«Être là», cellules grises
Par GÉRARD LEFORT
Taule. Régis Sauder a passé trois semaines avec l’équipe psy de la prison des Baumettes, à Marseille. Plongée dans la folie sous écrous.
Images floues, zoom frénétique, cadre traviolisé, son syncopé. Les premiers instants du documentaire Etre là sont agités et pourraient rebuter tant ils semblent citer le style de n’importe quel générique d’une série américaine «moderne». Le choix du noir et blanc semble relever, lui aussi, d’une afféterie esthétique. Or, pas du tout. Lorsque Etre là prend son envol, ces choix formels s’imposent comme des nécessités.
Mégalithes moraux. Le réalisateur, Régis Sauder, a passé trois semaines à l’été 2011 en compagnie d’une équipe de psy de la prison des Baumettes, à Marseille. Accéder avec lui à cette «bulle» est une épreuve qui pousse de lourdes portes et bouscule bien des a priori. Alors oui, ça doit chahuter. Le noir et blanc est lui aussi un parti pris dicté par les circonstances. Dans ce «monde à part» de la psychiatrie en milieu carcéral, on apprend à pas de loup que les relations humaines se nouent et se dénouent en contrastes tranchés où surgissent des mégalithes moraux. Rien de moins que le Bien et le Mal. Alors oui, le noir et blanc est idoine.