Publié le 31 Mai 2019
Sous-effectif permanent, patients mineurs et majeurs mélangés, personnel à bout de nerfs... Les syndicats de la psychiatrie euroise poussent un coup de gueule.
La psychiatrie est en crise : depuis plusieurs mois, les mouvements sociaux se multiplient, en Normandie comme partout en France. Au Nouvel Hôpital de Navarre, qui coordonne la psychiatrie dans tout le département de l’Eure, les syndicats poussent un cri d’alarme, et la direction de l’établissement approuve plusieurs de leurs constats.
« Le désarroi des équipes est général, […] beaucoup de collègues se retrouvent dans des situations de burn-out », affirment les syndicats FO et CGT, inquiets pour leurs équipes autant que pour les patients :
Les prises en charge se dégradent du fait du sous-effectif chronique et de l’épuisement dramatique des équipes soignantes.
Les syndicats dénoncent également les conditions d’accueil des patients mineurs qui, faute d’unité d’hospitalisation dédiée, se retrouvent au milieu de patients aux pathologies diverses : « L’hôpital accueille de plus en plus de mineurs qui sont mélangés avec les adultes au sein des services d’admission, déplorent les syndicats. Les mineurs sont exposés à l’hétéro-agressivité de patients non stabilisés. »
« On nous oblige à faire du bricolage »
Unanimement mis en cause, le faible montant de la dotation annuelle de financement (DAF) est régulièrement pointé du doigt par les professionnels de l’établissement : là où la moyenne française se situe autour de 140 € par an et par habitant, l’établissement eurois doit se contenter d’une DAF d’environ 55 millions d’euros, soit 90 € seulement par an et par habitant.
Avec des conséquences directes sur la prise en charge des patients : « On nous demande de faire du soin, mais on nous oblige à faire du bricolage », déplore Anne-Marie Chevalier, cadre de santé (CGT).
Entre 25 et 93 postes nécessaires
Et les syndicats ne sont pas les seuls à dénoncer cette situation : « L’établissement est historiquement sous-doté, et ce depuis 40 ans, confirme Patrick Waterlot, à la tête du NHN. Et cette sous-dotation ne permet pas de travailler comme on le souhaiterait. »
S’il tempère les chiffres des syndicats concernant une « explosion » des violences au sein de l’hôpital, considérant qu’il s’agit d’« éléments d’exagération », le directeur, en poste depuis septembre dernier, regrette lui aussi l’absence d’unité intégralement dédiée aux mineurs : « Moi aussi je ressens de l’indignation quand je vois un gamin de 12 ans dans un service avec des majeurs. C’est pour ça qu’on veut absolument cette unité. »
Car si le NHN est doté de bâtiments flambant neufs qui ne demandent qu’à être utilisés, ce qui manque, c’est le financement nécessaire à l’embauche de personnels. En l’occurrence, le directeur compte qu’il faudrait 25 équivalents temps-plein pour répondre aux besoins de remplacements de l’établissement, ainsi que 20 à 22 postes pour faire fonctionner la future unité d’hospitalisation des mineurs. Les syndicats ajoutent une cinquantaine de postes à ce calcul, postes qui ont été « mutualisés » ou « redéployés » sur le département au fil des ans, et manquent aujourd’hui à l’appel, selon eux.
« Ça ne peut pas continuer »
Une enveloppe de 700 000 € avait été débloquée par l’Agence régionale de santé (ARS) fin 2018, portant à 1,3 million d’euros l’aide d’urgence depuis 2017. Toujours ça de pris, sourit-on amèrement à la direction, qui est loin de se satisfaire de cette aide ponctuelle :
Si ç’avait été un crédit pérenne, ça aurait financé les trois-quarts de l’unité pour mineurs.
L’établissement a engagé des discussions avec l’ARS pour flécher les financements vers l’établissement eurois. « Navarre est clairement identifié comme un établissement très sous-doté dans la région. Ça ne peut pas continuer cinq ans de plus, ce n’est pas possible », tranche Patrick Waterlot.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire