Prévention des suicides : le coup de gueule du Pr Lançon
05 février 2011
Un psychiatre de Marseille dénonce l'absence de politiques publiques
En matière de prévention des suicides "il n'y a pas de politique publique digne de ce nom en France". C'est le coup de gueule poussé, hier, par le professeur Lançon. Le chef du service psychiatrie de l'hôpital Sainte-Marguerite de Marseille n'a d'ailleurs pas été franchement contredit par le docteur Pierre Verger, directeur adjoint de l'Office régional de la Santé, qui présentait hier la 15e journée nationale de prévention du suicide, qui se déroule aujourd'hui.
Le taux de suicide était d'environ 17 pour 100000 habitants en Paca et 20 pour 100000 dans toute la France entre 1979 et 1981 et il était, tant pour notre région que pour l'ensemble de l'Hexagone, d'environ 16 pour 100000 lors de la période 2006-2008 (derniers chiffres disponibles), avec une différence du simple au double entre les hommes et les femmes. Le suicide des jeunes, qui horrifie tant les adultes parce qu'ils ne le comprennent pas, est en nette régression (de 16 à 10 pour 100000 entre 1991 et 2008), alors qu'il diminue peu pour les plus de 65 ans mais est plus important en nombre (de 33 à 28 pour 100000, selon la même période).
" En France nous avons réussi à diviser par deux le nombre d'accidents de voiture. Mais le taux de suicide diminue lentement, alors que dans d'autres pays européens qui ont mis sur pied des politiques volontaristes, il a diminué de 50%", a affirmé le professeur Lançon. Signes avant-coureurs Quelles politiques? "90% des gens qui se sont suicidés avaient vu un médecin dans le mois précédent leur passage à l'acte", note-t-il.
Sans vouloir alourdir la barque déjà bien chargée des généralistes, il estime nécessaire qu'ils soient formés à détecter les signes avant-coureurs de la dépression. Le stress au travail, l'absence de considération de ses responsables hiérarchiques, le harcèlement, comme stratégie de management ou simplement exercé par un pervers, sont autant de facteurs dépressifs qui peuvent conduire au suicide.
Il réclame aussi une meilleure information du grand public: "Une personne qui a des idées suicidaires ne se confiera jamais à une personne de sa famille. Il aura peur de lui faire de la peine. Il pourrait se confier à un collègue, si celui-ci lui disait : "Qu'est-ce que tu as? Je te trouve bizarre en ce moment". Mais en France, cette question est souvent taboue". Pour l'heure la politique publique de prévention des suicides consiste à distribuer dix mille brochures tous les deux ans aux professionnels de santé. Pas assez pour informer les médecins et dire aux simples citoyens que s'intéresser aux collègues, amis, voisins qui semblent aller mal, c'est peut-être les inciter à consulter afin de ne pas passer à l'acte.
Thierry NOIR (tnoir@laprovence-presse.fr)
05 février 2011
Un psychiatre de Marseille dénonce l'absence de politiques publiques
En matière de prévention des suicides "il n'y a pas de politique publique digne de ce nom en France". C'est le coup de gueule poussé, hier, par le professeur Lançon. Le chef du service psychiatrie de l'hôpital Sainte-Marguerite de Marseille n'a d'ailleurs pas été franchement contredit par le docteur Pierre Verger, directeur adjoint de l'Office régional de la Santé, qui présentait hier la 15e journée nationale de prévention du suicide, qui se déroule aujourd'hui.
Le taux de suicide était d'environ 17 pour 100000 habitants en Paca et 20 pour 100000 dans toute la France entre 1979 et 1981 et il était, tant pour notre région que pour l'ensemble de l'Hexagone, d'environ 16 pour 100000 lors de la période 2006-2008 (derniers chiffres disponibles), avec une différence du simple au double entre les hommes et les femmes. Le suicide des jeunes, qui horrifie tant les adultes parce qu'ils ne le comprennent pas, est en nette régression (de 16 à 10 pour 100000 entre 1991 et 2008), alors qu'il diminue peu pour les plus de 65 ans mais est plus important en nombre (de 33 à 28 pour 100000, selon la même période).
" En France nous avons réussi à diviser par deux le nombre d'accidents de voiture. Mais le taux de suicide diminue lentement, alors que dans d'autres pays européens qui ont mis sur pied des politiques volontaristes, il a diminué de 50%", a affirmé le professeur Lançon. Signes avant-coureurs Quelles politiques? "90% des gens qui se sont suicidés avaient vu un médecin dans le mois précédent leur passage à l'acte", note-t-il.
Sans vouloir alourdir la barque déjà bien chargée des généralistes, il estime nécessaire qu'ils soient formés à détecter les signes avant-coureurs de la dépression. Le stress au travail, l'absence de considération de ses responsables hiérarchiques, le harcèlement, comme stratégie de management ou simplement exercé par un pervers, sont autant de facteurs dépressifs qui peuvent conduire au suicide.
Il réclame aussi une meilleure information du grand public: "Une personne qui a des idées suicidaires ne se confiera jamais à une personne de sa famille. Il aura peur de lui faire de la peine. Il pourrait se confier à un collègue, si celui-ci lui disait : "Qu'est-ce que tu as? Je te trouve bizarre en ce moment". Mais en France, cette question est souvent taboue". Pour l'heure la politique publique de prévention des suicides consiste à distribuer dix mille brochures tous les deux ans aux professionnels de santé. Pas assez pour informer les médecins et dire aux simples citoyens que s'intéresser aux collègues, amis, voisins qui semblent aller mal, c'est peut-être les inciter à consulter afin de ne pas passer à l'acte.
Thierry NOIR (tnoir@laprovence-presse.fr)
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