école est un lieu de haute contamination». Telle réaction est-elle fondée ? Les chercheurs en doutent de plus en plus.
C’est que les enfants sont relativement épargnés par le Covid. Dès le 24 février, une étude chinoise publiée dans The Journal of the American Medical Association, portant sur plus de 44 000 cas confirmés de Covid-19 le soulignait : moins de 1% des enfants âgés de moins de 10 ans étaient infectés, et 1% des jeunes de 10 à 19 ans. Dans ces deux tranches d’âges, aucun décès n’était à déplorer. La faible dangerosité du nouveau coronavirus pour les enfants s’est aussi confirmée en France. Selon le Bulletin épidémiologique de Santé publique France du 16 avril, sur les 32 292 personnes qui étaient hospitalisées pour avoir contracté le Covid-19, le 14 avril, on ne compte que 129 enfants de moins de 14 ans (moins de 0,5%). Parmi eux, 29 étaient admis en réanimation (à comparer aux 6 730 patients lourds intubés). Plus éclairant encore : sur les 10 129 patients décédés à l’hôpital depuis le 1er mars, un seul avait moins de 14 ans.

«Multiples contacts»

Toutefois, une fois contaminés, rien ne disait que les enfants ne transmettaient pas largement le Covid, faute d’hygiène ou de respect de la distanciation sociale. L’étude de chercheurs Français sur le cluster des Contamines-Montjoie (Haute-Savoie) publiée ce 11 avril aux Presses universitaires d’Oxford, vient là encore bousculer les croyances.
On connaît l’histoire de ce foyer épidémique : un Britannique de retour d’un voyage en Chine, où il a contracté le Covid sans le savoir, rejoint au sport d’hiver quinze de ses amis dont une famille de trois enfants résidente des Contamines-Montjoie. En trois jours, du 25 au 28 janvier, il contamine douze membres du groupe, dont un enfant. Or jusqu’à ce que l’alerte soit donnée le 7 février, ce garçon de 9 ans continue de fréquenter son école des Contamines et de prendre des cours dans deux autres établissements de la vallée, à Saint-Gervais et Thonon-les-Bains. Dépêchés sur place, les infectiologies de Santé publique France craignent d’être face à une mini-bombe à retardement au regard des «multiples contacts» de l’enfant. Rapidement, ils identifient en effet 112 élèves et professeurs susceptibles d’avoir été contaminées, dont 66 avec un haut degré de risque. Mais une campagne de tests plus tard, le verdict tombe, déroutant : même en l’absence de mesures barrière et de confinement, l’enfant n’a contaminé personne, ni ses profs, ni ses petits camarades, ni même ses frères.
En revanche, les autres virus dont il était porteur (virus de la grippe et de la rhino-pharyngite) sont eux détectés dans sa fratrie, comme chez plusieurs autres élèves et professeurs. Incapables d’expliquer le phénomène, les chercheurs concluent prudemment : «Le fait qu’un enfant infecté n’a pas transmis la maladie malgré des interactions étroites au sein des écoles suggère une dynamique de transmission potentiellement différente chez les enfants.»

«Faible charge virale»

Cette nouvelle étude ébranle un peu plus le postulat initial des chercheurs. «Au départ, faute de connaissance du coronavirus, on a raisonné à partir de ce que l’on sait de la grippe : les enfants sont dans ce cas souvent peu symptomatiques mais très contagieux. D’où la décision de fermer les écoles pour stopper l’épidémie», explique le docteur Pierre Charneau, chercheur en biologie moléculaire à l’Institut Pasteur. «Or contrairement à ce que l’on pensait, les enfants infectés n’ont qu’une faible charge virale. Pourquoi ? On ne sait pas vraiment. Peut-être que leur épithélium pulmonaire n’ayant pas atteint sa maturité, le coronavirus peut plus difficilement trouver à s’accrocher et à se développer. Ce qui est sûr, c’est que les enfants transmettent plus difficilement le virus que les adultes. Et ça, c’est nouveau.» Nouveau et pas sans conséquence. Car dès lors, la réouverture (précautionneuse) des écoles ne réactiverait pas nécessairement l’épidémie. L’Elysée a pris ce pari.

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