Jean Dubuffet, Michel Thévoz et Slavko Kopac à la Collection de l’Art Brut, le 25 février 1976, la veille de l’inauguration du musée.
JEAN-JACQUES LAESER / ARCHIVES DE LA COLLECTION DE L'ART BRUT
Alors que la Collection de l’Art Brut fête ses 40 ans en remontant le fil son histoire, le MASI à Lugano dévoile le jardin imaginaire d’un créateur insolite. Etat des lieux d’un art de la marge qui a la cote.
Phénomène sociologique et idéologique plus que mouvement esthétique, l’Art Brut fascine aujourd’hui bien au-delà du cercle des défricheurs qui le rendirent visible durant la seconde moitié du XXe siècle. Son internationalisation et sa popularisation sont attestés par nombre de publications, de spectacles et d’événements (lire page suivante), à commencer par l’exposition «L’Art Brut de Jean Dubuffet, aux origines de la collection», qui célèbre les 40 ans d’existence de la Collection de l’Art Brut à Lausanne: l’institution-mère – tant d’un point de vue historique que pour l’ampleur de son fonds (plus de 60 000 pièces) – où le même Jean Dubuffet déposa en 1976 sa collection d’œuvres singulières, constituée au fil de vingt années de recherches hors des sentiers battus de l’art officiel.
«Dessins, peintures, ouvrages d’art de toutes sortes émanant de personnalités obscures, de maniaques, relevant d’impulsions spontanées, animées de fantaisie, voire de délire»1, écrit-il au début de ses prospections en Suisse, en août 1945, au médecin genevois Charles Ladame. Ce dernier avait réuni dès 1918 une collection de productions de patients dans un petit musée au sein de l’asile psychiatrique de Bel-Air, dont il fut le directeur de 1925 à 1939. A sa retraite, il fait don d’une quarantaine d’œuvres au futur père de la notion d’Art Brut car à cette époque, Jean Dubuffet n’a pas encore défini le concept. La découverte empirique primant alors sur l’exégèse, il cherche, tant dans l’art naïf que dans les dessins d’enfants, matière à confirmer son intuition d’un art «naturel» et non appris, par opposition aux savoir-faire issus des écoles et des conventions d’usage. Ces années de prospection et de tâtonnement forment la «phase de gestation théorique de l’Art Brut», selon Sarah Lombardi, actuelle directrice du musée lausannois, et commissaire de l’exposition anniversaire qu’elle a conçue comme «un retour aux origines de la notion créée par Dubuffet».
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