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samedi 13 avril 2019

Une prévention de la maladie d'Alzheimer est-elle possible ?

Dr Irène Drogou
| 12.04.2019




  • alzheimer
Crédit Photo : S. Toubon

« Prévenir la maladie d'Alzheimer : est-ce possible ? » Cette question brûlante au regard de « l'épidémie » touchant les pays développés depuis quelques décennies a fait l'objet d'une conférence-débat organisée par le groupe d'assurance Alptis en partenariat avec la Fondation Vaincre Alzheimer au sein de l'Académie nationale de médecine.
Comme l'a rappelé le Dr Pierre-Jean Ousset, neurologue et responsable du Centre de recherche clinique du gérontopôle au CHU de Toulouse, « en termes de traitement, on est démunis, après beaucoup de déceptions, il n'y en a pas à ce jour », a-t-il expliqué. En termes de prévention, les interventions multidomaines, combinant activité physique modérée (30 minutes de marche/jour), stimulations cognitives, lien social et supplémentation alimentaire, sont les plus prometteuses.

Diviser par 2 le nombre de patients
La prévention primaire, en se focalisant sur la phase présymptomatique très en amont sur les facteurs de risque, est une voie d'avenir, faisant l'objet de nombreuses études. « Si on arrivait à retarder de seulement 5 ans l'apparition des troubles de la maladie d'Alzheimer (MA), on diviserait par 2 le nombre de patients, a souligné Pierre-Jean Ousset. Ce serait une avancée énorme. »
Les enjeux sont considérables au niveau mondial. Si l'épidémie a commencé dans les pays développés il y a 20 ans avec le dépassement des tranches d'âge ≥ 60-65 ans par rapport aux plus jeunes, le croisement est prévu pour 2050 à l'échelle de la planète. « Il n'y a pas davantage de risque de développer une maladie d'Alzheimer qu'avant, a rappelé le neurologue. L'avancée en âge est le facteur de risque principal. »
Timing de la prévention primaire
Une fois ce constat fait, quand mettre en place une prévention primaire, et laquelle ? « Dans la MA, il y a deux façons d'envisager la maladie, soit dès les premiers troubles de la mémoire vers 70 ans, soit dès l'installation des lésions cérébrales 15-20 ans plus tôt à l'âge de 50 ans, voire avant, a expliqué le neurologue. La question n'est pas tranchée, mais la tendance est d'intervenir très en amont. »
L'avancée en âge est le facteur de risque numéro 1, puis vient en seconde place le patrimoine génétique, là aussi un facteur de risque majeur et… non modifiable. Mais d'autres facteurs, cette fois modifiables, ont été identifiés à différents âges de la vie. « Dans l'enfance et l'adolescence, de mauvais facteurs socio-économiques et un faible niveau d'éducation sont des FDR de MA, alors qu'un haut niveau d'éducation est protecteur », a-t-il rappelé.
Des facteurs protecteurs identifiés
À l'âge adulte « middle age » (20-60 ans), le mode de vie et les facteurs vasculaires (HTA, cholestérol, diabète) sont prépondérants, sans oublier les expositions professionnelles. Les activités cognitives, physiques et sociales sont à l'inverse protectrices, de même qu'un traitement antihypertenseur. « Après 60 ans, se surajoutent au risque les pathologies vasculaires, comme les accidents vasculaires cérébraux », a décrit Pierre-Jean Ousset. Outre les facteurs protecteurs déjà décrits avant, il y a l'alimentation, notamment avec les oméga 3.
L'avenir aux interventions multicibles
Si certains facteurs se montrent protecteurs en population dans les études observationnelles, encore faut-il prouver que les interventions sont efficaces. « C'est chose faite pour l'activité physique et la stimulation cognitive », a indiqué le Dr Ousset. La démonstration s'est révélée moins concluante pour les interventions nutritionnelles : oméga 3 des poissons gras, certaines huiles végétales, antioxydants (vitamine C, E et caroténoïdes), vitamines du groupe B (B6, B9, B12). « La durée des essais, en général de 6 à 12 mois, n'est probablement pas suffisante, a avancé le médecin chercheur. Et sans doute que tout le monde n'a pas besoin de supplémentation. Des bénéfices sont ressortis chez les sujets carencés. »
Pour le neurologue, la prévention de demain passera par des interventions multicibles, peut-être avec un volet médicamenteux. Des études prévoient de tester à la phase présymptomatique les molécules anti-Alzheimer inefficaces jusque-là à la phase symptomatique. « Pour le moment, en l'absence de traitement efficace, le dépistage de masse n'a pas lieu d'êtrece n'est pas éthique, a insisté Pierre-Jean Ousset. La question se discute de façon individuelle. Les connaissances sur la MA évoluent très vite et l'humilité est de mise. Mais les espoirs existent. »  
Conférence débat organisée par Alptis et la Fondation Vaincre Alzheimer à l'Académie nationale de Médecine le 10 avril 2019

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