Des employés d'une entreprise funéraire ferment le cercueil
d'une victime du Covid-19, à l'hôpital de Mulhouse le 5 avril.
Photo Sebastien Bozon. AFP
Les nouvelles données publiées, vendredi, par l'Insee confirment une forte hausse de la mortalité dans plusieurs départements, en mars, comme le Haut-Rhin, Paris, les Vosges, la Seine-Saint-Denis et les Hauts-de-Seine.
Meurt-on tellement plus que d’habitude en France, à cause de l’épidémie de Covid-19 ? Au niveau national, sur le mois de mars, la réponse est oui par rapport à une année comme 2019 (52 011 décès) sans forte grippe saisonnière à cette époque.
Et non, par rapport à 2018, où le virus de la grippe était encore à son apogée. D’après les dernières données publiées vendredi par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), entre le 1er et le 30 mars 2020, 57 441 personnes sont décédées en France (et ont été enregistrées par les mairies avant le 10 avril), toutes causes confondues. En 2018, sur la même période, ce nombre était de 58 641.
Une hausse se fait sentir, par contre, fortement dans certains départements. Le Haut-Rhin a vu un bond de 128% de la mortalité entre le 1er et le 30 mars 2020 par rapport à la même période en 2019. D’autres sont fortement touchés, comme la Seine-Saint-Denis (+62%), les Hauts-de-Seine (+56%) et les Vosges (+55%).
Plus significatif, Libération a calculé le nombre de décès supplémentaires pour 100 000 habitants, entre mars 2020 et mars 2018, soit 82 dans le Haut-Rhin, 20 en Seine-Saint-Denis, 18 à Paris, 17 dans les Hauts-de-Seine et 12 dans les Vosges.
Relativiser
Les régions Grand Est et Ile-de-France comptent ainsi un nombre de décès totaux, survenus entre le 1er et le 30 mars, désormais supérieur respectivement de 39% et 34% à celui enregistré sur la même période en 2019. De même par rapport à 2018, avec respectivement +17% et +22%.
Patrick Guérin, médecin et président d’Open Health Company, l’organisme qui coordonne la surveillance mondiale de la grippe, remarque tout de même certains biais dans la présentation de ces chiffres. «Il faut noter l’effort de transparence de l’Insee mais qui semble vouloir chercher la démonstration d’une forte surmortalité, affirme-t-il. Le choix est fait de comparer les données à mars 2019, où la mortalité était faible, alors que, par exemple, en janvier 2017, le nombre mensuel total de morts toutes causes confondues a été de 68 816 personnes. Un chiffre énorme qui s’explique par un virulent épisode grippal. De même, l’augmentation de la population qui implique une hausse des décès n’est pas prise en compte pour relativiser ces chiffres.»
Pour début avril, l’Insee annonce une forte hausse du nombre de décès (enregistrés par voix dématérialisée) entre le 30 mars et le 3 avril, soit 9 033 de plus sur toute la France. L’Institut ne précise pas ceux qui peuvent être liés au Covid-19. «L’Insee, avec sagesse, tempère l’imputation de l’augmentation des décès à la pathologie Covid-19, dont la méthode de comptage a changé le 31 mars 2020, avec deux biais (de mesure et d’attribution) qui provoquent une amplification des décès considérés comme causés par le virus», avertit Patrick Guérin.
Avant le 31 mars, les établissements de santé ne pouvaient déclarer un cas comme lié au coronavirus que s’il avait été prouvé par un test biologique. Depuis, ils le peuvent aussi si avec pour seule preuve «un scanner thoracique évoquant un diagnostic Covid-19», d’après Santé publique France. Avec le risque d’intégrer d’autres infections respiratoires dans ces chiffres.
Autre élément à prendre en compte : au mois d’avril, la mortalité moyenne, en période normale, a tendance à baisser, l’épisode annuel de grippe étant passé. La hausse du nombre de décès en avril, cette année par rapport aux précédentes, risque donc de paraître d’autant plus importante.
Amélioration
Nouvelle rassurante, entre le 28 mars et le 3 avril, «la hausse des décès dans la région Grand-Est se poursuit, mais à un rythme nettement ralenti par rapport à la semaine passée», estime l’Insee. Dans les communes qui transmettent leur avis par voie dématérialisée (donc plus rapidement), les décès y sont supérieurs de 7% à ceux de la semaine précédente, alors que la hausse sur la semaine d’avant était de 32%.
Pour la premiière fois, l’Institut a aussi détaillé la répartition des morts par lieu, que ce soit l’hôpital (ou clinique), le domicile ou l’établissement pour personnes âgées. Comme on pouvait s’y attendre, à partir du 23 mars et jusqu’au 3 avril, plus de personnes que sur les deux précédentes années, à la même période, sont décédées en Ehpad, «alors qu’auparavant cette proportion était inférieure à celle observée en 2019 ou 2018», précise l’institut.
Quant à la répartition en fonction des tranches d’âge, une croissance importante des décès de personnes âgées entre 75 et 84 ans s’observe notamment dans le Haut-Rhin (+175% entre 2019 et 2020), en Seine-Saint-Denis (+95%), dans les Vosges (+91%), les Hauts-de-Seine (+85%) ou encore le Territoire de Belfort (+70%).
L’Insee précise que les données pour les Bouches-du-Rhône sont à prendre avec des pincettes, car, comme CheckNews l’expliquait dans un précédent article, depuis le 13 mars, la mairie de Marseille fait face à des problèmes techniques qui ont perturbé ses transmissions à l’Insee.
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