| 23.11.2018
Crédit Photo : AFP
La contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) Adeline Hazan a tiré la sonnette d'alarme sur les atteintes aux droits fondamentaux des détenus âgées ou en situation de handicap dans un avis publié au Journal Officiel du 22 novembre. Elle s’appuie sur les constats réalisés lors de ses visites en établissements pénitentiaires et sur de nombreux témoignages reçus.
La CGLPL constate que la surpopulation carcérale a un impact disproportionné sur les personnes vulnérables. Pour de nombreux détenus âgés ou handicapés, « la vie en détention est source de peur et d’angoisse : la confrontation avec une population majoritairement très jeune, leur isolement car les cours de promenade représentent un espace où elles sont particulièrement vulnérables, leur désœuvrement du fait de l’inadaptation des activités proposées, tant de loisirs que professionnelles », est-il inscrit dans l'avis. « S’agissant des fouilles intégrales, aucune instruction de la direction de l’administration pénitentiaire ne décrit les modalités techniques de leur réalisation sur des personnes détenues handicapées ou âgées », est-il précisé un peu plus loin.
Aménagement des cellules et des peines
Si elle ne plaide pas pour la construction de centres spécialisés dans la détention de personnes âgées ou handicapées, la CGLPL estime néanmoins que les établissements pénitentiaires doivent présenter des aménagements spécifiques, tels que des zones et des cellules adaptées aux personnes handicapées. Le Comité européen de prévention de la torture précise qu’une cellule pour personne à mobilité réduite ne devrait pas avoir une surface au sol inférieure à 14-15 m2.
L'âge et le handicap ne sont pas des contre-indications à l'incarcération. « Toutefois, dans certaines situations, il apparaît indispensable de se poser la question de la poursuite de l’incarcération, au regard du sens de la peine et de la prévention des traitements inhumains ou dégradants », précise la CGLPL. Celle-ci recommande que le procureur de la République ou le juge de l’application des peines s’efforcent par tout moyen de faire en sorte que la peine s’exécute en milieu ouvert. Si une peine de prison est effectivement prononcée, la CGLPL demande qu'un « repérage pertinent des situations et des besoins, à l’arrivée et au cours de l’incarcération » soit effectué. « Des agents doivent être formés à cette fin »
Une population mal connue
Concernant les entretiens préalables auprès du centre national d’évaluation, l'avis demande qu'en soient dispensés ceux dont l’état de santé ou son état rend l'évaluation manifestement impossible. « Une action interministérielle doit être engagée pour favoriser l’hébergement des personnes âgées ou dépendantes à leur sortie de détention et leur rendre effectivement accessibles les dispositifs de droit commun », ajoute la CGLPL.
Il n'existe pas de données récentes sur le nombre de détenus en situation de vulnérabilité ou de handicap. Le dernier exercice du genre, l’enquête « Handicaps- incapacité-dépendance en milieu carcéral » date de 2001. « À structure par âge et par sexe comparable, la proportion de personnes ayant au moins une difficulté est près de trois fois plus élevée en prison que dans le reste de la population », pouvait-on y lire. « Il est de ce fait impossible de mettre en place une stratégie nationale de prise en charge adaptée à ces publics » en conclut la CGLPL.
Cette absence de données met la France en délicatesse vis-à-vis de la résolution 2223 sur les détenus handicapés en Europe, qui « invite les États membres à recueillir des données statistiques, y compris des données ventilées par âge, par sexe et par d’autres critères pertinents, permettant d’avoir une vision précise du nombre et de la situation des détenus handicapés dans toute leur diversité. »
L'avis du défenseur des droits limite la portée de son avis aux difficultés causées par des handicaps physiques. « La détention des personnes atteintes de troubles mentaux fera l’objet d’un avis distinct », précise l'avis.
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