Juliette Bénabent Publié le 24/01/23
Après plusieurs rappels à l’ordre de l’ONU pour violation du droit, la France a procédé, ce 24 janvier, au rapatriement de trente-deux enfants et de quinze femmes détenus dans les camps de prisonniers djihadistes du nord-est de la Syrie.
Impuissant, le droit international ? Aussi souvent qu’on puisse nourrir ce sentiment, le rapatriement, ce 24 janvier, de quinze femmes et trente-deux enfants français depuis des camps de prisonniers dans le nord-est de la Syrie démontre que les condamnations mondiales ne sont pas vaines. En février le Comité des droits de l’enfant de l’ONU estimait que la France violait le droit de ces enfants en ne les rapatriant pas. En septembre, c’est la Cour européenne des droits de l’homme qui jugeait que la France ne justifiait pas son refus de rapatrier des enfants et leurs mères. Et le 16 janvier dernier, le Comité contre la torture des Nations unies a considéré que la France viole la Convention contre la torture en ne rapatriant des enfants et des femmes qu’au cas par cas.
« Ces opérations demandent du temps et le rapatriement d’aujourd’hui était probablement déjà engagé au moment de la publication du texte du Comité contre la torture, précise Bénédicte Jeannerod, directrice du bureau parisien de l’ONG Human Rights Watch. Mais la France savait que le Comité travaillait sur ce dossier. Ces diverses décisions ont sans doute joué un rôle d’accélérateur, tout comme la pression exercée par les avocats, les collectifs de familles, la presse. La France est soucieuse de son image sur la scène internationale, et heureusement que ces condamnations ne laissent pas le gouvernement indifférent. »
Reste à confirmer que le rapatriement groupé de ce 24 janvier amorce un infléchissement dans la politique du cas par cas : on estime qu’une centaine d’enfants et une cinquantaine de femmes français sont encore dans des camps syriens, sans compter plusieurs dizaines d’hommes, parfois adolescents, détenus dans des prisons. Et une fois rentrés en France, tout ne fait que commencer, rappelle Bénédicte Jeannerod : Human Rights Watch, dans un récent rapport, soulignait les difficultés de réinsertion de ces enfants, notamment à cause du peu de contacts qui leur sont permis avec leurs mères incarcérées, et du « délai parfois très long avant qu’ils soient mis en relation avec leur famille d’origine, grands-parents, oncles, tantes, qui sont souvent leur seul lien avec la France. Cela multiplie les traumatismes pour des enfants qui doivent être considérés comme des victimes de Daech, et à qui la France doit permettre de reprendre leur vie, leur scolarité, et de se reconstruire. »
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