Par Chloé Leprince 11/03/2021
Le premier livre sur la Commune de Paris au prisme des femmes remonte à 1963. Un siècle après la révolution démocratique et sociale du printemps 1871, le stigmate "pétroleuse" brouillait l'accès à un engagement féminin authentique.
Très brièvement, on a dit “pétroleurs” mais plutôt dans un pluriel tout éphémère : “pétroleurs et pétroleuses”. Puis, en quelques jours tout juste, le mot s’est raidi, figé pour de bon au féminin : les “pétroleuses” venaient de voir le jour au printemps 1871, au chaud de l’événement que fut la Commune de Paris. C’est du côté de Versailles, dans la presse qui défend le gouvernement exilé d’Adolphe Thiers face à l’insurrection populaire qui s’est levée le 18 mars cette année-là dans Paris, que le mot “pétroleuses” s’enracine. Une invention de situation en somme, et un substantif qui reste, indissociable de la flétrissure qu’il a d’emblée charriée.
En le passant à la loupe, on voit qu’en réalité, c’est toujours dans le même camp que le mot “pétroleuse” voyagera : on ne le retrouve dans aucune archive du côté de celles qu’il dénomme. Personne ne s’auto-désigne comme pétroleuse (ni ne parle ainsi de sa compagne). Ainsi, il naît comme insulte, et le restera. C’est l’usage immédiat du mot comme tare ou comme stigmate dont on affuble l’adversaire qui le routinisera dans la langue française. Et c’est à travers cette ritualisation au négatif qu’on peut distinguer, depuis ce mot qui remonte à la Commune de Paris, quelque chose qui raconte, plus largement, la manière dont on peut regarder l’engagement politique des femmes.
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