Nathalie Barrès 14 oct. 2020
Le confinement général du printemps 2020 a chamboulé la vie quotidienne de l’immense majorité des français. Et que s’est-il passé du côté de la sexualité ? Des chercheurs ont réalisé une enquête prospective en utilisant deux questionnaires anonymes et auto-administrés via les réseaux sociaux (un pour les couples confinés ensemble et un pour les personnes confinées seules sans partenaire sexuel). Dans cette période atypique, source d’anxiété pour beaucoup, ils se sont intéressés à l’impact du confinement sur la libido, les pratiques sexuelles (masturbations, rapports sexuels, sexualité virtuelle) et le recours à la pornographie des français.
Que révèlent les résultats ?
Publiée dans la revue Sexologies, cette enquête est basée sur le recueil de 844 questionnaires – 437 pour les individus confinés en couple et 407 pour les sujets confinés seuls sans partenaire sexuel. Deux tiers des répondants étaient des femmes. Elle révèle :
- Une forte variation de la libido des couples comme des personnes isolées durant cette période. Parmi ceux qui ont vécu positivement cette période de confinement, on note une baisse de la libido chez 20% des individus (en couple ou non durant cette période). Et, un gain de libido chez 24% et 29% de ceux respectivement confinés en couple et sans partenaire sexuel. En revanche, un vécu négatif de la situation de confinement avait entraîné une baisse de la libido chez 35% des sujets confinés en couple et 29% de ceux confinés sans partenaire sexuel. Selon les auteurs, le stress aigu ou les syndromes dépressifs peuvent avoir impacter négativement la libido de ces individus.
- La pratique de la masturbation a nettement évolué durant le confinement. Au global, 70% des personnes confinées en couple et 85% de celles confinées sans partenaire sexuel ont déclaré se masturber. Environ 30% de personnes confinées en couple ont diminué cette pratique alors qu’une proportion similaire d’individus confinés sans partenaire sexuel l’a augmenté. Une proportion plus importante de sujets confinés sans partenaire sexuel ont pratiqué la masturbation parmi ceux qui avaient un ressenti négatif de la période. Les auteurs évoquent que cette pratique peut être « accentuée en cas de stress, d’angoisse, d’incertitude, etc ».
- Le ressenti des individus en couple durant le confinement a impacté leurs rapports sexuels. La fréquence des rapports sexuels a augmenté chez près de 30% de ceux qui ont vécu positivement cette période et diminué chez 37% de ceux qui l’ont vécu négativement. Alors que l’envie était présente, 9,5% des répondants ont mis en avant avoir ressenti des freins du fait des enfants, de la fatigue ou encore de la promiscuité avec d’autres proches.
- Les pratiques de sexualité virtuelle peu modifiées Sextos (messages électroniques sexuellement explicites), applications permettant de se masturber en se regardant, sexualité par téléphone, envoi de vidéos ou de photos intimes suggestives font partie de ces pratiques. Seuls 25% des répondeurs y sont adeptes, avec peu de variations durant le confinement si ce n’est une diminution pour environ 16% de ceux qui ont vécu négativement la période du confinement.
- Un recours à la pornographie diminué chez les couples. Parmi ceux confinés en couple, environ 55% de ceux qui ont vécu positivement le confinement et 70% des autres sont des consommateurs de pornographie. Globalement, entre 36% et 39% des couples ont diminué le recours à la pornographie en fonction de leur perception positive ou non de la période de confinement. Chez les confinés sans partenaire sexuel environ 60% à 70% des individus consomment de la pornographie. La plus grande proportion de individus n’a pas changé ses habitudes à ce sujet. Seuls environ 10% des individus ont diminué leur consommation et 16-18% l’ont augmenté en fonction de leur perception positive ou négative de la période de confinement.
Cette étude visait à étudier les répercussions psychosexuelles induites par le confinement sur la sexualité des personnes confinées en couple ou sans partenaire sexuel. C’est l’impact de l’anxiété, de l’ennui – mesuré par le ressenti positif ou non de la situation de confinement - sur les dimensions de la sexualité (désir, libido) qui a été recherché. Les auteurs en profitent d’ailleurs pour rappeler que « la libido est profonde, instinctive. Elle est le reflet de nos pulsions. » Alors que le désir sexuel « est l’expression de la libido, il vient humaniser la libido. Pour simplifier, avoir envie d’un rapport sexuel est induit par la libido alors qu’avoir envie de faire l’amour avec sa ou son partenaire, c’est avoir du désir pour elle ou lui. »
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