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samedi 3 décembre 2022

“Jeanne Dielman”, de Chantal Akerman, élu meilleur film de l’histoire : enfin une réalisatrice au sommet

Joseph Boinay  Publié le 02/12/22

Delphine Seyrig, parfaite dans « Jeanne Dielman », de Chantal Akerman,  âpre dissection du quotidien d’une ménagère.

Réalisé en 1975 par Chantal Akerman, “Jeanne Dielman” a pris la tête du classement décennal de “Sight and Sound”, établi par la revue du British Film Institute. Pour la première fois, c’est un film de femme qui été adoubé par un panel de 1600 critiques ciné.


C’est historique ! Le chef-d’œuvre de Chantal Akerman, Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles (1975), prend la tête du classement décennal de Sight and Sound des 100 meilleurs films de l’histoire du cinéma. Organisé depuis un demi-siècle par le prestigieux magazine du British Film Institute et résultat du vote de mille six cents critiques à travers le monde, c’est en effet la première fois qu’une réalisatrice s’y hisse à la plus haute marche. Après des décennies de domination masculine (Orson Welles ou Alfred Hitchcock pour les indémodables Citizen Kane et Vertigo ; sinon Vittorio De Sica pour Le Voleur de bicyclette ou Yasujirō Ozu pour Voyage à Tokyo), ce renversement dans la hiérarchie marque un profond changement de paradigme dans l’histoire du cinéma, comme un écho radical aux évolutions sociétales contemporaines.

Il aura fallu presque cinquante ans pour que la révolution de Jeanne Dielman…finisse par accoucher d’une consécration. Dans cette âpre dissection du quotidien d’une ménagère (Delphine Seyrig, parfaite) à la vie ordonnée maniaquement et prostituée à ses heures, Chantal Akerman, alors âgée de 25 ans (!), opposait la routine domestique à la routine du cinéma : « Un accident de voiture ou un baiser en gros plan sont plus élevés, dans la hiérarchie des images, qu’une femme qui fait la vaisselle », expliquait-elle alors à propos de son film. Sans doute à la faveur d’une meilleure diversité de genre dans la critique et d’un accueil plus favorable à la place des femmes dans la société, ce petit miracle a en tout cas fini par voir le jour.

Autre signe des temps nouveaux : Beau Travail (2000), de Claire Denis, monte à la septième place du classement. Une forme d’hommage à notre cinéma enfin, puisque le tiers des films sélectionnés est de production ou de coproduction française, très légèrement derrière celui des Américains. L’occasion, peut-être, de mettre un peu de baume au cœur à un secteur aujourd’hui fragilisé par une désaffection des spectateurs et des affaires de sexisme… d’un autre âge.


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