Nos gènes lisent-ils le DSM ?
C’est pratiquement devenu un lieu commun de dire que l’autisme « relève des troubles psychiatriques ayant la plus forte connotation d’hérédité » rappelle l’éditorialiste de The American Journal of Psychiatry. Pourtant, les recherches permettant de corroborer cette thèse courante restent confinées à « une poignée » d’études sur des jumeaux et à des échantillons de population généralement réduits. De surcroît, alors que plusieurs études ont déjà éclairé l’aspect génétique dans certaines affections psychiatriques chez l’adulte (troubles anxieux, dépressions, addictions et, plus récemment, troubles de la personnalité), il existe moins de travaux comparables sur la composante génétique en pédopsychiatrie.
Autre constat : nos modèles (patterns) étayant la susceptibilité génétique (inhérente à certains troubles psychiatriques) ne s’identifient pas aux catégories du DSM actuelles. L’auteur résume ce fait en des termes pittoresques : « Nos gènes ne semblent ni avoir lu le DSM-IV, ni respecté particulièrement les catégories diagnostiques que ce manuel a établies ! » Cette présentation sarcastique souligne les limitations de nos schémas physiopathologiques et nosographiques : malgré leur pertinence éventuelle, ceux-ci ne restent que des approches parcellaires pour cerner la complexité des situations réelles. Dans l’exemple des « troubles du spectre autistique » (TSA, selon l’expression consacrée en anglais, pour autism spectrum disorders), la problématique révèle une « forte connotation héréditaire » (highly heritable), mais partage cette susceptibilité génétique avec plusieurs autres affections pédopsychiatriques : TDAH[1], tics, troubles de l’apprentissage, etc. Par exemple, presque 75 % des facteurs de risque génétique relatifs aux TSA sont partagés avec le TDAH. Et dans les fratries officiellement « non touchées » des sujets avec autisme, environ 9 % de leurs proches présentent toutefois des antécédents de retard de langage ou de traits autistiques.
Si nos gènes ne se conforment pas à notre nosographie, celle-ci devra donc, tôt ou tard, se conformer aux réalités génétiques.
[1] Troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité
Dr Alain Cohen
Kendler KS : Advances in our understanding of genetic risk factors for autism spectrum disorders. Am J Psychiatry 2010 ; 167-11 :1291–1293.
Publié le 28/01/2011
C’est pratiquement devenu un lieu commun de dire que l’autisme « relève des troubles psychiatriques ayant la plus forte connotation d’hérédité » rappelle l’éditorialiste de The American Journal of Psychiatry. Pourtant, les recherches permettant de corroborer cette thèse courante restent confinées à « une poignée » d’études sur des jumeaux et à des échantillons de population généralement réduits. De surcroît, alors que plusieurs études ont déjà éclairé l’aspect génétique dans certaines affections psychiatriques chez l’adulte (troubles anxieux, dépressions, addictions et, plus récemment, troubles de la personnalité), il existe moins de travaux comparables sur la composante génétique en pédopsychiatrie.
Autre constat : nos modèles (patterns) étayant la susceptibilité génétique (inhérente à certains troubles psychiatriques) ne s’identifient pas aux catégories du DSM actuelles. L’auteur résume ce fait en des termes pittoresques : « Nos gènes ne semblent ni avoir lu le DSM-IV, ni respecté particulièrement les catégories diagnostiques que ce manuel a établies ! » Cette présentation sarcastique souligne les limitations de nos schémas physiopathologiques et nosographiques : malgré leur pertinence éventuelle, ceux-ci ne restent que des approches parcellaires pour cerner la complexité des situations réelles. Dans l’exemple des « troubles du spectre autistique » (TSA, selon l’expression consacrée en anglais, pour autism spectrum disorders), la problématique révèle une « forte connotation héréditaire » (highly heritable), mais partage cette susceptibilité génétique avec plusieurs autres affections pédopsychiatriques : TDAH[1], tics, troubles de l’apprentissage, etc. Par exemple, presque 75 % des facteurs de risque génétique relatifs aux TSA sont partagés avec le TDAH. Et dans les fratries officiellement « non touchées » des sujets avec autisme, environ 9 % de leurs proches présentent toutefois des antécédents de retard de langage ou de traits autistiques.
Si nos gènes ne se conforment pas à notre nosographie, celle-ci devra donc, tôt ou tard, se conformer aux réalités génétiques.
[1] Troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité
Dr Alain Cohen
Kendler KS : Advances in our understanding of genetic risk factors for autism spectrum disorders. Am J Psychiatry 2010 ; 167-11 :1291–1293.
Publié le 28/01/2011
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