LUNDI 04 MAI 2020
"J'ai tout dit, là. Ca va"... Et l'enfant a raccroché. Avec le confinement, les psy bataillent et improvisent pour garder le lien avec leurs patients, contraints parfois d'aménager leurs pratiques.
"Très vite, on a pris le pli de contacter nos patients, mais ça nous oblige à une médecine beaucoup plus interventionniste et proactive", constate le Dr Alice Oppetit, pédopsychiatre de la Salpêtrière, à Paris.
En milieu fermé c'est également compliqué: "Les hôpitaux psychiatriques sont les grands oubliés", estime-t-elle en faisant valoir qu'il y est plus difficile qu'ailleurs de maintenir la fameuse " distanciation sociale".
"Cette notion est à l'opposé de notre démarche de soins", relève le Dr Fayçal Mouaffak, responsable des urgences psychiatriques dans l'un des pôles de Ville-Evrard en Seine-Saint-Denis (30.000 patients dont 4.000 hospitalisés).
L'établissement a très vite ouvert une " unité Covid" pour ses patients malades et pour isoler les nouveaux arrivants.
"C'est une situation inédite, on fait tous comme on peut, tout en essayant de réfléchir au cadre qu'on propose, au cas par cas", avoue Samuel Lannadère, psychologue-psychanalyste.
Au long cours
A l'hôpital de jour dans lequel il officie, les activités sont suspendues. Mais une permanence reste assurée car certains patients continuent de venir, spontanément. "Ce sont des patients au long cours, très malades, depuis très longtemps, souvent isolés ou en grand précarité familiale et psychique". Ils vivent en foyer ou en appartement thérapeutique, ou sont retournés en famille pour le confinement...
L'hôpital leur fournit des dérogations pour se déplacer mais parfois la peur d'être contrôlé est dissuasive. Pour ceux-là, le téléphone reste la ligne de vie. "Si on supprime les soins, on craint que des patients finissent par être internés. Il faut empêcher d'en arriver là alors que les services sont engorgés".
D'autant, relève le sociologue Didier Meillerand, délégué-général de l'association d'entraide Psychodon, que le confinement crée des situations familiales compliquées: "Le quotidien peut devenir extrêmement difficile quand on vit avec un enfant autiste ou un proche souffrant de schizophrénie... Des tensions se créent car les rituels sont brisés".
Environ 12 millions de Français souffrent de pathologies psychiatriques, rappelle-t-il, et la période génère des stress supplémentaires.
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