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mardi 9 avril 2019

60 % des étudiantes en médecine d'Ile-de-France ont vécu une situation de violence sexuelle

Sophie Martos
| 10.04.2019



thèse harcèlement
Crédit Photo : DR

Trente pour cent de l'ensemble des externes franciliens (et même 60 % des étudiantes) ont vécu au moins une situation de violence sexuelle. La prévalence de ces violences augmente à 45 % pour les carabins en fin de second cycle de médecine (cinquième et sixième année), rapporte le Dr Line Zou Al Guyna, dans sa thèse de médecine générale co-écrite avec le Dr Malyza Mohamed Ali et soutenue fin 2018.


L'objectif de leurs travaux était de mesurer les prévalences des violences sexuelles déclarées par les externes des facs de médecine d'Ile-de-France et d'évaluer leurs connaissances sur le harcèlement et les agressions. À cet effet, ces jeunes médecins ont diffusé un questionnaire (services de scolarité, réseaux sociaux) associé à des vignettes traduisant diverses situations de harcèlement et d'agressions sur les lieux de stage.
Drague, harcèlement et agression à la loupe
Sur les 7 430 étudiants inscrits dans les sept facs de médecine parisiennes, 2 208 ont participé à l'étude, soit un bon taux de réponse de 29,7 %.
Les résultats mettent en évidence la forte prévalence des violences sexuelles (tableau ci-dessous).
Les prévalences des violences sexuelles chez les 2 208 participants à l'étude
Chart
7,8 % de l'ensemble des externes ont vécu une situation similaire au dessin représentant la drague, 8,6 % à celui représentant le harcèlement au staff, 11,6 % à une agression au bloc et 21,7 % à du harcèlement au poste de soins. Parmi ces étudiants victimes de harcèlement sexuel, ces situations ne sont pas des épisodes isolés mais répétitifs sur plusieurs lieux de stages (dans 34 % à 49 % selon les cas de figure).
Sans surprise, les étudiantes sont de loin les plus exposées. Une situation de harcèlement a été vécue par un tiers des femmes (7 % des hommes). Et une situation de violence sexuelle est signalée par près de 40 % des femmes (11 % des hommes). 
L'étude pointe des services à risque, notamment ceux de chirurgie, réanimation et des urgences. 
Sous-estimation de la gravité
La généraliste souligne que les connaissances quant au caractère répréhensible ou illégal de ces comportements ne sont pas bien assimilées. « Seuls 21,1 % des externes ont désigné correctement l'ensemble des situations, c'est-à-dire reconnu les situations de violences comme étant répréhensibles et illégales, tout en reconnaissant la situation de drague comme n'étant pas illégale », expliquent les auteures.
Les externes ont tendance à sous-estimer la gravité des comportements. Par exemple, 88 % des étudiants considèrent la situation « harcèlement au staff » comme répréhensible mais seuls 57 % la pensent illégale. Pour le « harcèlement au poste de soins », 60 % jugent la situation répréhensible et seulement 34  % illégale. Certains types de harcèlement sont « plus fréquents et moins perçus comme problématiques », déduisent-elles.
Une forme de banalisation
Interrogés sur le caractère « humoristique » des situations représentées, 13,3 % des externes considèrent que les dessins représentant le « harcèlement au poste de soins » sont drôles. Ce sentiment grimpe pour la drague (40 %). A contrario, 97 % des étudiants estiment que « le harcèlement au staff » ne l'est pas.
Pour les Drs Zou Al Guyna et Mohamed Ali ces résultats mettent en évidence « une forme de harcèlement du quotidien particulièrement fréquente, répétée, et banalisée ». « Le rôle de l'humour et les difficultés que semblent avoir les étudiants à reconnaître le caractère répréhensible de l'ensemble des situations présentées nous semblent résonner avec cette forte prévalence », estiment-elles.  
Elles recommandent de réaliser une nouvelle étude dans quelques années après avoir instauré des cours sur les violences sexuelles en second cycle. Seuls 152 étudiants sondés ont suivi une formation sur cette thématique.

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