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lundi 13 avril 2020

Coronavirus : aux Etats-Unis, tousser peut devenir « une menace terroriste »

Les autorités judiciaires estiment que le virus peut être considéré comme un « agent biologique » potentiellement utilisé comme une « arme ».
Par  Publié le 13 avril 2020
Des clients respectent les mesures de distance sociale pour acheter des glaces, le 29 mars à Monterey (Californie).
Des clients respectent les mesures de distance sociale pour acheter des glaces, le 29 mars à Monterey (Californie). SHANNON STAPLETON / REUTERS
LETTRE DE WASHINGTON

Lécher des produits de toilette dans un supermarché du Missouri à la mi-mars, tout en s’esclaffant « qui a peur du coronavirus ? », n’était sans doute pas la plus brillante des idées. En publiant la vidéo de ses exploits sur Facebook, un jeune homme de 26 ans a commis au moins trois erreurs de jugement : il a sous estimé la dangerosité du Covid-19, négligé la peur engendrée par la pandémie dans le pays et sous évalué la réponse judiciaire à un comportement pour le moins déroutant ; l’acte d’un « crétin », a d’ailleurs jugé son avocat. Identifié grâce aux réseaux sociaux, le « crétin » a été inculpé de « menace terroriste au second degré », un crime en droit américain.

L’époque est ainsi faite que cette qualification s’applique désormais aux personnes, qui, intentionnellement, toussent et crachent sur leurs concitoyens, les forces de police ou des produits de grande consommation.

Arme biologique

Dans cet étrange contexte, le ministère de la justice américain invite en effet depuis quelques semaines les forces de l’ordre à appliquer aux infractions liées à la propagation volontaire du Covid-19 la législation habituellement réservée aux actes de terrorisme. Les autorités judiciaires estiment que le virus peut être considéré comme un « agent biologique » potentiellement utilisé comme une « arme ».
Il fallait y penser, mais visiblement, le jeune homme du Missouri n’est pas un cas isolé. A travers le pays, plusieurs autres personnes, prétendant être infectées, ont été surprises à expectorer sur des commerçants ou des biens, et également inculpées pour « menaces terroristes ». Certains Etats se montrent moins sévères, apparemment soucieux de ne pas criminaliser les dérives psychologiques de quelques individus, alors qu’en ces temps de crise sanitaire, la justice s’applique à limiter la population carcérale.
Dans le Massachusetts, un homme de 65 ans, qui avait consciencieusement craché sur les étals de fruits et légumes d’un supermarché avant d’être maîtrisé par un groupe de clients, a seulement été poursuivi pour « coups et blessures volontaires ». Le magasin a détruit l’ensemble des produits, désinfecté tous les rayons et banni à vie le sexagénaire.

Policiers en première ligne

Un incident plus rare, mais symbolique des tensions croissantes entre la population et les forces de l’ordre appelées à faire respecter confinement et distanciation sociale, s’est produit à Baltimore (Maryland), où un policier blanc a été surpris en train de tousser ostensiblement en direction d’un groupe d’habitants noirs, après qu’une femme l’eut pris à partie.
Mais d’une manière générale, les policiers sont plutôt en première ligne face aux « attaques au coronavirus », notamment lors des interpellations ou durant leurs interventions pour fermer des commerces non essentiels toujours ouverts au public. Dans le New Jersey, un policier victime d’un tel crachat est tombé malade, a affirmé le procureur. Des contrevenants mettent aussi en avant leur supposée contamination au virus pour éviter une garde à vue. Une mauvaise idée, tant la large proportion de policiers réellement infectés dans certaines agglomérations du fait de leurs contacts permanents avec la population rend les forces de l’ordre particulièrement intransigeantes face à ce type de comportements. A New York, une douzaine d’officiers de police sont déjà morts du Covid-19 et 20 % des effectifs sont actuellement en congé maladie, un chiffre inédit.

« Quarantine shaming »

Comme si le climat anxiogène ne suffisait pas, la psychose ambiante amène certains citoyens à vouloir faire respecter, par la force s’il le faut, les règles de distanciation sociale et les interdictions de rassemblement. De manière parfois agressive, le « quarantine shaming », ou le fait d’interpeller des personnes en infraction avec les règles désormais en vigueur dans 45 Etats américains sur 50, fait son chemin.
Une vidéo d’un homme s’en prenant violemment à un groupe de jeunes filles discutant au bord d’un lac du Kentucky lui a valu une interpellation et une inculpation pour harcèlement et tentative de strangulation. Le quinquagénaire, un médecin, a aussi été suspendu de ses fonctions dans les organismes de santé pour lesquels il travaillait. A New York, une octogénaire est morte, après avoir été jetée à terre alors qu’elle faisait la queue dans un hôpital de Brooklyn. Jugeant que la vieille dame se tenait trop près d’elle, une femme, apparemment déséquilibrée, l’a violemment poussée.
Samedi 11 avril, en Californie, une soirée qui rassemblait de nombreuses personnes, en dépit des interdictions, a été la cible de coups de feu ; six personnes ont été blessées. A l’annonce des mesures de lutte contre le virus, des Américains expliquaient leur ruée sur les magasins d’armes par la peur de devoir se défendre contre des attaques liées au rationnement de produits de première nécessité, leur désir de protéger leur famille ou le besoin de se substituer aux forces de l’ordre, au cas où ces dernières seraient décimées par la maladie.

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