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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

mercredi 16 février 2011

Le sexe sous antidépresseur : un médicament bouscule le tabou
Par Charlotte Chabas

15/02/2011

Dès le premier rendez-vous, son médecin lui a prescrit un antidépresseur. Depuis, sa vie sexuelle s'est « comme fanée », raconte Nathalie : « Je ne jouis plus. J'essaie de ressentir cette partie de mon corps, mais elle ne répond plus. »

Une nouvelle molécule bientôt commercialisée aux États-Unis redonne toutefois espoir à ceux qui ont le sentiment de payer au prix fort le traitement de la dépression : plus envie de sexe, plus de sensation, des problèmes nouveaux avec leurs partenaires, et pas d'avertissement, le plus souvent, de la part des prescripteurs.

« Je l'ai découvert tout seul, aucun des médecins que j'ai consultés ne m'avait prévenu », dit Christian, 33 ans, qui doit choisir entre une vie sociale supportable ou une vie de couple. Ce nouvel antidépresseur, « c'est peut-être la fin de [son] calvaire ».

En janvier, la FDA (Food and drug administration, équivalent américain de l'Afssaps), a donné son accord pour la commercialisation du Viibryd, le premier antidépresseur « sex-friendly ». D'après les tests, ce traitement n'aurait aucun effet secondaire sur la sexualité des patients. Contrairement à la majorité des antidépresseurs actuels.

Un phénomène « encore sous-évalué »


« Conserver sa libido malgré les médicaments », un argument commercial de poids pour le laboratoire à l'origine de la molécule, qui espère conquérir le marché très lucratif de l'antidépresseur. Un moyen aussi de lever le tabou sur ce sujet délicat, qui toucherait pourtant près d'un dépressif sur deux.

Le phénomène est difficile à chiffrer. Selon les études, il concerne entre 40% et 50% des personnes sous antidépresseurs. Pourtant, Patrick Blachère, psychiatre et enseignant en sexologie, l'estime « encore sous-évalué » :

« Les études sur les antidépresseurs se concentrent sur le début du traitement, soit les huit premières semaines. Pendant cette période, l'état du patient s'améliore et les effets positifs du médicament l'emportent sur les effets secondaires. Ce n'est que dans un second temps, quand le patient va mieux, qu'il réalise ses troubles sexuels, et que la souffrance se fait sentir. »

En France, le tabou dès la prescription

Le psychiatre espagnol Angel Luis Montejo s'est penché sur la question. D'après lui, cet effet secondaire serait le motif d'arrêt invoqué par un patient sur deux. Après analyse, il a aussi montré du doigt le comportement des médecins qui prescrivent les antidépresseurs.

Si en Grèce, en Italie et en Espagne, la sexualité est librement abordée avec les patients pendant les rendez-vous, ce n'est pas le cas dans les pays plus au nord. En France, tous les témoignages concordent en ce sens. Pour Nathalie, le dialogue est impossible :

« Je n'osais pas parler à mon médecin. Lui-même ne m'avait jamais prévenue que ça arrivait souvent aux malades sous antidépresseurs. Quand on est dépressif, on se dit toujours que le problème vient de nous. J'ai été soulagée quand j'ai découvert que ce n'était pas ma faute. »

En France, plus de 80% des antidépresseurs sont prescrits par les médecins généralistes. Les docteurs « de famille » sont donc les premiers confrontés à la souffrance des patients dépressifs. Mais les effets secondaires sont passés sous silence selon Marc Soussan, médecin à Paris :

« Spontanément, on ne parle pas de cet effet secondaire. La pudeur des patients joue beaucoup, même si de plus en plus d'hommes parlent de leurs difficultés. C'est sûr, ce n'est pas la bonne solution de laisser les patients lire les notices, mais pour en parler, il faudrait du temps. Beaucoup de temps. »

Manque de temps ou stratégie médicale


Une consultation de quinze minutes en moyenne, ce n'est pas suffisant pour évoquer tous les problèmes liés à la dépression. Mais dans la revue Impact Santé, le professeur Hélène Verdoux, chef de service en psychiatrie au CHU de Bordeaux, minimise la responsabilité des médecins :

« Il est facile d'accabler les généralistes en dénonçant le fait qu'ils prescrivent trop d'antidépresseurs, mais quelle autre solution ont-ils et quels moyens leur donne-t-on pour répondre à des gens présentant des symptômes dépressifs ? Qui va réaliser les psychothérapies : les psychologues non remboursés ? Les psychiatres souvent inaccessibles ? »

Taire les effets secondaire entre aussi dans une stratégie médicale, pour certains docteurs. Car le premier organe sexuel, c'est le cerveau, rappelle le psychiatre Patrick Blachère :

« En parler de but en blanc, c'est aussi prendre le risque d'induire des symptômes. C'est difficile dans un traitement de faire la différence entre ce qui relève du physique et ce qui révèle du psychosomatique. »

« Bricoler » avec les produits disponibles

Devant le mutisme du corps médical, beaucoup de dépressifs cherchent leurs réponses ailleurs. Sur les forums, les appels à l'aide se multiplient. Olivier y délivre des avis, donne ses « petits trucs » pour palier les effets des antidépresseurs.

Comme beaucoup d'hommes dépressifs, il prend en complément de son antidépresseur du Cialis. Un comprimé comparable au Viagra, qui agit pendant trente heures contre cinq pour le célèbre pilule bleue. Mais à 75 euros la boîte de huit comprimés, la sexualité n'est pas donnée à tout le monde :

« J'en avais besoin parce que ça touchait à l'image que j'avais de moi. Ce n'est pas la panacée, mais ça me rend à peu près présentable. »

Un « bricolage » que connaît bien le psychiatre Bertrand Gilot. Régulièrement, ses patients lui parlent de leurs difficultés à éprouver plaisir et désir. Ensemble, ils
cherchent le meilleur moyen de réduire cette souffrance tout en poursuivant
leur traitement.

Des solutions encore rares


Changement de médicament ou compléments stimulants, les solutions ne sont pas nombreuses. Mais l'enjeu est important : éviter » la mauvaise observance » des patients, c'est-à-dire leur tendance à ne pas respecter les consignes du traitement. Et le risque de les voir retomber dans la dépression.

Auteur du livre « Antidépresseurs : faut-il en prendre ou pas ? », Bertrand Gilot résume :

« Le corps médical considère que les antidépresseurs actuels sont très bien tolérés, par rapport à ceux prescrits il y a vingt ans. D'autant plus que le sexe, chez un dépressif, ce n'est pas vraiment une priorité. Il y a plus urgent. A tort ou à raison, on s'imagine que ce n'est toujours que secondaire. »

Aujourd'hui, l'espoir suscité par cette nouvelle molécule américaine est minimisé par la plupart du corps médical. Le psychiatre Patrick Blachère reste prudent. Il évite le terme de « remède miracle » :

« Rien n'assure que ce médicament sera vraiment efficace. Il existe déjà des antidépresseurs qui ont un effet moindre, voire nul sur la libido. Mais ce ne sont pas les plus prescrits parce que leur effet sur la dépression est insuffisant. »

Parmi les dépressifs, beaucoup préfèrent rester optimistes. Ils espèrent pouvoir mettre fin à « la douleur de l'érection » ou « au silence d'un rapport sans jouissance ». Un premier pas vers la guérison.
USP : Boycott des pseudo-concertations sur la loi réformant les modalités de prise en charge psychiatrique

A propos de l’audition du mardi 15 février 2011 par M. Guy Lefrand, député, rapporteur du « Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge »

L'Union Syndicale de la Psychiatrie communique


"Après l’adoption du projet de loi sur les soins sans consentement, portant réforme de la loi du 27 juin 1990, par le conseil des ministres du 26 janvier 2011, et la volonté du gouvernement d’utiliser la procédure parlementaire accélérée, L’USP constate le refus du gouvernement d’engager une véritable concertation sur le bilan de la loi de 90, bien qu’elle ait été prévue dans cette loi après 5 ans d’application. Elle dénonce la promulgation d’une loi indigne d’un état démocratique d’atteinte aux libertés individuelles et aux droits fondamentaux, qui repose sur la généralisation du soin contraint des patients, au nom de victimes de violences exceptionnelles.

Ni le « soin sans consentement » en ambulatoire, et particulièrement à domicile qui s’annonce comme un traitement contraint sans fin, ni la période d’observation de 72 heures en cas d’urgence conçue comme une véritable garde à vue psychiatrique — les deux sans garanties juridiques — ont à voir avec le respect humain de la souffrance psychique, et dénient l’incontournable temps nécessaire au travail relationnel avec les patients et les tiers dans l’accès aux soins et de leur continuité. De même, l’instauration d’un « casier psychiatrique » stigmatise à vie toute personne ayant été une fois dans sa vie hospitalisée sous contrainte.

Ce recours au tout sécuritaire accompagne la nouvelle gouvernance, administrative et comptable, qui détruit depuis plusieurs années l’accès et la continuité aux soins psychiques en démantelant des pans entiers de la psychiatrie publique.

Pour ces raisons, L’Union Syndicale de la Psychiatrie a décidé de boycotter les pseudo-concertations, en particulier celle du 15 février 2011.

Elle se déclare prête à être auditionnée, dans des conditions enfin dignes, par la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale et la commission des lois du Sénat pour faire valoir sa position."
L'ère de la batonnite (dans les roues)
 Le progrès tuera l'homme… mais en attendant il casse les bonbons aux infirmier(e)s. Par Didier Morisot, infirmier en psychiatrie

(Version longue d'une chronique parue dans L'Infirmière magazine n°272, 1er février 2010)

En devenant infirmier, je ne pensais pas qu’il fallait (dans certains services) taper sur un clavier pendant des heures. Eh oui, le mal est universel mes amis ; le but final de toute institution n’étant pas de remplir sa mission initiale, mais bien de justifier son existence à l’aide de moyens statistiques et comptables, on n'a pas fini de pianoter… entre nous, le scénario est identique au Pôle Emploi, à la Sécurité sociale et même dans les commissariats ; là-bas, ils appellent ça la batonnite : mettre des bâtons dans les cases afin d’alimenter les chiffres de la délinquance. Tout en caressant le ministère dans le sens du poil, bien sûr…

Facile ; un dealer arrêté avec cinq doses, ce n’est pas une affaire résolue, mais cinq délits solutionnés. Par contre, dix voitures vandalisées au même endroit ne font qu’un seul cas de dégradations de matériel. Elle est pas belle, la vie ?

J’avoue, je suis un scélérat ; moi aussi j’ai pactisé avec la batonnite afin d’avoir la paix. Dans ma carrière, il m’est en effet arrivé de céder à la pression ambiante ; il faut faire du chiffre, les gars… en clair, cliquez rusé ; la santé des gens, on s’en tape, le service rendu, on s’en cogne. Vous comprenez ; les restrictions budgétaires, la facturation à l’activité, tout ça tout ça…

Et je ne parle pas de l’accréditation, cette invention bizarre à mi-chemin de l’écran de fumée et de la sodomisation des mouches…

Priorités inversées

J’avais déjà quitté les urgences, saoulé par les papiers ; les blessés ont mal ? Eh bien, on va déjà s’occuper des formulaires (un quart d’heure), et s’il nous reste du temps, on leur filera un antalgique. Ne rigolez pas, c’est du vécu…

Bref, l’administratif tuera le soin, un(e) infirmier(e) passant volontiers la moitié de son temps au téléphone ou devant son écran. Pour une meilleure efficacité, au service du patient ; et ta sœur, elle compte les poux sur la tête du facteur ?

Marre de travailler comme une bille, marre d’inverser les priorités ; j’ai trop souvent vu des collègues se ramasser une méga soufflante pour une inversion de paperasses, alors que certains comportements très limites ne déclenchaient jamais le moindre courant d’air. Ne rigolez pas, c’est encore du vécu.

Par contre, le jour où vous serez hospitalisé, vous aurez le droit de pleurer…

Encore et toujours la lutte à l'hôpital
Bourges
mardi 15 février 2011


En ce jour de Saint Valentin, on ne peut pas dire que ce soit les grandes amours entre le personnel et la direction du centre hospitalier psychiatrique George-Sand, en conflit depuis plusieurs semaines à propos de la suppression des gardes médicales de nuit sur les sites de Dun-sur-Auron et Chezal-Benoît.

Une délégation des syndicats CGT et Sud Santé a été reçue le 8 février dernier par le délégué territorial de l'agence régionale de santé. Estimant n'avoir obtenu aucune réponse à leurs revendications, les manifestants ont décidé de poursuivre l'occupation du hall d'accueil administratif du site casalais jusqu'à hier, jour de l'inauguration de la blanchisserie et de l'Unité de psychiatrie au long court.

Dès 14 heures, les responsables syndicaux, le personnel du Centre hospitalier, mais également des retraités de l'établissement, des commerçants casalais et des élus locaux étaient présents devant les bâtiments de la blanchisserie pour montrer leur mécontentement à Louis Cosyns, député-maire de Dun-sur-Auron et président du conseil de surveillance du centre hospitalier George-Sand, Jean-Paul Servier, directeur de l'établissement hospitalier et président du directoire, et Jacques Laisné, directeur général de l'Agence régionale de santé du Centre.

Banderoles, drapeaux et trompettes accompagnaient les deux cents personnes présentes, solidaires de ce mouvement de contestation, sous l'oeil vigilant de la gendarmerie installée à proximité.

Face à cette opposition, les responsables ont tenté de rejoindre le deuxième bâtiment à inaugurer, mais sans succès, les issues étant également bloquées par les manifestants.

Devant cet état de fait, Jean-Paul Servier repartait à Bourges et exprimé le souhait d'une rencontre avec les syndicats sur le site de Beauregard (site principal du centre hospitalier George-Sand, à Bourges). Mais ces derniers préfèrent une entrevue à Chezal-Benoît. Devant le refus de la direction, ils ont décidé de poursuivre leur mouvement d'occupation du hall d'accueil casalais.
Daniel Leduc


Les Livres de Philosophie

La profondeur des sexes. Pour une mystique de la chair
Fabrice Hadjadj


Quel est le sens profond du sexe ? Atteindre le septième ciel ? Sans doute, et très littéralement. Religion du Dieu fait chair, le christianisme est aussi celle de la chair divinisée.
La libido est désormais un secret de polichinelle. Rien n’est moins inconscient, rien ne s’affiche davantage. Il ne faut pourtant pas se leurrer. La libération sexuelle pourrait bien être une ceinture de luxure aussi cadenassée que la ceinture de chasteté. L’hypersexualisation actuelle pourrait même cacher une haine du sexe. Comme à ses premiers siècles, le christianisme se retrouve alors aujourd’hui dans la situation singulière d’avoir à chanter la gloire du corps, la spiritualité de la chair, et à lui redonner sa dimension spirituelle.
En analysant successivement la spécificité de la sexualité humaine, le couple et la signification de l’union charnelle, puis celle de la naissance, cet essai montre en quoi la sexualité nous dépasse et tente de saisir son mystère ultime.  (Présentation de l’éditeur)

Février 2011 – Points – 9 €
Les Livres de Philosophie

Le corps en acte. Centenaire Maurice Merleau Ponty
Alain Berthoz et Bernard Andrieu (ed.)


Le centenaire de la naissance de Maurice Merleau-Ponty a été l'occasion de tenir un colloque international au Collège de France les 22 et 23 septembre 2008 par les Pr Alain Berthoz (Professeur au Collège de France et titulaire de la Chaire de physiologie de la perception et de l'action) et Bernard Andrieu (Pr d'Epistémologie du corps et des pratiques corporelles à la faculté de sport de l'UHP de Nancy Université) en réunissant nos collègues Salvatore M. Aglioti, Olaf Blanke, Gilles Boëtsch, Denis Cerclet, Nathalie Depraz, Stéphanie Dupouy, Anne Fagot-Largeault, Denis Forest, Jean Gayon, Béatrice de Gelder, Julie Grezes, Gérard Jorland, Marc Jimenez, Bernard Lafargue, Dorothée Legrand, Pierre Livet, Catherine Malabou, Lionel Naccache, Jean-Luc Petit, Philippe Rochat, Michel Récopé, Emmanuel de Saint-Aubert, Richard Shusterman, Bérangère Thirioux.

Les travaux de Maurice Merleau-Ponty (1908-1961), titulaire de la Chaire de philosophie au Collège de France à partir de 1952 jusqu’à sa mort en 1961, sont aujourd’hui une des références sans laquelle la philosophie du corps, la physiologie de la perception et de l’action, la psychologie du développement et la modélisation in vivo des gestes n’auraient pu constituer leurs champs actuels de recherche : Schéma corporel, Image du corps, Conscience du corps, Chair, Intersubjectivité, Perception… autant de notions encore au cœur des sciences de l’homme et de la nature.

Janvier 2011 - Presses universitaires de Nancy – 20 €


Musique
Michel Serres

« D’où jaillit la Musique ? Des bruits du monde ? Des clameurs issues des assemblées ? De nos émotions ? Et comment la définir ? Rien de plus difficile que de répondre à ces questions.
J’ai préféré dire ce qu’elle est en trois contes. Légendaire, le premier suit la vie d’Orphée, son initiation auprès des Bacchantes et des Muses, puis sa plongée dans les Enfers à la recherche d’Eurydice, son amante. Comment aimer en Musique ? Autobiographique, le second envahit le Grand Récit de la connaissance qui devient ici une Grande Symphonie. Peut-on penser en Musique ? Biblique enfin, le dernier psalmodie, de la Genèse à la Nativité.
Doit-on prier en Musique ? »
Michel Serres

Mars 2011 – Le Pommier – 17 €

Les Livres de Psychanalyse

Les intentions du corps. Psychanalyse, biologie et sciences de l’esprit
Mathieu Arminjon

Présentation de l’éditeur. Alors que nous sommes entrés de plain-pied dans le siècle du cerveau, on peut se demander s’il reste encore une place pour le projet freudien. Or, si la psychanalyse veut renouer le dialogue avec les sciences contemporaines, c’est certainement du côté de son enracinement biologique que tout se jouera. Pour autant, le positionnement du freudisme vis-à-vis des sciences biologiques n’est pas sans poser quelques problèmes. La psychanalyse se présente en effet comme une discipline protéiforme dont la cohérence interne peut paraître discutable. Le freudisme relève en effet d’un double projet contradictoire. D’un côté, il prétend procéder à une naturalisation du psychisme, c’est-à-dire à l’explication des mécanismes psychiques selon les lois et la méthode des sciences naturelles (physique, biologie). De l’autre, il entend établir une herméneutique des productions psychiques, et attribuer à cet exercice un statut à la fois heuristique et thérapeutique. Présenté ainsi, il semble s’attaquer frontalement à ce qui oppose, depuis toujours, sciences de la nature et sciences humaines. Devant le gouffre séparant le freudisme de lui-même, certains ont appelé la psychanalyse à renoncer à l’une ou l’autre de ses deux ambitions. La présente étude se donne pour but principal de montrer comment le double projet freudien s’avère bien fondé dès lors qu’il ne s’agit pas de penser ses deux versants sur un continuum, mais sur le mode d’une articulation méthodologique pertinente. Malgré  les différences de lexique, de mode d’exposition, au-delà même des tentatives de décrédibilisation, le projet freudien peut encore jouer un rôle au sein des débats qui animent les sciences de l’esprit les plus contemporaines".

Mathieu Arminjon est philosophe et détient un doctorat en sciences de la vie. Il est collaborateur scientifique aux hôpitaux universitaires de Genève ainsi qu’à la fondation Agalma.

Manger des baies pour la prévention du Parkinson

Selon une étude présentée au Congrès de l’American Academy of Neurology, que l’on soit homme ou femme, manger régulièrement des baies est un bienfait pour réduire la probabilité de développer une maladie de Parkinson. Pour la gent masculine, le fait de consommer des pommes, des oranges ou plus précisément tous aliments riches en flavonoïdes apporte une réduction supplémentaire du risque. Les flavonoïdes sont aussi appelés vitamine P, qui est trouvée non seulement dans les plantes et les fruits (baies, agrumes…), mais aussi dans le chocolat, le vin, le thé. L’étude a porté sur 49 281 hommes et 80 336 femmes. Un logiciel a été utilisé pour calculer la consommation de vitamine P, puis une association a été cherchée avec la maladie de Parkinson. Au cours du suivi (22 ans), 805 personnes ont développé un Parkinson. On observe une réduction de 20 % du risque chez les plus gros consommateurs de flavonoïdes masculins, tandis que chez les femmes, l’association favorable n’apparaît que pour la consommation de baies (Xiang Gao et coll. Harvard).
Dr BÉ. V

14/02/2011
Un jour dans leur monde

C'est l'hôpital psychiatrique au sens populaire du terme. Ils y séjournent quelques jours ou des années : les patients affectés par des maladies mentales diverses y vivent dans un rapport à la réalité généralement altéré, voire annihilé.

Reportage.


Dans le hall de Bellevue, une dame âgée est assise à une table, elle ne bouge pas, absorbée par ce qu'elle seule sait. « Elle reste là toute la journée, comme ça. C'est sa place. Parfois, un autre patient la rejoint », indique Pierre Girardet, le chef de la psychiatrie. Aux temps ignorants où l'on parlait encore des « fous », on eut désigné Bellevue du mot « asile ». Tout ceci est révolu. Surtout à Bayonne où la psychiatrie est un service du centre hospitalier. Mais l'homme du dehors ne peut le nier : y pénétrer relève de la confrontation.

Toute l'hospitalisation publique du Pays basque se fait entre ces murs, dans le quartier Cam de Prats. « Vous avez en ce moment 119 patients. Ils sont ici pour des durées variables. Cela peut-être pour quelques jours. Certains sont là depuis deux ans. » La variété des cas explique celle des séjours. Un seul point commun à tous : ces patients « décompensent » (lire par ailleurs), ont un commerce souvent difficile avec la réalité.

« Des millions… »


Bien des peurs se greffent sur la notion très vaste de maladie mentale. La faible fraction des cas spectaculaires nourrit craintes autant que fantasmes. La statistique, elle, reste imperméable : « Sur les 119 patients actuellement hospitalisés, une ou deux personnes sont potentiellement dangereuses», situe le médecin psychiatre. «J'ai connu ailleurs un patient qui avait mangé sa fille. Ici, ce sont plutôt les patients qui sont victimes d'une société qui n'est pas faite pour eux. »

Au premier étage, l'aile « Errobi ». « C'est un service difficile, avec des pathologies lourdes. » On y entre comme dans n'importe quel autre : pas de verrou, l'attention des infirmières et aides médico-psychologiques (AMP) suffit. « C'est un service ouvert », insiste Josiane, infirmière depuis vingt ans en psychiatrie. « On n'est pas sans arrêt à les surveiller. Les patients nous suivent de très près. C'est même plutôt nous qui essayons de nous en défaire. »

Passe justement l'un d'eux, papy à l'air goguenard. A notre adresse : « Des millions, des millions, des millions… » Puis s'en va. « Vous avez de la chance, sourit Josiane. Il vient de remplir votre compte en banque de millions d'euros. Patrick (1) fait la fortune des gens par le pouvoir de la pensée. » Force mentale également employée à guérir de mille maladies. Patrick fait aussi les rois. Lors d'un précédent passage, nous étions pour lui « M. le maire ».

Cigarette autorisée

Le bonhomme tient dans ses mains un paquet de « Lucky Strike ». La cigarette compte parmi les singularités des « la psy ». Un patio permet d'en griller une. « C'est une dérogation à l'hôpital », éclaire Pierre Girardet. Et « une sorte d'anxiolytique », reconnaît Laure, une autre infirmière. Elle travaille dans le pavillon voisin, « la Rhune », équipé d'un fumoir. L'équipe médicale y traite la crise. Souvent, les malades arrivent du service des urgences psychiatriques, basé sur le site de Saint-Léon. « Un délire peut durer dix, quinze jours. »

La crise peut-être violente. Une « chambre d'isolement » vient d'être créée. Dans une chambre « classique », on observe des détails qui situent ce service de la raison évaporée : une caméra, le miroir de la salle de bain facilement amovible, le lit n'a pas d'angles mais des arrondis, il est scellé au sol… Dans une porte, un trou, œuvre d'un malade. Sur un mur, une couche de peinture détonne : « Le mur a été refait, il était défoncé », renseigne Laure.

Retour à « Errobi ». Quelques chambres demeurent fermées. « Des patients dangereux pour eux-mêmes et les autres », désigne Jessy. Parmi eux, il y a Mickaël. « Vous voulez le rencontrer ? On va le lui demander. » Avant d'entrer : « Vous devriez enlever vos lunettes, il aime bien. » Ni meubles, ni effets. Tout objet présente un potentiel de blessure pour ce garçon d'une vingtaine d'années. Le jeune homme est couché dans un coin, sur un matelas. « Tel que vous le voyez, il a beaucoup progressé. Je l'ai vu dormir nu sur une simple bâche », confie Josiane.

Mickaël porte un casque, pour le protéger lorsqu'il se cogne la tête contre les murs. La vitre de la porte d'entrée est brisée : c'est lui. « Du verre sécurité… » Le garçon peut développer une force terrible. Josiane relève sa manche droite sur un avant-bras rougi. « Il ne m'avait pas vue depuis longtemps, il m'a saisi le bras et a serré très fort. Ça n'avait rien d'agressif. »

Seul

Il ne parle pas, Mickaël. « mais il communique et il comprend ». Le regard et les gestes permettent l'échange. A ces attitudes, les infirmières comprennent qu'il n'a pas vraiment envie de nous voir. Alors nous sortons. Depuis le couloir, on entend son cri profond.

Quel sens a la vie de Mickaël ? Quelles possibilités d'accomplissement ? Plus simplement de plaisir ? « Son état oscille. Dans les bons moments, on peut l'amener à la piscine, manger au Mc Do. Il faut être modeste », préconise Pierre Girardet. L'ordinaire parfois bousculé n'est pas rien. Et c'est toujours avec le personnel de l'hôpital. Car plus personne ne vient voir Mickaël. « Les gens, comme lui, dont plus personne ne veut, on les trouve ici. »

(1) Tous les noms des patients ont été modifiés dans cet article.

IMMERSION Le Centre hospitalier de la Côte basque, grand vaisseau aux 3 000 employés et 1 200 lits est en pleine restructuration. Pendant sept semaines, tous les lundis, « Sud Ouest » pose son regard sur quelques aspects de sa vie. Aujourd'hui, la psychiatrie.

Bayonne · Pyrénées-Atlantiques


dimanche 13 février 2011

Critique"Leçons sur la volonté de savoir. Cours au Collège de France, 1970-1971", de Michel Foucault : Michel Foucault en toute liberté

LE MONDE DES LIVRES


Alors que paraissent ses premiers cours au Collège de France, plusieurs ouvrages permettent de réévaluer le legs de celui qui est aujourd'hui le philosophe le plus lu et le plus commenté de la deuxième moitié du XXe siècle. L'occasion pour son compagnon Daniel Defert de rappeler que "les pistes qu'il explorait étaient interprétables selon des idéologies conflictuelles
" et qu'aucune lecture univoque ne saurait épuiser la richesse d'une telle œuvre.


Considéré comme un extrémiste pour sa défense des minorités et des exclus, attaqué par les historiens qui le jugeaient trop philosophe et par les philosophes qui le trouvaient trop historien, accusé d'avoir soutenu la révolution islamique en Iran en 1979, voué aux gémonies par des puritains fous qui virent en lui un assassin transmettant le sida, Michel Foucault est aujourd'hui, plus de vingt-cinq ans après sa mort, le penseur de la deuxième moitié du XXe siècle le plus lu et le plus commenté dans le monde, autant par les spécialistes des études culturelles et les tenants du libéralisme que par les post-marxistes et les théoriciens de la littérature, de l'art et de l'histoire des sciences. Aucune lecture univoque ne saurait épuiser la richesse d'une telle œuvre.

Proche de la deuxième gauche, Foucault a laissé un immense héritage conceptuel, permettant une nouvelle approche universelle de la sexualité, de la folie, de la médecine, de la psychopathologie, de la philosophie et des grands savoirs institués : science, économie, politique, droit. Il est mort trop tôt pour avoir le temps d'aborder tous les thèmes qui le hantaient. Du coup, le rassemblement des textes et entretiens (Dits et écrits, Gallimard, 1994) et l'établissement des cours qu'il donna au Collège de France, de 1970 à 1984, qui s'ajoutent à des ouvrages classiques somptueusement écrits, n'en sont que plus fascinants : on y trouve pêle-mêle toutes les formes d'une pensée en perpétuelle effervescence.

En 1970-1971, pour la première année de son cours au Collège de France - ces Leçons sur la volonté de savoir qui paraissent aujourd'hui et annoncent l'ensemble à venir -, Foucault décide de montrer, à travers un commentaire des grands textes de la Grèce ancienne (Hésiode, Aristote, Homère, Sophocle, les Sophistes), éclairés par Kant, Spinoza et Nietzsche, comment chaque époque produit des discours visant à départager le vrai et le faux, le juste et l'injuste, le pur et l'impur. En un mot, il s'agit pour lui de mettre en évidence comment, derrière l'ordre apparent des mots et des choses, se constituent des énoncés transgressifs : désordres, rituels, césures, failles.

Ainsi s'affrontent sans cesse plusieurs types de savoirs, entre volonté de souveraineté et désir de vérité : haute autorité monarchique de l'Un, d'une part, disparité engendrée par la négation de toute unité, de l'autre.

Au cœur de ces Leçons, Foucault consacre un chapitre entier à la pièce de Sophocle, Œdipe roi, qui témoigne, selon lui, et de façon emblématique, d'un moment originel d'affrontement, pour la pensée occidentale, de tous les types de savoirs. Il donnera six variantes de ce commentaire, après la conférence du 12 mars 1971, "Le savoir d'Œdipe", ajoutée ici par l'éditeur dans ce volume programmatique.

Pour éviter que ne se réalise l'oracle d'Apollon, qui lui avait prédit qu'il serait tué par son fils, Laïos, époux de Jocaste et descendant de la famille des Labdacides, remet son nouveau-né à un serviteur après lui avoir percé les pieds. Au lieu de le conduire au mont Cithéron, celui-ci le confie à un berger qui le donne à Polybe, roi de Corinthe sans descendance. Parvenu à l'âge adulte, Œdipe, croyant fuir l'oracle, se rend à Thèbes. Sur le chemin, il croise Laïos et le tue au cours d'une rixe. Il résout l'énigme de la Sphinge puis épouse Jocaste qu'il n'aime ni ne désire et dont il aura quatre enfants. Quand la peste s'abat sur la cité, il enquête pour savoir la vérité que Tirésias, le devin aveugle, connaît. Un messager, l'ancien serviteur, lui annonce la mort de Polybe mais lui raconte aussi comment il l'a recueilli autrefois des mains du berger. Jocaste se pend et Œdipe se crève les yeux.

Pour les Grecs, Œdipe est un héros tragique atteint de démesure. Il se croit puissant par son savoir et sa sagesse mais il est contraint de se découvrir autre que lui-même, une souillure qui trouble l'ordre des générations, un "boiteux", fils et époux de sa mère, père et frère de ses enfants, assassin de son géniteur.

Lorsque Freud s'empare de cette affaire en 1896, il détourne la signification grecque de la tragédie pour faire d'Œdipe un héros coupable de désirer inconsciemment sa mère au point de vouloir tuer son père, liant ainsi la psychanalyse au destin de la famille bourgeoise moderne : destitution du père par les fils, volonté d'une fusion avec la mère, comme figure première de tous les attachements affectifs.

Critiquant cette réinvention freudienne, Foucault affirme que la tragédie œdipienne met en scène l'affrontement entre différents types de savoirs : procédure judiciaire de l'enquête, loi divinatoire, souveraineté transgressive, savoir des hommes d'en-bas (le messager, le berger), connaissance vraie du devin. Et il en tire la conclusion qu'il s'agit là d'un schème fondateur : tout savoir unificateur peut être battu en brèche par le savoir d'un peuple et par celui du sage (Tirésias). En devenant impur, Œdipe perd le savoir sur la vérité, il ne peut plus gouverner : "Œdipe ne raconte pas la vérité de nos instincts et de notre désir, affirme Foucault, mais un système de contrainte auquel obéit, depuis la Grèce, le discours de vérité dans les société occidentales."

On voit donc ici de quelle manière Foucault se confronte au discours psychanalytique, dont il fait un moment de la constitution d'un nouveau savoir sur l'homme. Et c'est pourquoi, en 1976, dans La Volonté de savoir, premier volume d'une Histoire de la sexualité, dont le titre est emprunté à ce premier cours, il transformera Freud en une sorte d'Œdipe réinstituant le pouvoir symbolique d'une souveraineté perdue (la loi du père) mais affrontant la montée en puissance des trois figures rebelles de la femme hystérique, de l'enfant masturbateur et de l'homosexuel. Manière de penser les fondements d'une histoire de la psychanalyse.

Mais, au-delà de cette confrontation, ce superbe commentaire d'Œdipe traduit la conception politique de Foucault. Loin de tout anti-humanisme - terme dont il avait horreur -, il fait de la liaison entre le savoir du sage et celui de la société civile la condition de l'émergence d'un véritable discours démocratique capable de renverser les souverainetés archaïques.

L'établissement du cours par Daniel Defert à partir de notes manuscrites, sa présentation, la bibliographie et les index - dont un des termes grecs - sont parfaits. Voilà donc une belle restitution de la parole foucaldienne, à travers laquelle on a l'impression d'entendre la voix métallique du philosophe s'adressant à la foule de ses auditeurs, sans le moindre effet oratoire, avec parfois ses deux mains posées le long de son visage.

LEÇONS SUR LA VOLONTÉ DE SAVOIR. COURS AU COLLÈGE DE FRANCE, 1970-1971, suivi de "Le savoir d'Œdipe" de Michel Foucault. Edition établie sous la direction de François Ewald, Alexandro Fontana et Daniel Defert. Gallimard/Seuil, "Hautes études", 318 p., 23 €.

Un Cahier de L'Herne consacré à Michel Foucault paraîtra le 2 mars.


Elisabeth Roudinesco

samedi 12 février 2011

"Foucault va au cinéma", de Patrice Maniglier et Dork Zabunyan : quand le philosophe fait son cinéma

LE MONDE DES LIVRES
Critique

10.02.11

Dans Ce qu'aimer veut dire (POL, voir "Le Monde des livres" du 7 janvier), où il raconte son amitié avec Foucault, Mathieu Lindon évoque la petite bande de copains qui avait l'habitude de se retrouver dans l'appartement parisien du philosophe, au début des années 1980. L'écrivain y utilise souvent le mot "séance" pour décrire une sociabilité fondée sur la consommation simultanée de drogue et de films. Pendant leurs "trips" d'acide, en effet, Foucault et ses fidèles regardaient Citizen Kane ou un épisode des Marx Brothers. C'était toute une organisation, qui entraînait parfois quelques complications : "On a juste commis l'erreur de ne pas avoir installé l'écran et, surtout, le projecteur et la première bobine avant la projection qui a lieu à l'autre bout de l'appartement, écrit Lindon, (...) ça met un temps fou, notre état nous rendant peu aptes à ce genre de manipulations techniques."

Que le cinéma puisse faire tourner la tête, ou du moins qu'il soit apte à bousculer notre existence, et même à y faire surgir des questions vertigineuses, cela relevait de l'évidence pour Foucault. Du reste, sans avoir jamais bâti une véritable "théorie" de l'expérience filmique, les textes qu'il lui a consacrés ont beaucoup nourri la critique et la pratique du septième art. Dans un bref essai intitulé Foucault va au cinéma, Patrice Maniglier et Dork Zabunyan méditent cette rencontre du producteur de concepts avec l'image en mouvement. Leur livre est rédigé d'une plume solide, claire, enthousiaste. A l'instant de le refermer, on voudrait pouvoir se réfugier dans une salle obscure avec, pour tout viatique, une lampe de poche et les oeuvres de Foucault.

La démarche des deux jeunes philosophes ne relève pourtant pas de ce que l'on nomme désormais la ciné-philosophie. Loin d'envisager le cinéma comme un support qui viendrait simplement porter la philosophie à l'écran, les auteurs le définissent comme "un partenaire, un rival, une inspiration, où s'expérimente ce que veut dire, concrètement, penser autrement". Ici, l'effort consiste donc à repérer "les relais, voire les courts-circuits qui peuvent exister entre la production cinématographique et les livres de Foucault", comme le souligne Dork Zabunyan.

A cette fin, les auteurs étudient le fonctionnement de plusieurs films : non seulement Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère, de René Allio (1976), directement inspiré de l'ouvrage éponyme de Foucault, mais aussi Nuit et brouillard, d'Alain Resnais (1955), ou Hitler, un film d'Allemagne, de Hans-Jürgen Syberberg (1977). A chaque fois, il ne s'agit pas de constater que ces films illustrent les thèses de Foucault sur la sexualité, la folie ou le pouvoir, mais de montrer que cet art se confronte aux mêmes problèmes et les explore selon ses propres modalités.

Parmi ces problèmes proprement métaphysiques, les auteurs insistent sur notre rapport au temps, notre façon de distinguer passé et présent, bref sur notre manière de vivre l'histoire. Au fond, écrit Patrice Maniglier, la pensée de Foucault et la pratique du cinéma posent une seule et même question : qu'est-ce qu'un événement ?

L'une comme l'autre opèrent un même pas de côté, ou plutôt un même décadrage par rapport aux repères établis : elles ont en commun de chercher un devenir alternatif, plein de ruptures et de discontinuités, irréductible au temps des chronologies ; elles partent en quête d'un rapport non légendaire au passé, qui ferait de l'histoire tout autre chose qu'un savoir figé : un outil critique à l'égard du présent.

FOUCAULT VA AU CINÉMA de Patrice Maniglier et Dork Zabunyan. Bayard, "Logique des images", 168 p., 21 €.

Signalons que la parution de ce livre s'accompagne d'une programmation spéciale à la Villa Arson de Nice. Jusqu'au mois d'avril, une cinquantaine de films y seront projetés afin de montrer comment les questions posées par Foucault peuvent se trouver explorées au cinéma. Tél. : 04-97-03-01-15. Sur le Web : Villa-arson.org.



« Hallucinantes » révélations sur Chopin

Mozart mort à 35 ans, Schubert à 31, Mendelssohn à 38, Schumann à 46, Arriaga à 21... Génie musical et longévité ne font pas forcément bon ménage. Chopin en est un autre exemple, fauché dans la fleur de l’âge, à 38 ans, non pas de tuberculose comme on le croyait jusqu’à présent mais, selon des chercheurs polonais, d’une fibrose kystique, maladie génétique qui atteint les poumons. Hypothèse qui n’a pu être étayée cependant, le gouvernement polonais refusant qu’on fasse un test ADN sur le cœur du compositeur, conservé à Varsovie. Mais ce n’est pas tout, d’autres chercheurs, espagnols, cette fois-ci, appartenant au service de radiologie et de neurologie de l’hôpital de Lugo ont cherché à comprendre l’origine des hallucinations dont souffrait le compagnon de George Sand à travers justement les témoignages de celle-ci.

« Je vis émerger du piano ces créatures maudites »

Dans leurs travaux publiés dans Medical Humanities, un des titres du groupe BMJ, les deux neurologues rapportent plusieurs exemples des hallucinations dont fut victime Chopin. Ainsi, dans une lettre à la fille de George Sand, le compositeur rapporte qu’au cours d’un concert privé à Manchester, alors même qu’il interprétait sa Sonate en si mineur, il fut contraint d’abandonner précipitamment son instrument : « Je vis émerger du piano ces créatures maudites apparues déjà par une nuit lugubre dans un monastère ». George Sand avait déjà raconté dix ans avant cet épisode que le cloître du monastère de Majorque « était pour lui plein de terreurs et de fantômes » et qu’une autre fois, toujours aux Baléares, alors qu’il pleuvait fort et qu’ils se promenaient, Chopin s’était mis à confondre rêve et réalité, se voyant « noyé dans un lac », persuadé qu’il était « d’être mort lui-même ». Parfois, encore, des fantômes l’appelaient ou l’étreignaient quand ce n’est pas la mort qui frappait à sa porte...

Dans leur étude, les chercheurs espagnols notent que Chopin se souvenait parfaitement de ses hallucinations qui survenaient en général le soir et qu’elles coïncidaient à des épisodes de fièvre ou d’infection aiguë. Dans ces hallucinations visuelles, l’image de la mort revenait souvent. Autant d’éléments qui font penser aux chercheurs de Lugo que Chopin soufrait dune épilepsie, focalisée sur le lobe temporal. En effet, ce type d’épilepsies produit des hallucinations visuelles brèves et fragmentaires, s’accompagnant d’un sentiment d’angoisse intense, « exactement comme celles dont Chopin disait souffrir », conclut Manuel Vazquez Caruncho et Francisco Branas Fernandez.
L’ARS Ile-de-France met le cap sur le médico-social

L'Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France a annoncé mardi qu'elle engagerait près de 125 millions d'euros supplémentaires sur trois ans pour permettre la création de plus de 6.000 places dans le secteur médico-social (accueil des personnes âgées et handicapées). «44,9 millions seront dédiés aux établissements et services en faveur des personnes âgées dépendantes et 79,2 M seront alloués aux structures et services en faveur des personnes handicapées», a indiqué l'ARS dans un communiqué, précisant qu’un «effort plus particulier sera déployé pour la Seine-Saint-Denis et pour Paris.»




Nos gènes lisent-ils le DSM ?

C’est pratiquement devenu un lieu commun de dire que l’autisme « relève des troubles psychiatriques ayant la plus forte connotation d’hérédité » rappelle l’éditorialiste de The American Journal of Psychiatry. Pourtant, les recherches permettant de corroborer cette thèse courante restent confinées à « une poignée » d’études sur des jumeaux et à des échantillons de population généralement réduits. De surcroît, alors que plusieurs études ont déjà éclairé l’aspect génétique dans certaines affections psychiatriques chez l’adulte (troubles anxieux, dépressions, addictions et, plus récemment, troubles de la personnalité), il existe moins de travaux comparables sur la composante génétique en pédopsychiatrie.

Autre constat : nos modèles (patterns) étayant la susceptibilité génétique  (inhérente à certains troubles psychiatriques) ne s’identifient pas aux catégories du DSM actuelles. L’auteur résume ce fait en des termes pittoresques : « Nos gènes ne semblent ni avoir lu le DSM-IV, ni respecté particulièrement les catégories diagnostiques que ce manuel a établies ! » Cette présentation sarcastique souligne les limitations de nos schémas physiopathologiques et nosographiques : malgré leur pertinence éventuelle, ceux-ci ne restent que des approches parcellaires pour cerner la complexité des situations réelles. Dans l’exemple des « troubles du spectre autistique » (TSA, selon l’expression consacrée en anglais, pour autism spectrum disorders), la problématique révèle une « forte connotation héréditaire » (highly heritable), mais partage cette susceptibilité génétique avec plusieurs autres affections pédopsychiatriques : TDAH[1], tics, troubles de l’apprentissage, etc. Par exemple, presque 75 % des facteurs de risque génétique relatifs aux TSA sont partagés avec le TDAH. Et dans les fratries officiellement « non touchées » des sujets avec autisme, environ 9 % de leurs proches présentent toutefois des antécédents de retard de langage ou de traits autistiques.

Si nos gènes ne se conforment pas à notre nosographie, celle-ci devra donc, tôt ou tard, se conformer aux réalités génétiques.

[1] Troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité
Dr Alain Cohen

Kendler KS : Advances in our understanding of genetic risk factors for autism spectrum disorders. Am J Psychiatry 2010 ; 167-11 :1291–1293.
Publié le 28/01/2011
Inégalité de fréquence des maladies mentales, reflet des inégalités sociales

Des études ont montré qu’une répartition équitable des revenus dans un pays est corrélée de manière directe avec des indicateurs comme l’indice de confiance ou l’état de santé, et de façon inverse avec le taux de violence. En particulier, rappellent les éditorialistes du British Journal of Psychiatry, « les maladies mentales sont plus fréquentes dans les sociétés plus inégalitaires. » Dans une société basée sur la concurrence, expliquent-ils, cette association reflète la « sensibilité humaine aux relations sociales et à l’impact de la différence des revenus sur la hiérarchie sociale. »

Et cette vulnérabilité aux inégalités socio-économiques touche aussi l’Europe : au Royaume-Uni, le fardeau des troubles psychiatriques (burden of mental health problems) est ainsi très élevé, puisqu’on estime qu’« un million d’enfants (soit 10 % des jeunes britanniques entre 5 et 16 ans) souffrent d’une maladie mentale. » Aperçu : dans un établissement secondaire, sur 1 000 élèves, 50 souffrent d’une dépression sévère, 100 sont « en détresse » (distressed), 15 présentent un trouble obsessionnel compulsif, et 5 à 10 % (surtout des filles) un trouble des conduites alimentaires. Et cela ne s’arrange pas avec l’âge : « Au Royaume-Uni, une enquête menée en l’an 2000 a montré que 23 % des adultes ont souffert d’une affection psychiatrique au cours des douze mois précédents », 4 % connaissant même « plus d’un trouble. » Constat identique aux États-Unis : « Un Américain sur quatre est concerné par une problématique psychiatrique dans l’année écoulée et, au cours de leur vie, plus de la moitié des adultes éprouvent une maladie mentale. »

Selon des données collectées par l’OMS [1], cette association observée entre les inégalités sociales et la fréquence des maladies mentales concerne les pays riches, sauf l’Italie qui se distingue par « un niveau de troubles psychiatriques plus faible que celui attendu en fonction de ses inégalités de revenus. » Doit-on y voir une conséquence de sa fameuse loi 180 [2] , un hasard heureux, ou l’effet d’une exception culturelle (ou autre) ?

[1] http://www.hcp.med.harvard.edu/wmh/
[2] http://italie.alliance-psychiatrie.com/
Dr Alain Cohen

Pickett KE et Wilkinson RG : Inequality: an underacknowledged source
of mental illness and distress. Br J Psychiatry 2010; 197: 426-428.

Publié le 01/02/2011

Les  Livres de Psychanalyse

Mort et travail de pensée. Points de vue théoriques et expériences cliniques
François Pommier et Régine Scelles


Février 2011 – Erès – Coll. La Carnet psy

Tout deuil sollicite le sujet et ses liens aux autres et lui rappelle douloureusement son ontologique dépendance à l'autre.
La perte d'un être cher est transformée par la pensée afin que l'espace qu'a occupé l'absent soit modifié ; faute de pouvoir remplacer l'autre, on le recrée. La création, le travail de pensée que suscite la confrontation à la mort sont évoqués dans ce livre comme ce qui permet au sujet de ne pas mettre en jeu le travail impossible qui viserait à recréer « comme avant », comme si la perte n'avait pas eu lieu, mais permet de devenir « comme après » : reconstruire plutôt que reconstituer.
Les auteurs proposent à la réflexion des dispositifs d'aide qui peuvent être mis en place lors de la perte réelle d'un être cher mais également lorsque les deuils non faits, non terminés resurgissent sur une autre scène, dans une temporalité décalée.


Psychanalyse et Non-Psychanalyse
Psychanalyse théorique / Théorie de la psychanalyse
15 janvier 2011

Que peut la psychanalyse pour les pratiques sociales ?

On peut voir les sciences humaines se donner couramment des "airs" psychanalytiques dans la mesure où, bien souvent, elles utilisent la thèse d'un "inconscient structuré comme un langage" sans toujours reconnaître leur dette à l'égard de la doctrine analytique. Hypothèse : l'"analycité" serait la condition de possibilité des sciences humaines comme le langage est la condition de l'inconscient. Par-delà les prétentions objectivistes (plus ou moins légitimes, ce n'est pas notre problème) de la sociologie et des sciences sociales en général, par-delà l'écriture ambiguë de l'Histoire "entre science et fiction", il reste à établir la dette contractée par les "pratiques sociales" à l'endroit de la psychanalyse, d'autant qu'elles sont directement confrontées à la réalité éthique et politique du sujet. Ces pratiques d'aide sociale, d'éducation, de formation, etc., se fondent toutes sur une forme de transfert mais ne peuvent ni en produire la théorie, ni évidemment se contenter d'importer la technique inventée par Freud (l'association libre et son écoute flottante) dans le cadre de la pratique analytique. Comme la cure, elles font intervenir acte et structure (de langage) mais sans viser les mêmes finalités puisqu'elles ne s'adressent pas au "même" : l'une parle exclusivement au sujet en tant que tel, alors que les autres ont affaire à l'individu socialement aliéné, soit l'assujet.

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vendredi 11 février 2011

Comment traiter la mauvaise observance thérapeutique en psychiatrie ?

Accroître l’efficacité des traitements anti-psychotiques, diminuer de façon significative les rechutes, prolonger les rémissions, améliorer la socialisation, réduire sensiblement le fardeau des dépenses de santé, et les conséquences violentes de ces affections : agressivité, suicide… Si cette utopie médicale devenait réalité : « nous penserions qu’il s’agit d’une percée miraculeuse, digne d’un Prix Nobel, ou d’une nouvelle incroyable » écrit l’éditorialiste du British Journal of Psychiatry. Alors que l’on aurait « simplement » obtenu une meilleure adhésion du psychotique à son traitement.

L’auteur commente en effet une étude hollandaise récente [1], montrant l’impact décisif d’une meilleure observance, à la fois sur la réduction de la symptomatologie (appréciée autant par le malade lui-même que par un observateur) et sur le risque de réadmission ultérieure en milieu hospitalier. Cet « effet puissant » des médicaments psychotropes sur la prévention des rechutes critiques et des hospitalisations constitue d’ailleurs un bon argument pour convaincre les intéressés de poursuivre leur traitement, même lorsqu’ils ne perçoivent pas toujours un mieux-être appréciable au quotidien. Malgré une difficulté intrinsèque dans les essais thérapeutiques sur ce thème (à savoir que les sujets peu enclins à suivre leur traitement ne consentiront pas non plus à participer à ces études, de sorte qu’ils se détournent ainsi de travaux dont ils pourraient être les premiers bénéficiaires !), une telle recherche confirme la pertinence d’une approche psychothérapeutique visant à augmenter l’observance.

Ce type d’intervention (Treatment Adherence Therapy, TAT) représente pour l’auteur une « innovation » importante dans le suivi des patients psychotiques, mais sa portée concrète demeure limitée par le déni des troubles chez les patients et /ou la méconnaissance du bénéfice thérapeutique des médicaments prescrits. Il faut donc poursuivre la recherche du « meilleur format » de ces thérapies promouvant l’observance, guidé par ce que l’auteur appelle « la sagesse » (wisdom), autrement dit par le bon sens du clinicien.

[1] A.B.P Staring & coll. : « Treatment adherence therapy in people with psychotic disorders » : randomised controlled trial » Br J Psychiatry 2010 ; 197-12 : 448–455.
Dr Alain Cohen

David AS : Treatment adherence in psychoses. Br J Psychiatry 2010 ; 197 : 431-432.Publié le 10/02/2011 

Haut les flingues !

Décidément, certaines recherches ne peuvent provenir que du pays de l’Oncle Sam ! Sous prétexte de permettre la « défense de la Constitution » (Second amendement) [1], on sait en effet que les États-Unis ont une politique très laxiste en matière d’armes à feu. Et la conjonction explosive de ce cadre complaisant avec la psychopathologie conduit immanquablement à une prolifération des homicides et des suicides par armes à feu !

The American Journal of Psychiatry propose une étude apportant une information nouvelle : dans cette atmosphère de violence, liée à la possession banalisée d’un « flingue », le risque de suicide par arme à feu est aussi fonction de… l’altitude de l’état ! Au passage, notons que les données sur l’altitude des lieux émanent notamment de la célèbre NASA, une institution rarement évoquée dans les publications psychiatriques !

Une réserve doit être faite toutefois, à propos des données sur la possession des armes à feu, car la législation des États-Unis n’impose pas à leurs détenteurs une déclaration obligatoire (en 2008, la Cour Suprême a même invalidé une loi du District de Columbia imposant cette déclaration à Washington et a réaffirmé « le droit de chaque Américain à posséder une arme »). Par conséquent, la fiabilité des statistiques sur la possession des armes à feu n’est pas assurée, faute de fichier central, et il s’agit au mieux d’estimations réalistes. Néanmoins, on observe une « corrélation positive entre le taux de suicide (après ajustement pour l’âge) et l’altitude de la région » (county elevation).

Cette corrélation positive entre le niveau d’autolyse et l’altitude moyenne du site est retrouvée d’ailleurs pour les suicides par arme à feu comme pour les autres formes de suicide. Selon les auteurs, cette association est indépendante des autres facteurs de risque (comme le nombre d’armes à feu ou la densité de population) et semble traduire un effet délétère propre de l’altitude : celle-ci représenterait en elle-même un facteur de risque particulier, en relation probable avec « les effets du stress métabolique [2] associé à une légère hypoxie », source chronique d’une vulnérabilité neuronale et psychique.

[1] http://fr.wikipedia.org/wiki/Deuxi%C3%A8me_amendement_de_la_Constitution_des_%C3%89tats-Unis
[2] http://fr.wikipedia.org/wiki/Syndrome_m%C3%A9tabolique

Dr Alain Cohen


Namkug Kim et coll. : Altitude, gun ownership, rural areas, and suicide. Am J Psychiatry 2011 ; 168-01 : 49–54.
Publié le 03/02/2011


mercredi 9 février 2011

Théâtre et psychiatrie









Prix: €12.00


Comment, à partir de l’expérience ludique du jeu théâtral, devient-il possible d’entrer en relation avec des patients psychotiques ? La scène leur permettrait de faire l’épreuve de cette chose passée qui n’a pas encore trouvé de lieu psychique, leur donnant ainsi l’occasion d’une présence, objet concret d’élaboration. Le jeu théâtral aiguillonne la pratique clinique et aide ainsi les soignants à remettre en chantier l’idée même de relation thérapeutique.

Quand le patient devient « acteur »...
Dominique Friard
Le jeu théâtral
Patricia Attigui
Théâtre et langage du corps
Anne Brun
Winnicott et le jeu
Éric Jacquet
« Le spectacle éphémère », contre le tout thérapeutique
Catherine Azzola, Jocelyne Robert, Jean Maisondieu
« L’art est la forme la plus élevée et la plus subtile de la sensualité »
Madeleine Abassade
« Mâcher ses mots... »
Vanessa Roma, Jean-Luc Sudres, Arnaud Rykner, Françoise Galinon, Régis Bernadet
« Le théâtre humanise »
Malika Kèchkèche, Max Narèce
Jouer de l’humain
Fabrice Clément, Majida Ghomari
« Le théâtre... parfois, ça soigne... »
Marc Leroy

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Psychanalyse et création
La cure et l'œuvre
Michel LAPEYRE


« J’ai donné comme titre à mon séminaire : Psychanalyse et création, pour pouvoir prendre plutôt que donner des leçons auprès de l’art et du “poète”. C’est urgent, à mon avis, pour retrouver le sens de ce qu’est la psychanalyse. Il n’y a rien de pire que de faire de la psychanalyse un idéal de connaissance et de vie (de savoir et de jouissance) à quoi l’on sacrifie tout. Ça ne veut pas dire pourtant, au contraire, qu’il s’agit de relativiser la psychanalyse. Freud dit souvent que les acquis d’une cure peuvent se perdre (même chez et pour l’analyste). Ailleurs, il envisage que les conquêtes de la civilisation et de la culture, y compris, pourquoi pas, la psychanalyse elle-même, puissent être détruites. Alors, dit-il, nous recommencerons sur de nouvelles bases, nous reconstruirons à nouveaux frais. Vu la peine que lui a coûté la découverte de l’inconscient, vu les souffrances et les persécutions qu’il a dû subir et endurer pour la défendre, la promouvoir, la transmettre, cette remarque de Freud m’a fait réfléchir, et même pousser ma réflexion à l’extrême. »

La matière première de cet ouvrage a été fournie par les notes rédigées par Michel Lapeyre entre janvier et juin 1998 pour le séminaire de recherche qu’il dirigeait. Restituer la pensée toujours vivante de l’auteur, rendre hommage au chercheur aujourd’hui disparu : telles sont les ambitions de ce livre qui plongera le lecteur au cœur d’une réflexion passionnante sur les processus créatifs.

Michel Lapeyre (1946-2009), psychanalyste (APJL et EFPCL), a animé plusieurs séminaires de l’Association de Psychanalyse Jacques Lacan. Il a dirigé pendant une dizaine d’années l’équipe de recherches Cliniques au sein de l’Université de Toulouse-le Mirail. Il est l’auteur de nombreux articles et ouvrages dont Clinique freudienne, Au-delà du complexe d’oedipe, Le complexe d’oedipe et le complexe de castration (Anthropos) et, ultime opus en 2010, Papillonnage : lettres sur la psychanalyse(APJL).


Les grimaces de Messerschmidt
28.01.11
Le destin du sculpteur autrichien Franz-Xaver Messerschmidt (1736-1783) ressemble à celui du Greco. Après sa mort, en 1614, le peintre grec devenu espagnol s'efface des mémoires. Il ne ressuscite qu'à la fin du XIXe siècle, mais devient vite un peintre universel. Messerschmidt a été oublié un siècle et demi et n'est réapparu qu'il y a deux à trois décennies. Aujourd'hui, il est au Louvre, après Vienne et New York, et les trente œuvres exposées suscitent une forte rumeur de curiosité.

D'autres similitudes expliquent que leurs histoires soient si proches. Ils ont eu tous deux de leur vivant une réputation de bizarrerie ou de folie. Leur art n'a guère de points communs avec celui de leurs contemporains. Et surtout, ils se donnent le même but, fixer passions et sentiments à leur paroxysme, et cherchent dans la même direction, celle des déformations expressives. Greco exagère étirement et maigreur et fait de la figure le signe presque pur d'une vertu ou d'un vice.

Messerschmidt étudie la face humaine de très près dans les instants où ses muscles sont crispés par des mimiques, des grimaces, un cri, une moue. Ainsi obtient-il ce qu'il appelle des "têtes de caractère". On en compte 49, que son frère a cédées à un collectionneur en 1793. Ce dernier les montre cette année-là dans un hôpital viennois, puis les revend, toujours en un seul ensemble, hélas dispersé en 1889. Quelques-unes ne sont du reste toujours pas localisées. Ce que leur auteur a fait auparavant est assez bien connu. Né dans le Jura souabe, il étudie à l'Académie des beaux-arts de Vienne à partir de 1755, travaille pour la cour et réalise des portraits en bronze de l'impératrice Marie-Thérèse et de figures du monde intellectuel viennois, dont le médecin magnétiseur Franz-Anton Mesmer.

Professeur adjoint à l'Académie en 1769, il se voit refuser le titre de professeur en titre à l'unanimité de ses collègues en 1774, en raison de son caractère difficile. Ulcéré, il quitte Vienne après avoir liquidé ses biens, passe par Munich et s'établit en 1777 à Presbourg - Bratislava aujourd'hui -, où il meurt six ans plus tard.

Il semble qu'il commence ses têtes vers 1771 et continue à Presbourg jusqu'à sa mort, tout en exécutant des portraits pour vivre. D'après le témoignage de l'éditeur et homme de lettres berlinois Friedrich Nicolai, qui lui rend visite en 1781, il se plaignait d'hallucinations, se réclamait d'une chasteté absolue et présentait quelques signes psychopathologiques sur lesquels il est impossible de formuler un diagnostic faute d'éléments suffisants.

De l'ordre dans lequel les têtes ont été modelées, on ne sait rien. Les titres qu'elles portent aujourd'hui leur ont été donnés pour la présentation de 1793 : titres posthumes et sans valeur. On ne sait pas plus si Messerschmidt les regroupait en catégories. Tout ce qu'il est permis d'affirmer, c'est qu'elles sont en étain, en plomb, en alliage des deux métaux, ou, plus rarement, en albâtre, creusé avec une habileté prodigieuse.

Il n'y a donc qu'une solution, les examiner attentivement en tournant autour, comme la présentation le permet au Louvre. La plupart montrent un homme entre 50 ans et 60 ans, glabre, crâne rasé, nez épais fort, nuque et bouche larges, menton lourd. Sans doute ce type tient-il de l'autoportrait, puisque, selon Nicolai, Franz-Xaver Messerschmidt se pinçait et se piquait pour s'observer dans un miroir. Mais il existe quelques têtes chevelues et une coiffée d'une sorte de toque.

Dans chacune, les muscles faciaux sont contractés différemment, de sorte que la physionomie suggère un état psychique différent. Si l'hilarité ou l'ennui qui âaille se reconnaissent sans peine, d'autres attitudes sont équivoques ou indéfinissables. Mensonge ou raillerie ? Mépris ou méditation ? Fureur ou angoisse ? Si ces œuvres produisent une impression si forte, c'est parce qu'elles paraissent d'une simplicité épurée à l'extrême - pas de vêtements, pas de détails vains - et que cette épuration est bien loin de simplifier leur interprétation. Ainsi celui qui regarde se trouve-t-il renvoyé au souvenir de ses propres incertitudes devant les visages de ses semblables. Qu'y lire ? Quel caractère deviner à travers leurs traits ? Le plus souvent, on n'en sait rien.

Le traité de Johann Kaspar Lavater, L'Art de connaître les hommes par la physionomie, qui a fondé la science nommée physiognomonie, a paru entre 1775 et 1778, quand Messerschmidt se mettait au travail. Ce livre, très populaire, a inspiré tout le XIXe siècle, de Balzac jusqu'à l'invention de la photographie judiciaire. Des décennies plus tard, nous ne sommes pas beaucoup plus avancés en la matière, et les têtes de Franz-Xaver Messerschmidt continuent à poser leurs énigmes sans réponses.

"Franz-Xaver Messerschmidt (1736-1783)". Musée du Louvre
, Paris 1er. Louvre.fr. Du mercredi au lundi de 9 heures à 18 heures, mercredi et vendredi jusqu'à 22 heures. Entrée : 10 €. Jusqu'au 25 avril.
Philippe Dagen


L’USP dit NON ! au fichage social en psychiatrie

Dans un communiqué daté du 31 janvier 2011, l’Union Syndicale de la Psychiatrie dénonce l’usage illégal par l’Etat du Recueil d’informations médicalisées en psychiatrie (RIMP), et annonce qu’elle saisit la Commission nationale informatique et libertés (Cnil).
Dans l’espoir que cette saisine constitue un coup d’arrêt à l’avancée du fichage en psychiatrie...
6 février 2011

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Un tiers des personnels de la Sécu était en grève mardi

Un appel à la grève dans les organismes de sécurité sociale a été suivi mardi par quelque 33 % des personnels, pour appuyer notamment des revendications salariales. À Paris, entre 1 900 personnes (selon la Préfecture de police) et 5 000 personnes (selon les syndicats) ont manifesté depuis la place de la Nation jusqu'au siège de l'Ucanss (Union des caisses nationales de Sécurité sociale). Les syndicats ont déploré des violences des forces de l'ordre contre des manifestants, alors qu'une délégation était reçue par l'Ucanss. L'appel à la grève avait été lancé par une intersyndicale comprenant notamment les fédérations nationales CGT, FO, CFTC et CFE-CGC des caisses d'assurance maladie, de retraite, d'allocations familiales et de l'Acoss. Leurs revendications portent sur une revalorisation salariale, mais aussi sur l'arrêt des suppressions de postes. « Il y a eu plus de 9 000 suppressions depuis 2003 et environ 6 000 sont déjà prévues pour les prochaines années » a déploré Dominique Didier, de la fédération des organismes sociaux CGT. Les organismes de Sécurité sociale emploient environ 160 000 personnes. Une réunion paritaire sur les salaires a été fixée au 15 février. Les syndicats ont prévu d'appeler à une nouvelle journée de mobilisation à cette occasion.
660 médecins s'opposent aux chambres individuelles payantes à l'AP-HP

660 médecins ont signé une lettre ouverte à la direction de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) pour s'opposer à l'expérimentation de facturer aux patients les chambres individuelles, a annoncé le Mouvement de défense de l'hôpital public (MDHP). Les signataires, parmi lesquels des grands noms des hôpitaux publics parisiens et le député UMP Bernard Debré (lui-même urologue), dénoncent « cette séparation en chambres, 1ère classe, payantes et chambres, 2e classe, non payantes ». Ils estiment que « le fait de disposer d'une chambre à un lit lorsqu'on est malade paraît de nos jours indissociable de la qualité de vie exigible à l'hôpital ». Les médecins signataires soulignent que contrairement à cette décision, ils attendaient au contraire de la nouvelle directrice générale Mireille Faugère « la poursuite des suppressions des chambres à plusieurs lits, qui achèverait l'humanisation des hôpitaux commencée il y a 40 ans avec la suppression des salles communes ». Depuis le 1er février, les patients hospitalisés à Bichat, Beaujon et Bretonneau, au nord de Paris, à la Pitié-Salpetrière au sud et à Avicenne à Bobigny (Seine-Saint-Denis), doivent acquitter 45 euros par jour s'ils désirent une chambre individuelle. « L’expérimentation que l'AP-HP va engager (...) doit lui permettre d’évaluer concrètement l’impact de ce dispositif pour ses patients avant d’envisager sa généralisation », avait indiqué le 19 janvier la direction de l'AP-HP. « Ces dispositions ne s’appliquent évidemment pas aux patients nécessitant une hospitalisation en chambre individuelle pour raisons médicales », de même qu'aux bénéficiaires de la CMU (couverture médicale universelle) et de l'AME (aide médicale d'Etat), avait-elle alors précisé. Les patients peuvent se faire rembourser s'ils disposent d'une mutuelle. Dans les autres régions françaises, certains CHU facturent déjà aux patients les chambres individuelles.
AFP
07.02.11





Le premier "bébé-médicament" français est né
07.02.11








Le professeur René Frydman dans son bureau
de l'hôpital Béclère à Paris, en novembre 2010.
AFP/FRED DUFOUR


Le premier "bébé-médicament" en France, qui permettra de soigner l'un de ses aînés pour lequel il est un donneur compatible, a vu le jour à l'hôpital Antoine-Béclère à Clamart (Hauts-de-Seine), ont annoncé les professeurs René Frydman et Arnold Munnich.

Indemne d'une grave maladie dont souffrent ses aînés, la bêta-thalassémie, le petit garçon, né le 26 janvier, permettra de soigner l'un d'eux, pour lequel il est un donneur compatible. La bêta-thalassémie, dont il existe des variantes plus ou moins sévères, est une maladie due à un gène commandant la production d'un composant essentiel de l'hémoglobine qui transporte l'oxygène dans les globules rouges.

Le petit Umut-Talha (en turc "notre espoir"), qui pesait 3,650 kg à sa naissance, est "en très bonne santé", a indiqué le professeur Frydman. Les parents, d'origine turque et âgés d'une trentaine d'années, et leur enfant sont rentrés chez eux, dans le sud de la France.

UN "BÉBÉ DU DOUBLE ESPOIR" SÉLECTIONNÉ APRÈS FIV

Ce bébé-médicament, que les spécialistes appellent "bébé du double espoir", est né par fécondation in vitro après un double diagnostic génétique pré-implantatoire permettant le choix des embryons. Cette procédure de double diagnostic a permis de s'assurer d'une part que l'enfant était indemne de la grave maladie génétique dont souffrent les premiers enfants de la famille, mais aussi qu'il pouvait être donneur compatible avec l'un de ses aînés malades. Cette compatibilité tissulaire permet d'envisager ultérieurement une greffe de sang du cordon ombilical qui a été prélevé après sa naissance, afin de soigner un de ses aînés.

Des naissances de "bébé-docteurs" ont déjà eu lieu dans le monde, mais c'est la première fois en France. Les Etats-Unis ont commencé il y a une dizaine d'années, et quelques naissances ont été signalées plus récemment en Europe, en Belgique et en Espagne. La loi française de bioéthique de 2004 et ses décrets d'application, parus en décembre 2006, autorisent cette pratique après accord de l'Agence de la biomédecine, d'où "cette première naissance HLA compatible", fruit de la collaboration des équipes médicales et biologiques de l'hôpital Necker et de l'hôpital Antoine-Béclère.

En Espagne, le premier bébé-médicament, Javier, né en octobre 2008, a permis grâce au sang de son cordon ombilical de guérir son aîné Andrés, souffrant également d'une bêta-thalassémie majeure. Andrés n'a plus besoin des transfusions sanguines, auparavant nécessaires pour le maintenir en vie, précisaient ses médecins.

René Frydman, gynécologue, chef de service à l'Hôpital Antoine-Béclère à Clamart

"Il n'y a rien d'eugénique dans la naissance du bébé-médicament"
08.02.11

L'annonce de la naissance du premier "bébé-médicament", dans la nuit du lundi 7 février, a déclenché une importante vague de réactions. Le professeur René Frydman, chef du service de gynécologie-obstétrique de l'hôpital Antoine-Béclère et "père scientifique" de cet enfant, revient sur cette naissance particulière et les enjeux qu'elle soulève, le tout sur fond d'examen du projet de loi sur la bioéthique à l'Assemblée.

Comment a été conçu ce premier "bébé du double espoir" ?

Lorsque ce jeune couple est venu vers nous, il avait déjà deux enfants atteints de la bêta-thalassémie [une maladie due à un gène commandant la production d'un composant essentiel de l'hémoglobine, qui permet de transporter l'oxygène]. Les parents, qui n'ont pas de problème de fertilité, désiraient que leur troisième enfant soit épargné par cette grave maladie.

Nous avons donc procédé à une fécondation in vitro pour six embryons. Deux d'entre eux avaient des gènes sains, dont un était en plus compatible avec le sang de la cadette de la fratrie. Les parents ont souhaité que les deux embryons soient implantés, sans être certains que l'enfant à naître pourrait guérir leur fille [en pratiquant une greffe de cellules-souches présentes dans le sang du cordon ombilical qui a été prélevé].

Etait-il nécessaire de mettre au monde cet enfant pour guérir sa sœur ? Un simple don de cellules-souches n'était-il pas envisageable ?

Théoriquement, oui. Mais il faut savoir que toutes ces demandes ont d'abord été examinées par l'agence de biomédecine. Une recherche de sang compatible a été effectuée, et il était également nécessaire d'établir que l'enfant avait réellement besoin d'une transfusion, puisque certaines maladies génétiques peuvent être moins prononcées. Ces deux critères étant réunis, nous avons pu procéder à la fécondation.

Est-on sûr de pouvoir guérir la sœur grâce à cette méthode ?

Non, comme toutes les interventions, nous ne sommes sûrs de rien. Il y a 90 % de chances de réussite de la greffe, mais cela n'est pas garanti.

Ce matin, Mgr André Vingt-Trois et Christine Boutin ont critiqué cette démarche, évoquant "une instrumentalisation de l'être humain au service des autres" ou encore une philosophie "eugéniste". Que souhaiteriez-vous leur répondre ?

Je crois qu'il faudrait sortir des dogmes, et regarder la vie. Je ne vois pas dans cette histoire où se situe l'instrumentalisation. Je tiens à rappeler que le couple désirait un enfant, certes sain, mais sans garantie de compatibilité avec leur fille.

L'enfant qui vient de naître n'a été altéré ni dans son psychisme, ni dans son physique. Nous avons effectué un prélèvement sur le placenta. Jusqu'à preuve du contraire, le placenta n'est pas la personne !

Le diagnostic préimplantatoire a révélé que l'enfant était sain. Nous n'allions pas remettre à ce couple, qui a déjà deux enfants malades, un troisième embryon atteint par la bêta-thalassémie ! Nous ne sommes pas sadiques à ce point !

Nous acceptons simplement le principe selon lequel tout ce qui vient de la nature n'est pas bon. Notre rôle de médecins est d'éviter que le destin génétique s'abatte sans que le couple ait eu le choix.

Ce nouvel enfant, Umut-Talha – en turc "notre espoir"– a été mis au monde il y a près de deux semaines. Avez-vous attendu que le projet de loi sur la bioéthique soit débattu à l'Assemblée nationale pour annoncer sa naissance ?

Pas du tout. Nous avions besoin d'être certains de deux choses : que tout allait bien pour l'enfant, notamment du point de vue tissulaire, mais également que la quantité de sang prélevée sur le placenta était suffisante.

Quelle est votre opinion à propos de ce projet de loi ?

Je pense que si l'on désire obtenir des résultats, il faut travailler, innover, et faire de la recherche. Il nous a par exemple fallu trois ans de combat et de lobbying pour obtenir de pouvoir congeler des ovules. Auparavant, cela était assimilé à de la recherche sur les embryons. La France, qui grouille pourtant d'hommes et de femmes de talents, arrive dix ans après les autres concernant le "bébé du double espoir".

Je trouve que le blocage auquel on assiste aujourd'hui est encore plus pesant qu'il y a vingt ans. J'ai le sentiment qu'une chape de plomb s'abat sur la pensée. Ce n'est pas logique, d'autant que nous avons mis en place un certain nombre de garde-fous.

Chaque semaine depuis trente ans, j'entends parler de risques de dérives. Nous n'en avons pas connu, grâce à notre système d'encadrement, mais celui-ci est trop présent aujourd'hui. Nous pourrions l'alléger sans porter atteinte à nos principes. Il faut sortir de ce climat de suspicion. Personne n'est obligé de passer par un diagnostic préimplantatoire. Il n'y a rien d'eugénique dans cette histoire, car l'eugénisme est imposé à la population.

J'espère que la naissance d'Umut-Talha fera avancer les choses. Mais nous ne devons pas laisser un groupe religieux imposer son point de vue dans un pays qui se veut laïque, même si nous devons respecter les convictions de chacun.

Propos recueillis par Vincent Matalon



"Les Récidivistes.
Représentations et traitements de la récidive XIXe-XXIe siècle"

J.P. Allinne et M. Soula

Faut-il reprendre à son compte des catégories d’État sans en interroger la genèse et la construction, sans dépasser le langage impersonnel et neutralisant du droit, sans en analyser l’efficience et les effets ? Faut-il admettre que les « récidivistes », désignent historiquement un même groupe homogène et véhiculent les mêmes impensés, les mêmes peurs, les mêmes fantasmes depuis plus de deux siècles ? Ou faut-il poser comme point de départ à toute tentative de compréhension des objets " récidive" et "récidivistes " que ce sont des catégories juridiques historiquement situées, des construits politiques qui se sont imposés par la force du droit et qui ont perduré au prix de changements de sens masqués par l’apparente neutralité de la qualification juridique. Tentant d’ouvrir cette seconde voie, cet ouvrage se propose de redonner aux « récidivistes » une dimension historique, d’analyser la consolidation de cette catégorie au XIXème siècle et les raisons et les effets de sa permanence, dont on mesure aujourd’hui encore toute l’actualité. Fruit d’une rencontre de chercheurs issus de différentes disciplines (Histoire, Socio-histoire, Droit, Histoire du droit, Sociologie), ,Les récidivistes essaie d’éclairer la question en multipliant et confrontant les points de regard dans la perspective d’embrasser le plus largement un objet tout à la fois juridique, historique, politique et sociologique. C’est au prix (de la poursuite) d’une telle discussion interdisciplinaire que les enjeux liés à la récidive peuvent être mis à jour et par la suite analysés et éclairés.

Faut-il reprendre à son compte des catégories d’État sans en interroger la genèse et la construction, sans dépasser le langage impersonnel et neutralisant du droit, sans en analyser l’efficience et les effets ? Faut-il admettre que les « récidivistes », désignent historiquement un même groupe homogène et véhiculent les mêmes impensés, les mêmes peurs, les mêmes fantasmes depuis plus de deux siècles ? Ou faut-il poser comme point de départ à toute tentative de compréhension des objets " récidive" et "récidivistes " que ce sont des catégories juridiques historiquement situées, des construits politiques qui se sont imposés par la force du droit et qui ont perduré au prix de changements de sens masqués par l’apparente neutralité de la qualification juridique. Tentant d’ouvrir cette seconde voie, cet ouvrage se propose de redonner aux « récidivistes » une dimension historique, d’analyser la consolidation de cette catégorie au XIXème siècle et les raisons et les effets de sa permanence, dont on mesure aujourd’hui encore toute l’actualité. Fruit d’une rencontre de chercheurs issus de différentes disciplines (Histoire, Socio-histoire, Droit, Histoire du droit, Sociologie), ,Les récidivistes essaie d’éclairer la question en multipliant et confrontant les points de regard dans la perspective d’embrasser le plus largement un objet tout à la fois juridique, historique, politique et sociologique. C’est au prix (de la poursuite) d’une telle discussion interdisciplinaire que les enjeux liés à la récidive peuvent être mis à jour et par la suite analysés et éclairés.
La violence des femmes
Histoire d’un tabou social

de Chistophe Regina
Présentation de l’éditeur

La place des femmes dans nos sociétés fait plus que jamais débat. Christophe Régina se revendique du même féminisme qu'Élisabeth Badinter : toute prétention à l’égalité se doit d’être totale. C’est en ce sens qu’il a mené et rédigé son étude sur la violence des femmes. Derrière ce thème, il livre une véritable réflexion sur le genre.

L’auteur définit le concept de violence tel qu’il l’acceptera pour l’ensemble de ses analyses : la violence est une impatience dans le rapport avec autrui, un moment dialectique de difficulté sociale. S’appuyant sur de nombreux témoignages de femmes violentes ou de personnes ayant subi la violence d’une femme, ici retranscrits, il s’attache à qualifier la violence des femmes en termes de pratiques et en termes de perceptions. Durant des milliers d’années, la réalité de la violence des femmes a toujours été transformée, détournée. Ces mensonges restent prégnants aujourd’hui. Il revient notamment sur les hommes battus par des femmes. Ils seraient 130 000 chaque année en France. Pourtant aucun centre d’accueil n’existe pour eux dans notre pays, aucune campagne d’information n’est diffusée. Parallèlement, l’auteur questionne les campagnes sur les violences faites aux femmes. Par exemple, Amnesty International n’envisage à aucun moment les violences exercées par des femmes et contribuerait à la mondialisation de la femme victime.

Concernant l’infanticide maternel, l’opinion publique et les médias se prennent de passions. Si le meurtrier est le père, la compassion disparaît. L’existence même de ces crimes pose la question du lien qui unit les parents à leurs enfants et remet en cause le concept selon lequel une femme est une mère. L’auteur, tel Simone de Beauvoir, rappelle que la maternité n’est ni un devoir ni une obligation mais une possibilité. Christophe Régina montre ici la persistance des stéréotypes de genre. Par exemple, il est admis que les crimes de femmes seraient surtout liés à des affaires amoureuses et qu’ils ne seraient pas motivés par l’argent. Or 74 % des meurtres commis par des femmes sont liés à l’argent. De même, l’auteur revient sur la cruauté dont les femmes seraient incapables. Que dire d’Irma Gresse, SS à Ravensbrück puis à Auschwitz condamnée à mort pour crimes de guerre, assassinats sommaires, fusillades massives, humiliations sexuelles ?

L’auteur, Christophe Regina, prépare une thèse sur Les expressions de la conflictualité féminine à Marseille au siècle des Lumières

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