Un enfant de 6 ans habitant Tremblay-en-France est mort dans la nuit de dimanche à lundi, deux jours après avoir été frappé par son père.
Deux jours après avoir été violemment frappé par son père, un garçon de 6 ans, habitant de Tremblay-en-France (Seine-Saint-Denis), est mort à l’hôpital Necker, à Paris, dans la nuit de dimanche à lundi. Le principal suspect, déjà condamné en 2017 pour des violences sur une de ses filles aînées, a été mis en examen et placé en détention provisoire. Il doit être présenté jeudi 2 avril au juge des libertés et de la détention. Que s’est-il passé au domicile familial, ce vendredi après-midi, qui a conduit à la mort d’un enfant ? Il faudra plusieurs jours, peut-être plusieurs semaines, au juge d’instruction saisi par le parquet, pour reconstituer les événements. A ce stade de l’information judiciaire, les explications du père sont « trop imprécises pour faire l’objet d’une communication », indique le parquet de Bobigny.
Mais, d’ores et déjà, ce drame interroge sur une possible recrudescence des maltraitances au sein des familles en cette période de confinement lié à l’épidémie de Covid-19. De la même manière que les associations venant en aide aux victimes de violences conjugales, les professionnels de l’enfance craignent une dégradation des situations.
« L’interdiction de sortir fait disparaître la structure habituelle, qui organise psychiquement. Si on ajoute à ça les stresseurs que sont la présence des enfants non-stop, confinés parfois dans des petits espaces, avec en plus l’obligation d’instaurer un cadre scolaire, la précarité liée à l’absence d’activité… Tous ces facteurs conjugués créent un bouillon de culture avec des ferments toxiques pour les personnes vulnérables », relève la sociologue Nadège Séverac, spécialiste des violences intrafamiliales.
Le nombre d’appels reste stable
Une campagne de communication vient d’être lancée par le gouvernement pour faire connaître le 119, le numéro d’urgence pour l’enfance en danger, et le secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance, Adrien Taquet, a appelé à plusieurs reprises à « redoubler de vigilance » et à alerter en cas de soupçon. « Il faut dire aux parents que ça peut arriver d’être exaspéré par son enfant, de se sentir démuni, en particulier dans ces circonstances difficiles. Mais dans ce cas, ne vous laissez pas envahir par la colère, prenez votre téléphone et appelez », préconise Martine Brousse, la présidente de l’association La Voix de l’enfant, une fédération d’associations d’aide à l’enfance qui travaille en partenariat avec le 119. « Passé l’effet de sidération, et une phase d’organisation, tous les services sont mobilisés désormais », tient-elle à souligner.
En l’espace de deux semaines, le nombre d’appels au 119 est resté relativement stable, de l’ordre de 725 par jour en moyenne, rapporte Violaine Blain, la directrice générale du groupement d’intérêt public Enfance en danger, qui gère le numéro d’urgence. « Nous avons relevé deux particularités dont il faudra vérifier qu’elles se confirment dans les semaines qui viennent : une plus forte proportion d’enfants parmi les appelants – un tiers contre 16 % habituellement – ainsi qu’une hausse du nombre d’appels venant de l’entourage, voisins ou membres de la famille. » Afin de permettre à celles et ceux qui se trouvent dans l’impossibilité d’appeler de signaler des situations par écrit, un formulaire en ligne sera disponible dans les jours qui viennent sur le site Internet du 119, précise Mme Blain.
Les professionnels de la protection de l’enfance, qui accompagnent environ 340 000 enfants, dont la moitié vivent chez leurs parents, sont sur le qui-vive. « Il est clair que le confinement exacerbe les difficultés », disent-ils, unanimes. « C’est difficile et stressant pour toutes les familles, alors pour celles qui sont déjà vulnérables ou maltraitantes, la promiscuité et l’absence de soupapes que sont l’école, le travail, le sport, constituent un cocktail explosif », s’inquiète une psychologue qui travaille dans un service d’aide sociale à l’enfance en Ile-de-France.
En raison du coronavirus, les visites à domicile sont suspendues jusqu’à nouvel ordre, hors situation d’urgence. En télétravail comme l’ensemble de ses collègues, elle effectue donc le suivi des familles dont elle s’occupe par téléphone. « Comme je n’ai pas de téléphone professionnel, j’appelle en numéro masqué en fixant des rendez-vous. Parfois ça marche, parfois non. Sans voir les gens, je suis dépendante de ce qu’ils veulent bien me dire, je ne peux m’appuyer sur rien d’autre. » Pour « se rassurer », elle a dans certains cas accentué le rythme des échanges.
Une de ses collègues, qui travaille dans un autre département, s’inquiète des « conséquences en cascade » d’une telle situation. « Pour les cas complexes, les enfants tout petits ou les plus abîmés, je crains que ce soit ravageur », craint-elle.
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