Le PH "moderne" : un antifuite triple épaisseur ?
04 Février 2011
Si vous me permettez la caricature un tant soit peu carabine, je vous proposerais de représenter le praticien hospitalier "moderne" d'un pôle de psychiatrie publique, travaillant en intrahospitalier, non pas avec - cela nous aurait fait rire un peu -, mais comme un anti-fuite triple épaisseur. Il faudrait lui adjoindre au dessus de lui, la menace qui planerait de voir son salaire indexé aux chiffres de l'évaluation de son activité professionnelle. Nous retiendrions les trois types de "chiffre", qu'on lui opposerait désormais le plus fréquemment (vu leur facilité apparente de calcul, mais qui ne sont pas sans portée idéologique) : la durée moyenne de séjour, le nombre des suicides, et celui des fugues.
Autrement dit, le patient "moderne" de notre PH "moderne" ne devrait plus avoir aucune possibilité d'échapper à la guérison, à la maîtrise, à l'emprise de son soignant. Il ne devrait plus avoir aucune possibilité de fuite, que ce soit dans le délire, dans la fugue, ou dans la mort. La durée moyenne de séjour imposerait de "refroidir" le délire en moins de 17 jours. Refroidir est un mot qui fait froid dans le dos. En médecine, en référence au symptôme, il contient la notion importante de l'urgence d'attendre. Passé en psychiatrie, où le symptôme (le délire) est mal démêlable du sujet, on ne sait plus très bien qui ou quoi devrait, sans attendre cette fois, se retrouver "refroidi".
Nous n'oublierions pas en conclusion, qu'Henri Laborit, le grand-père des neuroleptiques (les antifuites chimiques par excellence) par ses travaux sur l'hibernothérapie au début des années cinquante, a écrit à la fin des années soixante et dix : "Éloge de la fuite".
Luc Diaz Psychiatre Montpellier
04 Février 2011
Si vous me permettez la caricature un tant soit peu carabine, je vous proposerais de représenter le praticien hospitalier "moderne" d'un pôle de psychiatrie publique, travaillant en intrahospitalier, non pas avec - cela nous aurait fait rire un peu -, mais comme un anti-fuite triple épaisseur. Il faudrait lui adjoindre au dessus de lui, la menace qui planerait de voir son salaire indexé aux chiffres de l'évaluation de son activité professionnelle. Nous retiendrions les trois types de "chiffre", qu'on lui opposerait désormais le plus fréquemment (vu leur facilité apparente de calcul, mais qui ne sont pas sans portée idéologique) : la durée moyenne de séjour, le nombre des suicides, et celui des fugues.
Autrement dit, le patient "moderne" de notre PH "moderne" ne devrait plus avoir aucune possibilité d'échapper à la guérison, à la maîtrise, à l'emprise de son soignant. Il ne devrait plus avoir aucune possibilité de fuite, que ce soit dans le délire, dans la fugue, ou dans la mort. La durée moyenne de séjour imposerait de "refroidir" le délire en moins de 17 jours. Refroidir est un mot qui fait froid dans le dos. En médecine, en référence au symptôme, il contient la notion importante de l'urgence d'attendre. Passé en psychiatrie, où le symptôme (le délire) est mal démêlable du sujet, on ne sait plus très bien qui ou quoi devrait, sans attendre cette fois, se retrouver "refroidi".
Nous n'oublierions pas en conclusion, qu'Henri Laborit, le grand-père des neuroleptiques (les antifuites chimiques par excellence) par ses travaux sur l'hibernothérapie au début des années cinquante, a écrit à la fin des années soixante et dix : "Éloge de la fuite".
Luc Diaz Psychiatre Montpellier
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