Il n’y a jamais eu autant de consommateurs réguliers de cannabis en France
Les chiffres du « Baromètre santé 2017 » – 2,2 % des adultes consomment du cannabis chaque jour – confirment l’échec des politiques répressives.
Si la part de la population adulte consommant au moins une fois dans l’année est globalement la même qu’en 2014, année du précédent « Baromètre », d’autres indicateurs, comme l’usage quotidien, affichent une légère hausse. L’enquête, menée auprès d’un échantillon représentatif de plus de 20 000 personnes âgées de 18 ans à 64 ans, révèle ainsi que c’est désormais 2,2 % de la population adulte qui consomme du cannabis chaque jour, soit, selon les calculs du Monde, plus de 800 000 personnes, contre 1,7 % trois ans plus tôt.
Conséquence : les chiffres 2017 « s’avèrent être les plus élevés depuis vingt-cinq ans », soulignent dans un communiqué Santé Publique France (SPF) et l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), les deux organismes chargés de cette étude. Pour comparaison, en 1992, seuls 4,4 % des Français adultes déclaraient consommer du cannabis au moins une fois dans l’année.
Alors que le gouvernement repousse depuis maintenant près de six mois l’annonce du « plan national de mobilisation contre les addictions 2018-2022 », censé définir les stratégies à déployer en matière de tabac, d’alcool et de cannabis ces quatre prochaines années, le baromètre 2017 confirme l’échec de l’approche française en matière de cannabis. Signe de l’accessibilité, de la disponibilité et donc de la banalisation de ce produit pourtant illicite : si un Français sur huit (12,7 %) avait tiré sur un joint au moins une fois dans sa vie en 1992, cette proportion est passée à un sur quatre (23,6 %) en 2000 et à près d’un sur deux (44,8 %) en 2017.
Marché noir et autoculture
Les chiffres 2017 révèlent par ailleurs l’émergence d’un phénomène nouveau : le développement d’une consommation régulière active chez les plus de 25 ans. En 2000, 2,2 % des 26 ans-34 ans et 0,9 % des 35 ans-44 ans fumaient au moins dix fois dans le mois. Dix-sept ans plus tard, ces pourcentages ont pratiquement été multipliés par trois : ils sont respectivement 6,3 % et 3,3 % de ces classes d’âge à consommer à une telle fréquence. Cela « laisse supposer que l’usage de cannabis ne serait plus l’apanage exclusif des jeunes générations et persisterait après l’entrée dans la vie professionnelle », souligne l’étude.
Autre chiffre révélateur de cette tendance : aujourd’hui, un adulte de 26 ans-34 ans sur dix (10,2 %) consomme du cannabis au moins une fois dans le mois. « Les jeunes générations des années 1990 vieillissent », résume Stanislas Spilka, le responsable des enquêtes et analyses statistiques à l’OFDT. « Parmi les jeunes adultes qui arrivent, un sur deux a consommé du cannabis. Certains continuent au-delà de 25-30 ans. »
Un mouvement qui s’accompagne toutefois d’une moindre expérimentation chez les jeunes de 17 ans, comme l’a montré l’enquête Escapad publiée en février. « On va avoir une génération moins expérimentatrice, on peut peut-être s’attendre à une nouvelle génération avec un plus faible usage, souligne M. Spilka. On peut supposer que la prochaine enquête dans quatre ans va montrer que les choses se tassent un peu. »
Autre enseignement du baromètre 2017 : près des deux tiers des usagers déclarent avoir eu recours au marché noir pour s’approvisionner. Parallèlement, 7 % des usagers disent pratiquer l’autoculture, un mode d’approvisionnement plus présent chez les 35 ans-64 ans que chez les 18 ans-34 ans. « Cette caractéristique illustrerait la moindre propension de ces générations plus âgées à recourir au deal de rue ou à des réseaux de consommateurs-revendeurs et une évolution du cadre de vie (logement indépendant, plus grand…) qui faciliterait l’autoculture », souligne l’OFDT.
Le baromètre 2017 révèle par ailleurs que l’usage, au cours de l’année, de cocaïne « continue d’augmenter significativement », passant de 0,2 % de la population adulte en 1995, à 1,1 % en 2014, et atteint désormais 1,6 % en 2017, « ce qui en fait la substance illicite la plus consommée après le cannabis ».
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