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vendredi 29 avril 2016

Quand l’héritage sert à rembourser les aides

LE MONDE ECONOMIE  | Par Caroline Racapé


« On l’ignore souvent, mais au moment de régler une succession, de nombreuses aides sociales sont récupérables par les départements ou les caisses de retraite qui les ont versées. Il n’est pas rare de voir des héritages fondre de plus de 100 000 euros », observe Marie Monmarché, notaire à Joué-lès-Tours (Groupe Monassier).
Les Yvelines ont, par exemple, recouvré 7 millions d’euros en 2015, les Hauts-de-Seine 7,3 millions d’euros. Si vous héritez d’un proche qui percevait ces coups de pouce, la marche à suivre diffère selon le type d’aide.
Côté départements, plusieurs dispositifs sont concernés. C’est le cas de l’aide ménagère à domicile – il faut percevoir moins de 4 600 euros annuels pour y être éligible –, de l’aide aux repas, et de la prestation spécifique dépendance (cette aide n’existe plus depuis 2002 mais est encore récupérée sur certaines successions). Et surtout, de l’aide sociale à l’hébergement (ASH), versée à de nombreux seniors en maisons de retraite – et à des handicapés en établissements – pour financer les prestations d’hôtellerie. Voilà pour la théorie, car en pratique, certains départements peuvent décider de ne pas recouvrer telle ou telle prestation.

Les Hauts-de-Seine, par exemple, ne récupèrent pas l’aide ménagère. Quant aux caisses de retraite, elles peuvent se faire rembourser le « minimum vieillesse ». Fin 2014, 425 000 personnes bénéficiaient de cette allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), qui garantit un certain montant de ressources mensuelles.
Toutes ces aides peuvent être récupérées à partir du moment où elles ont été versées pour la première fois. Quand l’héritage affiche un solde négatif, les héritiers ne sont toutefois pas appelés à effacer l’ardoise avec leurs propres deniers. Pour le reste, chaque dispositif affiche ses propres règles.
Les aides du département pour les prestations à domicile ne sont ainsi récupérables que sur la part de l’actif net de la succession qui dépasse 46 000 euros, avec une franchise de 760 euros. Si le défunt a perçu 10 000 euros d’aide ménagère, et que l’actif net s’élève à 49 000 euros, le département récupère 49 000 – 46 000 – 760 euros, soit 2 240 euros.

Sacré micmac

Sachez que pour évaluer l’actif net il est admis de déduire les dettes personnelles du défunt, mais aussi celles liées au décès (frais funéraires, etc.) et aux biens de la succession (crédits, sommes à dépenser pour rénover un logement à vendre…).
En revanche, il faut rajouter les sommes investies en assurance-vie après 70 ans. Pour les autres aides départementales, aucun seuil de perception n’est prévu : si le défunt a reçu 50 000 euros d’ASH et que l’actif s’élève à 40 000 euros, tout l’héritage va au département.
De son côté, la caisse de retraite « ne recouvre ses créances que sur la part de l’actif net qui dépasse 39 000 euros, et seulement à hauteur maximale de 6 226 euros par année d’allocation versée ­ », précise Christine Cambus, directrice juridique et réglementation à la CNAV. Autre particularité : pour éviter que les retraités du monde rural ne renoncent au minimum vieillesse (ASPA), la valeur des fermes et de leurs bâtiments n’entre plus en compte pour le calcul depuis le 29 décembre 2011.
Attention, à partir du moment ou ils ont connaissance du décès, les départements et caisses de retraite disposent de cinq ans pour réclamer leur dû ! En général, « c’est le notaire chargé de la succession qui les contacte », explique Marie Monmarché.



S’il n’y a pas de notaire (certaines familles s’en passent pour les successions sans bien immobilier), le département ou la caisse de retraite contactent directement les ayants droit. Si la demande de récupération a lieu après le partage, chaque héritier doit rembourser à hauteur de la quote-part reçue : un sacré micmac, surtout quand les sommes ont été dépensées…
Ainsi, mieux vaut toujours se signaler dès l’ouverture de la succession, même lorsqu’on n’est pas certain que le défunt percevait des aides. Rembourser avant le partage reste bien plus simple, d’autant qu’il faut souvent vendre des biens pour solder la créance. Ceux qui ne peuvent régler la note, par exemple si le conjoint souhaite rester dans la résidence principale et ne pas la vendre, « peuvent demander l’étalement du remboursement sur plusieurs années, ou repousser le paiement au décès du conjoint survivant », explique-t-on conseil général des Hauts-de-Seine.

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