Par Catherine Pacary Publié le 21 avril 2021
FRANCE 2 - MERCREDI 21 AVRIL À 22 H 50 - DOCUMENTAIRE
L’administration appelle ces enfants les « cas complexes », voire les « incasables », après qu’ils ont été rejetés par leur famille et par les structures d’accueil classiques de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). En cause : des insultes ou des violences à l’encontre d’autres jeunes ou d’encadrants, ou encore des comportements « inappropriés », comme manger à même le sol, refuser de parler, ne s’exprimer que par grognements…
En dernier recours, ils sont alors placés par le juge des affaires familiales en microstructure. C’est le cas de Kahina, Alex, Gabriel, Guillaume et Jérémie, âgés de 10 à 18 ans, et logés dans un grand pavillon de la banlieue parisienne, à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). Là, chacun a sa chambre et six accompagnateurs se relaient pour les encadrer, les écouter et les aider, petit à petit, à reprendre confiance en eux et à s’imaginer un futur.
Travail « sur le fil »
La caméra les a suivis pendant un an pour ce film, qui fait le pari – réussi – d’utiliser le sous-titrage plutôt qu’une voix off, ce qui accroît l’intimité ; et qui valorise la musique contemporaine de Romain Hainaut (connu sous le nom de Blasé). Sans angélisme,Incas(s)ables révèle ainsi le travail « sur le fil » des éducatrices et éducateurs, parfois guère plus vieux que les ados dont ils s’occupent, confrontés aux colères, aux crises et aux chagrins ; le travail également de leur hiérarchie, des psychologues et des professionnels aguerris, qui connaissent parfaitement le passé familial perturbé et traumatisant des jeunes pensionnaires.
L’aîné, Guillaume, 18 ans et passionné de trains, se défoule en explosant un ballon et est soigné pour des troubles du comportement. Alex, lui, ne maîtrise pas toujours un corps trop fort pour lui. Kahina, la seule fille, est placée depuis sa naissance, et vit depuis trois ans au pavillon. Gabriel, 13 ans, redoute de quitter son externat médico-pédagogique pour le collège. Jérémie, 10 ans, est déscolarisé pour comportement violent. Sans oublier Juju, le personnage de Post-it animés, dont les enfants peaufinent collectivement l’existence lors d’ateliers pédagogiques.
Autre rendez-vous imposé, l’audition annuelle chez la juge, au tribunal de grande instance de Paris, qui décide en fin d’année de prolonger ou non le placement. Certains rêvent de quitter le pavillon quand d’autres veulent y rester. Alors parfois, c’est l’incident… Moins lourd de conséquence, le bilan mensuel se termine, si tout va bien, par une distribution d’argent de poche. Carrément géniales enfin, les premières vacances ensemble, au bord de la mer.
Au fil du quotidien et des figures imposées, des liens se créent – détaillés à un moment avec une maturité étonnante par Kahina. Ni incasables ni incassables, elle et ses copains apparaissent alors avant tout en manque d’affection et d’attention. A Paris, 5 000 enfants sont placés par l’ASE, dont une centaine en « pavillons ».
Incas(s)ables, de Ketty Rios Palma (Fr., 2020, 65 min)
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