PAR
DAMIEN COULOMB -
PUBLIÉ LE 18/03/2020
Crédit photo : Phanie
L'orage cytokinique observé chez certains patients infectés par le coronavirus est une complication sous-estimée qui justifierait un dépistage de ces hyperinflammations chez les cas graves, selon une correspondance du « Lancet » publiée par des médecins britanniques du University College de Londres.
« Les efforts actuels sont principalement concentrés sur le développement de nouveaux traitements, des antiviraux et des vaccins, soulignent-ils. Des preuves s'accumulent, suggérant l'existence d'un sous-groupe de patients pouvant présenter les symptômes d'un syndrome d'orage cytokinique. Nous recommandons le diagnostic et la prise en charge de cette complication sur la base des traitements déjà sur le marché et dont l'efficacité a été prouvée », précisent les auteurs, qui voient là un levier pour réduire significativement la mortalité.
Lymphohistiocytose hémophagocytaire secondaire
Pour être plus précis, les Britanniques suspectent que les patients atteints de cette complication souffrent d'une lymphohistiocytose hémophagocytaire secondaire. Ce syndrome hyperinflammatoire se traduit par une défaillance multiviscérale, et est principalement associé à une infection virale et observé chez environ 4 % des cas de sepsis. Il se caractérise par de la fièvre persistante, une cytopénie, une hyperferritinémie et des complications pulmonaires dans la moitié des cas. En ce qui concerne le profil biologique, les patients voient leurs niveaux d'interleukine 2, d'interleukine 7 et de facteurs de croissance fortement augmenter.
Selon les données collectées sur 150 cas confirmés de Covid-19 à Wuhan, les facteurs prédictifs de mortalité des patients infectés par le SARS-Cov-2 comprennent des niveaux élevés de ferritine, (1 297,6 ng/ml chez les non-survivants contre 614,0 ng/ml chez les survivants) et d'interleukine 6. « Cela suggère que la mortalité peut être associée à une hyperinflammation d'origine virale », précisent les chercheurs.
« Il faut dépister l'hyperinflammation chez tous les patients souffrant d'une forme sévère de Covid-19, conseillent les auteurs, en utilisant des tests de laboratoire permettant de doser la ferritine, le décompte plaquettaire et le HScore ». Ce dernier est un score composite un peu complexe qui prend en compte la température, les anomalies d'organes, les taux de triglycérides, de fibrinogènes etc.
Un essai en cours en Chine
Bien que les corticoïdes sont déconseillés chez les patients infectés par le SARS-Cov-2, « l'immunosuppression présente de potentiels bénéfices importants », estiment les auteurs. Ils appuient leur réflexion sur les données d'une étude de phase 3, démontrant l'intérêt des bloqueurs d'interleukine 1 dans le sepsis, avec une augmentation de la survie des patients souffrant spécifiquement d'hyperinflammation. En février dernier, les chercheurs chinois de l'hôpital universitaire des sciences et des technologies de Chine et de l'hôpital provincial de Anhui ont entamé un essai multicentrique sur le tocilizumab, un inhibiteur d'interleukine 6, incluant 192 patients.
Les autorités chinoises ont par ailleurs autorisé l'utilisation du tocilizumab dans l'indication de la pneumonie induite par la maladie Covid-19. La piste des inhibiteurs des janus kinases (JAK) est également évoquée à la fois pour lutter contre l'inflammation et perturber l'entrée du SARS-Cov-2 dans les cellules humaines.
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