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jeudi 1 décembre 2022

Journée mondiale contre le sida : une épidémie qui se nourrit toujours de lourdes inégalités




par Eric Favereau   publié le 1er décembre 2022

Alors que se tient ce 1er décembre la Journée mondiale contre le sida, un documentaire, «R-Evolution sida», sorti ce mercredi en salles, rappelle les terribles discriminations provoquées dans le monde par le virus.

Ce jeudi, 1er décembre 2022, quarante et un ans après les premiers cas reconnus de VIH sur les côtes Ouest et Est des Etats-Unis, se tient la journée mondiale contre le sida. En ces temps de Covid planétaire, le rendez-vous a le mérite de faire le point sur cette pandémie qui, on l’a oublié, a provoqué des dizaines de millions de morts, mais aussi une solidarité mondiale, certes insuffisante mais impressionnante. Et, comme tous les ans, selon le même rituel, l’ONU sida publie ses derniers chiffres, pointant quelques urgences.

Toujours pas sous contrôle

Ainsi, en 2021, ce sont plus de 38 millions de personnes qui sont porteuses du virus. L’an dernier, la planète a encore connu plus de 1,5 million de nouvelles contaminations, montrant bien que l’épidémie ne faiblit pas. Et, selon les estimations de l’ONU, 650 000 personnes sont mortes en 2021 d’une maladie liée au VIH. L’épidémie est donc là, toujours là. Si nous sommes loin des cinq millions de contaminations annuelles dans les années 90, reste que le sida n’est toujours pas sous contrôle. Et rien ne laisse croire que l’objectif de l’Organisation mondiale de la santé – bloquer l’épidémie d’ici à 2030 – sera atteint. Elle se développe même en Russie, mais aussi en Afrique subsaharienne. Et, surtout, l’ONU sida pointe des inégalités criantes. Ainsi, «alors que plus de trois quarts des adultes vivant avec le VIH sont sous traitement, plus de la moitié des enfants vivant avec le VIH n’en reçoivent aucun. En 2021, les enfants représentent 4 % du total des personnes vivant avec le VIH, mais 15 % de tous les décès liés au sida».

Autre inégalité qui s’accroît : aucune baisse significative des nouvelles infections chez les gays en Afrique n’est constatée. La cause ? «Ces populations clés ont un accès limité aux services de soins. A l’inverse, les pays qui ont supprimé ou évité la criminalisation de l’homosexualité ont connu, eux, de grands progrès.» Enfin, rappelle l’ONU sida, les inégalités entre les sexes face aux risques d’être contaminé restent majeures – et particulièrement prononcées en Afrique subsaharienne. «Les femmes représentent toujours près des deux tiers des nouvelles infections en 2021. L’ONU sida appelle à des actions, notamment en garantissant l’accès des filles à l’enseignement secondaire et à la lutte contre la violence fondée sur les sexes.»

«Stigmatisation»

De fait, l’histoire bégaie. Et celle du sida reste une histoire d’inégalités mondiales, ce que l’ONU sida affirme donc fortement cette année. Ce constat ressort encore plus cruellement avec le documentaire R-Evolution sida, sorti ce mercredi dans les salles. Voilà un long travail, magnifique, un impressionnant voyage d’hier et d’aujourd’hui entre l’Afrique du Sud, la Chine, la Russie, la Thaïlande, mais aussi les Etats-Unis. Frédéric Chaudier, le réalisateur, a mis plusieurs années pour le construire, retardé ensuite qu’il a été par l’épidémie du Covid. «Le problème du VIH-sida est une question de stigmatisation, de pauvreté, d’accès aux soins et de volonté politique, mais chaque pays a aussi ses spécificités», explique-t-il. En Afrique du Sud, la sexualisation précoce, la pauvreté, les viols, la prostitution, mais aussi une stigmatisation sociale des malades, ont créé un cocktail détonnant. En Chine, une politique aberrante de recueil de sang dans la province du Henan a provoqué une épidémie massive, longtemps cachée, et qui s’est surtout poursuivie alors que le risque était connu, avec pour conséquence des milliers de malades abandonnés, non traités et comme ailleurs discriminés. En Russie, plutôt que d’éradiquer le virus, les autorités ont nié l’épidémie, cherchant à éliminer les populations contaminées, toxicomanes comme gays, ou travailleuses du sexe. «Les malades du VIH-sida y sont considérés comme des rebuts par un pouvoir homophobe, traditionaliste et viriliste», lance un responsable de l’ONU. Et ainsi de suite, de frontières en frontières.

Ce documentaire rappelle ainsi combien les épidémies sont aussi un miroir des inégalités mondiales. Et celle du Covid ne déroge pas à ce modèle.

 

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