6 400 personnes ont découvert leur séropositivité en 2017 et la moitié n’avait jamais fait de test de dépistage auparavant.
Environ 6 400 personnes ont découvert qu’elles étaient infectées par le VIH en 2017 et, pour la moitié d’entre elles, à l’occasion de leur premier test de dépistage, indiquent les données de surveillance françaises parues, jeudi 28 mars, dans le bulletin de Santé publique France. Malgré une prévention qui s’est diversifiée ces dernières années, l’infection par le VIH – qui fait l’objet d’une déclaration obligatoire depuis 2003 – ne recule plus depuis des années.
Le nombre de découvertes de séropositivité VIH en France est « stable entre 2010 et 2017 », précise l’agence de santé publique. En 2008, un total de 6 940 nouvelles infections avait été recensé par les autorités, ce qui marquait une nette diminution par rapport à 2003, où l’on en dénombrait 9 000.
Ces données de surveillance de l’infection à VIH en France émanent des laboratoires de biologie médicale, qu’ils soient de ville ou hospitaliers, et incluent celles des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD). Elles ne prennent pas en compte les quelque 3 millions de sérologies pratiquées annuellement à l’occasion d’un don du sang. Avec 5,6 millions de sérologies, l’activité de dépistage du VIH en 2017 était en augmentation de 12 % par rapport à 2010, sans pour autant que le nombre de sérologies positives confirmées évolue. Santé publique France suppose « que l’augmentation du dépistage a sans doute peu bénéficié aux populations les plus exposées au VIH ».
Une majorité de contaminations hétérosexuelles
La répartition des 6 400 découvertes de séropositivité VIH en 2017 – pour les deux tiers chez des hommes – fait apparaître une majorité (3 600 cas, soit 56 %) de contaminations lors de rapports hétérosexuels et 2 600 cas (41 %) lors de rapports sexuels entre hommes (HSH). Le reste est représenté par les 130 cas liés à l’usage de drogues injectables. Dans cette dernière population, le nombre de mises en évidence d’une séropositivité a diminué de moitié entre 2010 et 2017.
La proportion de sujets de moins de 25 ans est stable (12 %), soit 16 % chez les HSH et 9 % chez les hétérosexuels, tandis que la part des 50 ans et plus est en hausse, passant de 19 % en 2010 à 22 % en 2017.
Augmentation de cas chez les HSH nés à l’étranger
L’agence note que « si le nombre de découvertes de séropositivité est globalement stable entre 2010 et 2017 chez les HSH des différences sont constatées selon le pays de naissance ». S’il n’y a pas de variations chez les HSH nés en France, il existe une augmentation continue chez ceux nés à l’étranger : de 400 cas en 2011, soit 18 % des découvertes chez des HSH, leur nombre est passé à 675 cas, soit 26 % en 2017 (originaires pour 9 % d’entre eux du continent américain, pour 6 % d’Afrique subsaharienne, pour 5 % d’Europe et pour 6 % d’une autre région du monde). Santé publique France ne parvient pas à trancher sur les raisons d’une telle évolution chez les HSH nés à l’étranger. Elle pourrait être en lien avec un accroissement des nouvelles contaminations ou bien avec un recours plus important au dépistage.
Les trois quarts des découvertes de séropositivité chez des personnes hétérosexuelles concernent des individus nés à l’étranger. Leur nombre ne varie pas sur la période 2010-2017, mais chez les personnes hétérosexuelles nées en France, « la diminution observée entre 2010 et 2014 ne s’est pas poursuivie ensuite. »
Enfin, l’enquête met en évidence le caractère encore tardif des découvertes de séropositivité : 30 % ont fait l’objet d’un diagnostic à un stade avancé de l’infection, que ce soit sur le plan clinique ou biologique, et ce, quel que soit le mode de contamination. De plus, la moitié (52 %) des personnes chez lesquelles l’infection par le VIH a été identifiée déclaraient ne jamais avoir été testées auparavant. Une proportion qui ne diminue pas ces dernières années.
« Très mauvais chiffres »
Au vu de ces données nationales – non détaillées par région ou département –, Santé publique France plaide pour « lever les freins au dépistage du VIH pour atteindre les personnes jamais dépistées auparavant. Parallèlement, le dépistage répété doit être favorisé parmi les populations les plus exposées, en particulier les HSH ». Ce serait le moyen, selon l’agence, d’atteindre le seuil de 95 % de personnes diagnostiquées parmi celles vivant avec le VIH.
Il faut faciliter l’accès au dépistage sans ordonnance
Pour l’épidémiologiste France Lert, présidente de l’association Vers Paris sans sida, ces résultats constituent de « très mauvais chiffres. Nous disposons de nombreux outils médicaux de prévention : le préservatif, la prophylaxie pré-exposition (PrEP) sans restriction avec les antirétroviraux et le traitement systématique après exposition ou après la découverte d’une séropositivité. Nous devrions donc avoir des résultats positifs. Comme l’a affirmé l’un des chercheurs américains sur le VIH le plus prestigieux, Tony Fauci, nous n’aurons pas d’excuse. »
France Lert rappelle que, pour lever les freins au dépistage, en particulier « chez les hommes qui, dans tous les pays du monde, y ont peu recours », il faut en faciliter l’accès en favorisant par exemple le dépistage sans ordonnance, en s’appuyant sur les acteurs locaux et communautaires ou encore en allant à la rencontre des populations les plus exposées, comme le fait Vers Paris sans sida.
Elle prône la réorganisation de l’action de tous les acteurs, parfois pléthoriques, en l’adaptant à la réalité. « Le plus mauvais test, c’est celui que l’on ne fait pas. Quand une personne se présente au moment où un centre de dépistage ferme, il ne faut pas la laisser partir sans lui remettre un autotest », insiste France Lert.
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