Par Elvire von Bardeleben Publié le 18 mai 2021
Manchots, ouistiti, toucan, serpent, mygales, cochon d’Inde… Ils sont complètement frappés, désinhibés, et peuplent les albums jeunesse de ce printemps. Les petits lecteurs sont ravis.
> Palmipèdes (dé)connectés
L’avantage, quand on transforme tous les personnages en manchots rigolos, c’est qu’on peut aborder des thématiques graves sans plomber l’atmosphère. Dans cet ouvrage, il est question d’un papy palmipède qui commence à fatiguer. Il est encore suffisamment vif pour pêcher un poisson au débotté en creusant un trou dans la banquise, gâter son petit-fils avec des bonbons aux algues et des glaces au hareng… mais il est aussi capable d’oublier d’aller le chercher à l’école, de perdre ses clés ou de mettre le feu à son igloo (l’absurdité de la glace qui flambe est ouvertement assumée). Le petit-fils et ses copains préados décident de l’aider en lui construisant un nouvel habitat à la pointe de la modernité, où il suffit d’appuyer sur un bouton pour que l’aspirateur fonctionne tout seul ou qu’un bras automatique se mette à poêler des crêpes. La technologie nous sauvera-t-elle de la décrépitude avancée ? Pas sûr, mais en tout cas, le jeune public adore l’idée.
« Papy est reconnecté », de Philippe de Kemmeter, Saltimbanque, 32 p. Dès 6 ans.
> MC Ouistiti
Radio Banane a tout pour plaire au jeune lecteur : un titre accrocheur, des personnages animaux sympathiques, une action rythmée, un texte et des illustrations très compréhensibles déployées dans un format conséquent (76 pages, 7 chapitres). L’intrigue se joue au cœur de la jungle, où le ouistiti Aristote découvre une épave d’avion. La radio fonctionne toujours, alors il se lance dans l’élaboration d’une émission avec ses copains. Lui se charge des blagues (« quelle est la figure géométrique préférée des canards ? Les carrés parce qu’il y a beaucoup de coins, coins, coins », c’est cadeau), le toucan assure la météo, les mygales et le serpent jouent de la musique… De fil en aiguille, « Radio Banane » finit par être diffusée aux Etats-Unis, y fait un carton, si bien que des célébrités/sosies de Karl Lagerfeld, Keith Richards ou encore d’Hillary Clinton décident d’aller à la rencontre des animaux dans leur jungle. Chacun dans son genre contribue à la légèreté de cette histoire qui, tout en se moquant gentiment du désir de célébrité ou de l’avidité des humains, ne cherche pas à prouver quoi ce soit, plutôt à divertir la galerie.
« Radio Banane », de Clémentine Mélois, illustré par Rudy Spiessert, L’Ecole des loisirs, 76 p. Dès 6 ans.
> Cochon d’Inde ceinture noire
L’écrivaine anglaise Zadie Smith, qui a publié quelques fantastiques romans pour adultes (De la beauté, Sourires de loup…), se lance dans son premier album jeunesse coécrit avec son compagnon, le romancier nord-irlandais Nick Laird. Ici, il n’est pas question de racisme ou de crise de la quarantaine, mais des difficultés d’adaptation d’un cochon d’Inde judoka qui est offert à Kit, une petite fille déjà propriétaire d’un chien, d’un chat et d’un perroquet. Les autres animaux, un peu jaloux de cette nouvelle recrue, ne comprennent pas sa tenue de judoka (le lecteur non plus d’ailleurs), se moquent de lui, le surnomment « Dingo ». Le cochon d’Inde meurtri atterrit chez une vieille voisine exubérante, qui lui remonte le moral en lui expliquant qu’il vaut mieux être « dingo » pour profiter de la vie. Finalement, tout est bien qui finit bien : Dingo s’accepte tel qu’il est, ses nouveaux compagnons se mettent au judo et se prennent une bonne raclée. Et le jeune lecteur est très satisfait.
« Dingo », de Zadie Smith, Nick Laird, illustré par Magenta Fox, Gallimard jeunesse, 40 p. Dès 4 ans.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire