Par Terriennes
en accord avec le quotidien Libération
29 MARS 2020
"Être confinées, pour les femmes, cela signifie aussi être débarrassées des regards qui, chaque jour et depuis toujours, se posent sur leurs corps dès lors qu’elles sortent de chez elles", écrit Camille Froidevaux-Metterie. Philosophe féministe, professeure de science politique et chargée de mission égalité à l'Université de Reims, elle consacre ses recherches aux mutations de la condition féminine consécutives au tournant de l’émancipation féministe, et les aborde dans une perspective phénoménologique qui place le corps au centre de la réflexion.
Si l’on réfléchit au confinement dans une perspective féministe, on est d’abord saisi d’un vertige à l’idée de toutes ces femmes qui vont subir la double, voire la triple peine, ces femmes isolées, sans abri et/ou victimes de violences conjugales. Vulnérables et déjà menacées, elles sont en première ligne de la pandémie. Il y a celles qui n’ont même pas de chez soi où rester et qui errent dans les villes désertées. Il y a celles qui se trouvent désormais à la merci permanente des hommes violents et qui ne peuvent plus compter sur les dispositifs d’aide dont on réduit la voilure. Il y a celles qui élèvent seules leurs enfants et qui se trouvent à devoir les occuper sans l’aide des fabuleux outils numériques dont les plus favorisés disposent.
Et puis il y a toutes ces autres à qui on demande de continuer à travailler au risque quotidien de l’infection : les soignantes, les auxiliaires de vie, toutes les travailleuses de l’aide à la personne, mais aussi les ouvrières et, bien sûr, les caissières. Autant de métiers dévalorisés dont on semble découvrir l’importance vitale sans pour autant assurer la sécurité de celles qui les exercent. Qui portera la voix de ces femmes que l’on n’entend jamais ? Combien de temps à attendre avant que les décisions qui s’imposent soient prises, notamment par le ministère dédié ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire