SUISSE
03. JUILLET 2019
La femme médecin accusée de meurtre a administré du pentobarbital sodique à une sexagénaire dans le cadre d'une aide au suicide (photo symbolique).
KEYSTONE/ALESSANDRO DELLA BELLA
(sda-ats)
Une médecin âgée de 61 ans accusée de meurtre comparaît depuis mercredi devant la justice de Bâle-Campagne. Elle aurait aidé une sexagénaire dépressive et incapable de discernement à se suicider. La défense met en doute la fiabilité de l'expertise psychiatrique.
Pour le Ministère public, l'accompagnement vers la mort de la femme de 67 ans en juin 2016 s'est déroulé de façon irrégulière. La sexagénaire vivait dans un home médicalisé à Bâle-Campagne. Elle s'est tournée vers l'organisation d'aide au suicide Eternal Spirit après le refus de l'association alémanique Exit de l'aider à se suicider.
Les 35 ans d'expérience de la médecin lui permettent certes d'évaluer la capacité de discernement. Elle ne dispose néanmoins pas de la formation nécessaire en psychiatrie, a relevé le président du tribunal.
Pour mieux cerner l'accusée, ce dernier a également évoqué les 400 accompagnements vers la mort qu'elle a réalisés en 13 ans d'activités chez Eternal Spirit, ainsi que les 600 expertises favorables au suicide assisté effectuées auparavant en tant que consultante pour Dignitas. "Je n'ai rien fait d'illégal", a pour sa part affirmé la médecin devant les juges.
Syndrome de Briquet
Selon l'acte d'accusation, la femme souffrait de graves troubles dépressifs et du trouble de somatisation appelé aussi syndrome de Briquet. Ces maladies ne sont pas mortelles et la sexagénaire n'était pas capable de discernement, estime l'autorité d'enquête.
Le Ministère public se base sur une expertise psychiatrique du directeur de la clinique forensique des établissements psychiatriques universitaires de Bâle. Le professeur s'appuie sur des entretiens avec la patiente et sur la documentation liée aux séjours et traitements, souvent interrompus, de la patiente en clinique.
Face à la Cour pénale de Bâle-Campagne, ce dernier a déclaré mercredi que la patiente s'est, sans doute, rendu compte elle-même de sa maladie psychique, mais qu'elle n'avait pas voulu l'admettre. Il en aurait résulté une volonté "biaisée" de mourir.
Des témoins relativisent la dépression
Cité en témoin, un membre du personnel soignant du home a décrit, au contraire, la sexagénaire comme une personne "très autonome" et "pas dépressive".
Autre témoin, un psychiatre mandaté par le home pour des troubles de l'alimentation et des angoisses de la patiente n'a, lui, diagnostiqué qu'une dépression de gravité moyenne en 2015, alors que l'expertise évoque une grave dépression. Il avait également constaté le trouble de somatisation, la femme ayant alors des difficultés à marcher et à parler.
Rebondissant sur ces témoignages, l'avocat de l'accusée s'en est pris à l'expertise psychiatrique. Il a évoqué les notes illisibles d'une médecin de famille, sur lesquelles l'expertise se base partiellement, ainsi que des documents manquants.
Pour l'auteur de l'expertise, le dossier de la patiente était suffisamment étoffé pour aboutir à de telles conclusions. Les rapports de sortie de clinique mentionnaient à chaque fois le trouble de somatisation et les entretiens personnels étaient suffisamment évocateurs pour conclure à une lourde dépression.
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