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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

jeudi 4 juin 2020

Troubles psy : plus d’imagerie pour moins de médicaments ?

Alternative Sante : l'expérience de la médecine naturelle
Jean-Pierre Giess   3 juin 2020


  • Vision 3D du cerveau grace au SPECTVision 3D du cerveau grace au SPECT

Alors que le recours à l’imagerie est devenu un quasi réflexe dans tous les domaines de la médecine, celui de la santé mentale est l’un des rares ‒ le seul ? ‒ à encore s’en priver pour établir ses diagnostics. Comme questionne un célèbre psychiatre américain précurseur en la matière : « Comment voulez-vous savoir sans y voir ? »


Les troubles mentaux restent un tabou. Il n’est que de constater la réaction d’une personne qui se voit suggérer « d’aller voir quelqu’un » : « Quoi, comment, mais tu n’y penses pas ?! Je ne suis pas fou (folle) tout de même ! ». Près d’un quart des Français consomment pourtant des psychotropes et 25 personnes se donnent la mort chaque jour. Entre perte des repères, souffrance au travail et confusion sociale ambiante, les conditions de l'instabilité mentale n’ont jamais été aussi favorables.

La psychiatrie diagnostique-t-elle dans l’obscurité ?

Si vous allez voir votre médecin pour une douleur dans le genou, la poitrine, le dos ou n’importe où ailleurs, il voudra d’abord voir ce qui se passe ; vous repartez donc avec une ordonnance pour une radiographie, un scanner, une IRM, une coloscopie, une coronarographie ou au minimum une analyse de sang. Bref des images ou des données factuelles qui permettent de poser un diagnostic et faire le choix d’une thérapie en rapport. Mais il y a un organe qui échappe quasi systématiquement à une telle démarche : le cerveau. Là, le spécialiste, en l’occurrence le psychiatre, va se référer aux symptômes décrits par son patient et au DSM (Diagnostic and Statistical Manual), manuel de référence (controversé) pour le diagnostic des troubles psys.
Pour presque toujours le même résultat : la prescription d’un psychotrope, dont le choix repose d’ailleurs en partie sur la communication et le marketing déployés par les fabricants. Un certain nombre de ces substances sont en effet régulièrement décriées non seulement pour leur apport totalement illusoire , au mieux un effet placebo, mais aussi pour leurs effets secondaires potentiellement désastreux. Une partie des malades est carrément internée, souvent sous la contrainte, en hôpital psychiatrique. Tout ça pour des résultats discutables sur le long terme, ces patients étant trop souvent condamnés à errer avec leur mal durant toute leur vie. Mais que voulez-vous, c’est dans la tête…

Certains psychiatres aussi veulent de l’imagerie

Ces dernières décennies ont apporté des avancées considérables dans le domaine des neurosciences, notamment grâce aux techniques d’imagerie de plus en plus fines et précises. En offrant un visuel des zones cérébrales impliquées dans telle tâche, ou dysfonctionnantes dans telle maladie, l’imagerie a permis des progrès décisifs dans la compréhension de l’organisation du cerveau, de l’activité des neurones, des phénomènes électriques, des neurotransmetteurs… Cependant, ces progrès peinent à se traduire sur le terrain.
La demande existe pourtant, et doublement : d’un côté, les troubles mentaux touchent aujourd’hui près d’une personne sur quatre dans le monde, d’après l’OMS. Un sur quatre, c’est aussi le ratio des Français sous psychotropes. De l’autre côté, les psychiatres eux-mêmes commencent à réclamer davantage d’imageries cérébrales pour affiner leurs diagnostics, comme en atteste notamment une tribune publiée dans Le Monde en février 2018, à l’initiative de deux psychiatres et d’un radiologue.

Visualiser le fonctionnement du cerveau plutôt que le conjecturer

Les études portant sur l’imagerie médicale appliquée au cerveau montrent des différences fondamentales entre cerveaux sains et cerveaux « malades ». Cependant, l’imagerie ne fait clairement pas partie des routines de la psychiatrie, contrairement à d’autres spécialités comme la cardiologie, la cancérologie ou la rhumatologie. Il n’existe pas non plus de tests ou d’analyse de laboratoire pour diagnostiquer une migraine, une dépression ou un trouble bipolaire. En fait, ces affections ne sont qu’évaluées, pour ne pas dire conjecturées. Imaginez que votre cardiologue en fasse de même pour appréhender l’état de santé de votre cœur ; pas de prise de tension, pas de coroscanner, pas de test d’effort, rien que de la théorie. Bizarre, non ?
L’intérêt de l’imagerie du cerveau réside dans cette possibilité de visualiser un dysfonctionnement, de pouvoir identifier la zone concernée et de comprendre dans quel sens elle est affectée. Ainsi, les différentes techniques aujourd’hui à disposition permettent de voir si une zone est suractivée, sous activée, abîmée par un choc ou encore atteinte d’une dégénérescence ou d’une tumeur. Dès lors, il est possible de proposer au patient une thérapie en rapport avec l’état réel de son cerveau, et pas seulement en réponse à ses symptômes comportementaux.

Coronavirus: Barcelona beach trip for recovering patients

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3 June 2020

Doctors in Barcelona take coronavirus patients to the beachImage copyrightGETTY IMAGES
Image captionThe trips are part of a recovery programme for coronavirus patients
Spanish coronavirus patients are taking trips to the seaside as part of their recovery from the illness.
Medical teams at the Hospital del Mar in Barcelona have been photographed wheeling people to the beach as part of a programme designed to humanise intensive care units.
The government has slowly begun to ease what was one of Europe's most restrictive lockdowns.
At one point people could not go out to exercise and children were not allowed to leave their homes for any reason.
Doctors in Barcelona take coronavirus patients to the beachImage copyrightGETTY IMAGES
Image captionIsidre Correa was taken to the seaside on Wednesday

Doctors in Barcelona take coronavirus patients to the beachImage copyrightGETTY IMAGES
Image captionHe has been in hospital since 14 April



Réinterpréter l'histoire du suicide dans le « Passage du milieu » (golfe de Guinée, XVIIIe siècle)

 
Réinterpréter l'histoire du suicide dans le « Passage du milieu » (golfe de Guinée, XVIIIe siècle)
Massacre des esclaves du navire Zong, 1781

Africa4 propose une série sur l’histoire de l’esclavage sur la côte du golfe de Guinée… du point de vue des hommes et femmes réduits en esclavage.
# Épisode 3

Cette série est le résultat d’une campagne de recherche inédite dans les archives de la Compagnie des Indes par les étudiant.e.s du Master d’histoire transnationale de l’Ecole normale supérieure et de l’Ecole des chartes (PSL Université).
Questions à... Ursula Carmichael, étudiante en Master d’histoire transnationale (PSL Université).
Comment aborder la pratique du suicide dans le « Passage du milieu » ?
La pratique du suicide dans le contexte de la traite transatlantique semble avoir pris diverses formes : le refus de manger, se jeter par-dessus bord, ou se suicider au cours d’une révolte. Le suicide durant le Passage du milieu était un acte individuel ou collectif, entrepris par les femmes comme par les hommes. Les instances des actes autodestructeurs collectifs nous laissent supposer qu’un certain nombre de captifs ont préféré, dans le contexte d’une souffrance collective, mettre fin à leur vie avec une certaine solidarité pour faire face à la terreur et l’incertitude de l’acte. Mais dans les conditions de vie restrictives à bord des navires, on peut s’imaginer que les actes d’autodestructions individuelles devenaient plus simples et immédiats.
Comment aborder la question du suicide dans le « Passage du milieu » ?
Aujourd’hui on donne aux actes d’autodestruction entrepris par les captifs africains à bord des navires de traite le terme de suicide, projetant ainsi nos idées sur la réalité et le cadre des expériences des captifs africains. Les expériences horrifiantes vécues au quotidien (la torture, la séparation de la famille et des amis, le viol, la peur du cannibalisme et la maladie, entre autres), ont certainement provoqué des tentatives de suicide. Pourtant, l’histoire de la traite est complexe et l’étude des suicides dans le Passage du milieu fait preuve d’une multiplicité de dynamiques qui animaient les navires.

Dans les carnets de bord de la Compagnie des Indes, le terme « suicide » n’est pas utilisé. Les carnets de bord notent, par exemple, qu’un homme ou une femme « s’est jeté (e) » par-dessus bord » ou est « tombé(e) à la mer ». On note quelques mentions de suicide explicites, par exemple, dans le carnet de bord duDromadaire : « Il s’est jeté deux noirs par-dessus les lieux qui étaient enferrés ensemble, l’un de 22 et l’autre de 25. Ils se sont noyés de dessein prémédité… » (25 mars 1734).

mardi 2 juin 2020

Avec le confinement, sommes-nous devenus des hikikomori ?

cnrs-le-journal-logo - La Fondation Droit Animal, Ethique et Sciences
par Laure Cailloce    02.06.2020



Après deux mois de confinement, certains ont du mal à sortir de chez eux. Sont-ils devenus des « hikikomori », du nom de ces jeunes Japonais qui restent cloîtrés au domicile familial par refus du monde extérieur ? La réponse de Natacha Vellut, psycho-sociologue au laboratoire Cermes 3.
Vous êtes co-autrice d'un ouvrage sur les adolescents en retrait, les fameux hikikomori japonais. Qui sont-ils ? Ce phénomène existe-t-il en France également ?
Natacha Vellut1 : Les hikikomori sont ces jeunes Japonais âgés de moins de trente ans qui restent au moins six mois sans quitter le domicile familial. Ils arrêtent d’étudier ou de travailler, et cessent toute relation sociale… Certains peuvent vivre reclus pendant des années ! Le mot hikikomori veut dire littéralement « reculer », « se cloîtrer à son domicile ». Le phénomène a été décrit au Japon à la fin des années 1980, mais le terme « hikikomori » a rapidement eu beaucoup de succès auprès des psychiatres et médecins partout dans le monde, qui ont identifié des cas d’hikikomori parmi leurs jeunes patients.
En France, de plus en plus de familles et de jeunes se reconnaissent dans cette définition, même si, hors du Japon, les hikikomori ne sont pas considérés comme une catégorie médicale en tant que telle et qu’aucune statistique sur le phénomène n’est disponible. Certains hikikomori vont être camouflés derrière d’autres appellations, comme les décrocheurs scolaires par exemple. Mais attention, on peut avoir une phobie scolaire et continuer d’avoir des relations en dehors de l’école, donc tous les décrocheurs ne sont pas des hikikomori.

 Quelle est la cause de ce retrait du monde ?
N. V. : Le phénomène est psycho-social avant tout. Il est né au Japon lors de la grave crise économique qui a suivi l’éclatement de la bulle financière dans ce pays, à la fin des anénes 1980. On a parlé de « génération perdue » pour les jeunes en âge d’entrer sur le marché du travail. La société japonaise continuait de formuler des injonctions, mais n’offrait plus de place à ces jeunes ; quelque chose s’est rompu à ce moment-là.

Le mot hikikomori veut dire littéralement « reculer », « se cloîtrer à son domicile ». Le phénomène a été décrit au Japon à la fin des années 1980, mais le terme a rapidement eu beaucoup de succès auprès des psychiatres et médecins partout dans le monde, qui ont identifié des cas d’hikikomori parmi leurs jeunes patients.

Au-delà du cas japonais, la société actuelle fixe un niveau d’exigence extrêmement élevé, au niveau professionnel comme personnel, alors que dans le même temps, il devient de plus en plus difficile de trouver un travail et de se faire une place dans la vie, sans parler des normes que la pression des réseaux sociaux imposent aux jeunes d’aujourd’hui – « sois comme ceci, fais comme cela ». Le niveau d’insécurité ontologique s’est fortement accru, et est encore renforcé par les menaces environnementales, la crise climatique, et aujourd’hui cette pandémie mondiale. D'une certaine manière, et Bruno Latour le montre bien dans son ouvrage Où atterrir ? 2, le mouvement des ZAD, comme à Notre-Dame-des-Landes, est aussi une façon de répondre à cette insécurité, de se mettre en retrait de la société actuelle, mais en tentant de créer un autre monde.

Est hikikomori tout jeune qui reste cloîtré à son domicile durant au moins six mois.
Le confinement que nous avons vécu, et continuons de vivre partiellement, a-t-il des similitudes avec le phénomène hikikomori ? 
N. V. : Le confinement nous a été imposé, donc on ne peut pas parler d’un retrait choisi du monde. Mais, si certaines personnes en ont souffert, il faut bien constater que d’autres ont très bien vécu cette période de réclusion et se sont construits une sorte de bulle dont elles ont aujourd’hui du mal à sortir. Par peur de l’épidémie, évidemment, mais pas uniquement.

En se retirant du monde, les hikikomori s’extraient des relations sociales qu’ils ont tendance à juger trop compliquées. Le confinement a créé une situation similaire, avec un allègement du poids que représente le lien social, qu'il soit professionnel, mais aussi familial ou amical.

De la maltraitance infantile aux addictions de l’adulte

Université - The Conversation
Michael Longmire - Unsplash 2 juin 2020

Les personnes sujettes aux addictions cumulent généralement plusieurs événements de vie traumatiques, des biographies complexes et une souffrance psychologique antérieure à leurs premiers problèmes de drogue. Des traumatismes subis pendant l’enfance, surtout des abus sexuels et des viols, sont très fréquemment rapportés. La recherche en psychiatrie vise à comprendre l’impact de ces événements sur le risque de troubles psychiatriques à l’âge adulte.

Ces troubles sont complexes. Ils résultent en effet de différentes vulnérabilités, dont les origines peuvent être d’ordre génétique (des variations dans la séquence de certains gènes peuvent par exemple modifier le fonctionnement neurobiologique) ou neurodéveloppemental (altération du développement du cerveau et de sa maturation). Celles-ci interagissent avec un environnement à risque (toxique, infectieux, métabolique ou encore psychologique), déclenchant des perturbations neurobiologiques qui peuvent se manifester par des symptômes, voire des maladies. On pense actuellement que ces interactions surviennent pendant un laps de temps critique, durant lequel la fragilité du cerveau est accrue, et par conséquent l’exposition à un environnement à risque très délétère.


Pour les femmes qui tuent leur conjoint, la délicate question de la légitime défense différée

Dans 20 % des homicides conjugaux, c’est la femme la meurtrière. Parmi elles, près de la moitié avaient subi des violences avant leur passage à l’acte.
Par  et  Publié le 2 juin 2020
Voilà bientôt deux ans que Sophie, 52 ans, est détenue à la maison d’arrêt des femmes aux Baumettes, à Marseille. Elle y attend d’être jugée aux assises pour avoir mortellement blessé son compagnon d’un coup de couteau à l’abdomen, un jour de juillet 2018 à Arles (Bouches-du-Rhône). Mise en examen pour le meurtre de son concubin, Sophie était aussi, avant de tuer, une femme battue.
Sa fille dit d’elle : « Maman a toujours eu des compagnons violents. » Ses fragilités, son alcoolisme et quelques problèmes psychologiques l’ont conduite à un placement sous curatelle. Ses cinq années de vie commune avec Mohamed, la victime, ont été émaillées d’interventions des sapeurs-pompiers, de plaintes pour des cocards ou une mâchoire cassée. La dernière pour une fracture du fémur. C’était cinq mois avant l’homicide.
Aux policiers qui l’ont interrogée sur son geste, Sophie a expliqué qu’elle était en train de manger, que Mohamed s’était approché d’elle, une fois encore menaçant. Elle a dit avoir attrapé un couteau pour lui faire peur. Apprenant sa mort des suites de sa blessure, elle a confié qu’elle avait pensé que ce n’était « pas grave », qu’elle-même avait reçu un coup de couteau de la part d’un ex-mari. On avait recousu et voilà. Face aux jurés, Sophie envisage de plaider la légitime-défense.
Si la majorité des homicides au sein des couples sont le fait des hommes – des féminicides qui se sont, ces derniers mois, imposés dans le débat public –, les femmes représentent 20 % des auteurs de crimes conjugaux, selon l’étude 2018 sur les morts violentes au sein des couples, réalisée chaque année par la délégation aux victimes (DAV), une structure relevant du ministère de l’intérieur. Cette année-là, 28 hommes ont été tués par leur compagne, un chiffre relativement constant au fil des ans.

Psychiatrie : sortir de la « catastrophe gestionnaire » et sécuritaire

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La crise sanitaire et sociale que nous traversons a révélé et amplifié les conséquences des politiques néolibérales sur les systèmes de santé. Un système de soins dégradé, fonctionnant « à flux tendu » se trouve débordé par un drame sanitaire non anticipé.
Les hymnes indécents de nos gouvernants aux « héros » privés de moyens et contraints de se battre comme ils le peuvent face à l’épidémie ne peuvent le dissimuler. Parents pauvres de la santé avant la crise, la psychiatrie et ceux qu’elle tente de soigner, souvent précaires et marginalisés sont « en première ligne » des victimes de cette crise. 
À l’occasion de la sortie de leur livre « la révolte de la psychiatrie, les ripostes à la catastrophe gestionnaire » (éditions La Découverte), nous avons interviewé ses auteurs Rachel Knaebel, Loriane et Mathieu Bellahsen. Nous revenons avec eux à la fois sur les effets spécifiques des contre réformes sur le soin psychique pris en étau entre les exigences gestionnaires et les injonctions sécuritaires, sur les luttes des professionnels de la psychiatrie pour résister à la « catastrophe gestionnaire » et sur les alternatives dont ces luttes que tentent de se mener soignants, mais aussi patients et leurs familles sont porteuses.

Où dorment nos souvenirs ?

LES CHEMINS DE LA PHILOSOPHIE
par Adèle Van Reeth

LE 02/06/2020

Dans "Matière et mémoire" de Bergson, qui paraît en 1896, le deuxième chapitre, singulier, tient en lui-même et soutient cette thèse : le cerveau n’est pas un organe de représentation qui aurait le pouvoir magique de créer des souvenirs, et les emmagasiner... Mais alors, où se trouvent-ils ?
Où dorment nos souvenirs ?
Où dorment nos souvenirs ? Crédits : George Peters - Getty
Matière et mémoire de Bergson paraît en 1896. C’est le deuxième grand livre du philosophe dans lequel il continue d’explorer le malentendu autour de deux notions clé en métaphysique : l’espace et le temps.
[...] 

L'invitée du jour :

Yala Kisukidi, maîtresse de conférences en philosophie à l’Université Paris 8