SOPHIE GUIRAUD
Emilie Olié : “Prometteur.”
CHRISTOPHE FORTIN
Emilie Olié : “Prometteur.”
CHRISTOPHE FORTIN
L'imagerie cérébrale se modifie
après quelques séances d'une psychothérapie venue des Etats-Unis.
Peut-on prévenir le risque suicidaire avec
des séances de psychothérapie ? Alors que la semaine d'information sur la santé
mentale (jusqu'au 25 mars) et la semaine du cerveau (jusqu'au 18 mars)
rappellent l'impuissance des soignants et les insuffisances de la recherche
face à un fléau qui tue 10 000 personnes en France pour 200 000 tentatives de
suicide par an, une équipe du CHU de Montpellier ouvre une piste novatrice.
Pas très compliqué sur le papier : les
patients qui ont suivi sept séances de la “thérapie de l'acceptation et de
l'engagement”, Act, thérapie cognitive comportementale (TCC) venue des
États-Unis qui aide à accepter la douleur pour éviter de souffrir, voient leur
état de santé s'améliorer pendant les trois mois de l'étude. Les premières
conclusions vont être publiées dans les revues scientifiques. Nom du programme
initié par les docteurs Emilie Olié et Deborah Ducasse : Impact.
Des marqueurs biologiques
“Sur le plan clinique, on perçoit une baisse des idées
suicidaires et une amélioration de la qualité de vie suffisamment importante
pour ne pas être due au hasard”, rapporte Emilie Olié, qui rappelle que les
premières études datent de 2014.
Il a fallu confirmer l'hypothèse par des examens de
neuro-imagerie, menés grâce à 150 000 € de dotation de la fondation pour la
recherche médicale. “Chez des personnes qui ont fait une tentative de suicide,
certaines zones du cerveau associées à des émotions négatives, une situation
d'exclusion, une propension à ruminer, s'activent. Après la thérapie, les IRM
ont évolué, on identifie des marqueurs biologiques de cette évolution”, dit la
psychiatre.
La
recherche a été lancée il y a deux ans sur un groupe de 40 personnes suivi
parallèlement sur le plan médicamenteux et psychiatrique après une tentative de
suicide. La moitié a bénéficié de séances de la thérapie Act, l'autre moitié
des séances de relaxation.
Pas de miracle
En préambule, il a fallu dresser un “portrait” des
personnes à risques, avec “l'hypothèse que la tentative de suicide est l'acte
d'une personne vulnérable, avec des prédispositions biologiques, qui rencontre
un stress, un problème professionnel, personnel”. Mais la vulnérabilité n'est
peut-être pas une fatalité. Emilie Olié espère : “C'est prometteur.” Au-delà
des espoirs soulevés par une thérapie enfin efficace, s'ouvre la possibilité
d'un traitement personnalisé : “Est-ce qu'il y a des signatures cérébrales qui
peuvent orienter vers un risque ? Une thérapie ?”
Il
n'y a pas de miracle : “Le taux de récidive dans l'année qui suit une tentative
de suicide est de 40 %. En trois mois, on a eu trois tentatives de suicide dans
le groupe témoin, avec un décès, et une tentative dans le groupe Impact.”
Mais
la Montpelliéraine imagine aussi un futur proche où l'IRM nous dira “si un
patient qui a des idées suicidaires a un risque majeur de passer à l'acte”.
Pour l'instant, “il manque des pièces du puzzle”. L'enquête se poursuit : en
France, une dizaine de CHU proposent la thérapie Act, un projet national
envisage un suivi sur un an. Restera un autre problème, non des moindres : les
psychologues formés à la méthode ne sont pas remboursés.
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