Le Monde avec AFP Publié le 4 mai 2021
Un rapport de l’autorité administrative met en cause les directions des établissements dans l’« augmentation de violations de la liberté d’aller et venir des résidents ainsi que de leur droit au maintien des liens familiaux ».
Il s’agit de rétablir leur « liberté ». La Défenseure des droits, Claire Hédon, consigne dans un rapport, mardi 4 mai, une soixantaine de recommandations alors qu’elle considère que le droit à une « vie privée et familiale » a été davantage entravé au cours de la crise sanitaire pour les résidants d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) que pour le reste de la population.
Ces six dernières années, 900 réclamations dénonçant les conditions et les modalités d’accompagnement médico-social des personnes âgées ont été adressées à cette autorité administrative indépendante, dont 80 % mettaient en cause un Ehpad.
Toutefois, les saisines et témoignages se sont accrus ces derniers mois du fait de la pandémie de Covid-19, dénonçant notamment « une augmentation, de la part des directions des établissements, de violations de la liberté d’aller et venir des résidants ainsi que de leur droit au maintien des liens familiaux », est-il précisé.
De nombreux exemples sont cités : réalisation de tests de dépistage sans consentement, maintien de restrictions de sorties pendant les périodes de déconfinement, interdiction des sorties à proximité, des visites de proches ou d’aidants familiaux pendant plusieurs semaines, impossibilité pour des familles de voir leur proche mort car immédiatement mis en bière, maintien des interdictions de sortie pour les résidants vaccinés…
« Un encadrement strict »
« L’examen de ces réclamations montre, de manière récurrente, des atteintes aux droits fondamentaux, au respect de la dignité et l’intégrité des personnes accueillies, insiste la Défenseure des droits, Claire Hédon. Le droit à la vie privée et familiale a donc été grandement entravé au cours de la crise sanitaire, et de façon bien plus importante pour les personnes résidant en Ehpad que pour le reste de la population. »
« La crise sanitaire a mis en évidence les difficultés, pour les pouvoirs publics, à concilier les enjeux de santé publique avec la nécessité d’une réponse appropriée aux besoins spécifiques des personnes âgées accueillies en Ehpad afin de préserver non seulement leur santé, mais aussi leurs droits et libertés », poursuit la Défenseure, regrettant une « difficile accessibilité et lisibilité » des normes en vigueur instaurées par le gouvernement.
« Les restrictions, qui peuvent être gravement attentatoires à la liberté, ne peuvent être laissées à la seule appréciation des directions d’Ehpad. Elles doivent faire l’objet d’un encadrement strict sur la base de l’égalité pour l’ensemble de la population », considère en outre l’institution.
Parmi les 64 recommandations du rapport figure la nomination systématique d’un « référent consentement », la fixation d’un « ratio minimal de personnels travaillant en Ehpad » établi à 0,8 effectif à temps plein (ETP) par résidant, ou encore de veiller à ce que les décisions liées au renforcement des mesures sanitaires soient « proportionnées » et prises « pour une durée déterminée ».
La ministre appelle à ne pas faire « d’Ehpad bashing »
Un « protocole allégé » a été transmis aux directeurs des Ehpad en mars pour tenir compte notamment de la montée en puissance de la vaccination chez les résidents en Ehpad et les personnels qui y travaillent, a rappelé jeudi à la presse la ministre chargée de l’autonomie, Brigitte Bourguignon, en marge de la séance des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale.
Mais « force est de constater que beaucoup ne respectent pas ce protocole ou du moins prennent encore trop de mesures restrictives en matière de droit de visite ou de droit de sortie », a-t-elle reconnu, précisant que la « décision d’allègement des mesures » allait être rappelée. Mme Bourguignon a néanmoins souligné qu’il ne fallait pas faire « d’Ehpad bashing », saluant les « efforts » de ceux qui y travaillent depuis le début de la pandémie.
Dans un communiqué, l’AD-PA, association de directeurs d’établissements pour personnes âgées, a demandé une « réécriture » du protocole pour « rompre avec les mesures restrictives dérogatoires au droit commun pointées par la Défenseure des droits ».
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