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mardi 22 décembre 2020

A l’hôpital, «on sait que janvier sera compliqué…»

Par Julie Renson Miquel — 21 décembre 2020


Dans le Grand Est, les cas de Covid se multiplient. Eric Thibaud, chef du service des urgences des hôpitaux civils de Colmar, redoute l’impact des fêtes de fin d’année.

Troisième vague ou rebond de la deuxième ? Dans le Grand-Est, le nombre de malades du Covid ne cesse d’augmenter ces deux dernières semaines. D’après les données de Santé publique France, le taux d’incidence s’envole : 184,8 cas pour 100 000 habitants (du 7 au 13 décembre). Pour l’Agence régionale de santé, il serait même de 202,8 (du 9 au 15 décembre). Bien au-delà de la moyenne nationale (134,6). Pour Eric Thibaud, chef du service des urgences des hôpitaux civils de Colmar, si les soignants sont mieux préparés, leur force, elle, faiblit.

Quelle est la situation aux urgences à Colmar, et plus généralement à l’hôpital ?


Depuis une semaine, on a clairement une augmentation du nombre de cas. On est obligés de s’adapter en déprogrammant et en créant des secteurs dédiés aux cas Covid. On sait déjà que, sur les deux semaines à venir, la gestion des lits de réanimation pour le Covid se fera au jour le jour. Dimanche, on a envoyé un cas Covid grave à Strasbourg parce qu’on n’avait plus de place en réanimation. Après, il y a pas mal de différences avec mars-avril. On utilise un système de tests PCR sans amplification qui nous permet d’avoir les résultats en quinze minutes au lieu de trois heures. Et là où, fin mars, on était monté à 66 passages Covid par vingt-quatre heures, on dépasse rarement les 10. On n’a pas encore la tête sous l’eau mais on a très peur du sens que prend la courbe épidémique. On sait que janvier sera compliqué…

Comment appréhendez-vous la période des fêtes justement ?


Pas bien du tout. Très clairement, on est au bout de nos capacités habituelles en Covid, on va être obligé de basculer des lits d’autres secteurs. Les précautions d’isolement nécessitent plus de personnel à nombre de patients égal. Un malade Covid prend beaucoup plus de temps qu’un malade non-Covid. Ça complique les choses, car il faut repenser l’effectif paramédical de jour et de nuit. Ensuite, l’hôpital est dans l’ensemble fatigué, on a eu une année particulièrement violente. On fera face, on n’a pas le choix. Mais ce sera dur, ça l’est déjà.

Faut-il confiner à nouveau ?

D’un point de vue purement sanitaire, oui. Mais d’un point de vue économique… J’ai une vision de terrain qui est évidemment biaisée. Pour moi, l’équation est assez simple : en mars, quand le pays s’est fermé, dans les deux semaines qui ont suivi le nombre de cas a diminué de façon impressionnante. Là, le nombre de cas n’a pas diminué de façon aussi impressionnante et il remonte. Mais ce n’est pas binaire. On ne peut pas choisir entre le sanitaire et l’économique. S’il y a crise, et il y en aura une, cela aura des conséquences sanitaires. Donc oui, d’un point de vue purement sanitaire le confinement reste la seule solution. Il faut être lucide. Aux Etats-Unis, après Thanksgiving, ils ont eu un nouveau rebond épidémique. On aura le même après les fêtes.

Que conseillez-vous aux gens juste avant les fêtes ?

Il n’y a pas de secret, il faut faire attention. On a tous besoin de voir les gens qu’on aime. Pour moi c’est très simple : on a une lumière de sortie de crise qui est le vaccin. On peut ergoter pendant des heures sur la sécurité, les risques, etc. Mais il faut faire des efforts pendant encore six mois pour sortir de cette pandémie. Je sais que c’est difficile, mais si on ne fait pas ce qu’il faut, le système de soin sera de nouveau saturé. Si ce qu’on a vécu en mars-avril devait arriver dans plusieurs régions en même temps, on ne serait pas capable de faire face au niveau national.


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