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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

dimanche 25 septembre 2011




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Septembre 2011 - CNRS Alpha

Pourquoi, après des décennies de critique, de discrédit, voire d’ignorance, l’empathie connaît-elle aujourd’hui un regain d’intérêt théorique en philosophie, en psychanalyse et en sciences sociales ? C’est à cette question que cet ouvrage collectif souhaite répondre en interrogeant les recherches contemporaines sur l’empathie à partir de ses paradoxes théoriques, cliniques et moraux : une compréhension d’autrui à la fois affective et cognitive, identificatoire et sélective, automatique et inégalement distribuée. En examinant les perspectives récemment ouvertes qui montrent l’empathie sous un jour nouveau, en prenant en compte la complexité de son histoire et de ses modèles, la diversité de ses pratiques et de ses usages, les auteurs proposent des analyses originales qui la remettent au cœur d’une dialectique de l’affectivité et de la représentation, de l’intersubjectivité et des rapports sociaux, de l’expérience individuelle et de l’expérience sociale. Cet ouvrage s’appuie sur des rencontres et des programmes de recherche pluridisciplinaires qui renouvellent l’approche de l’empathie, en examinent les mécanismes, les usages et la portée dans les sciences sociales, la philosophie morale et sociale, et la psychanalyse. Il constituera un instrument irremplaçable de découverte, d’approfondissement et de critique d’une notion qui a enfin trouvé toute sa place dans la pensée contemporaine.


Le corps, porte-parole de l'enfant et de l'adolescentMarika Bergès-Bounes et Jean-Marie Forget (ed.)
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Septembre 2011 – Erès 

Comment parler du corps de l’enfant sans le chosifier, sans en faire seulement un paquet de chair, en le reconnaissant comme marqué du sceau du désir des parents et chargé de leurs rêves ? Cet ouvrage s’efforce d'offrir des outils de compréhension des manifestations du corps souffrant, souvent difficiles à décrypter chez l'enfant. Des psychanalystes et des professionnels engagés dans leurs rencontres avec l’enfant et l’adolescent proposent un tour d’horizon de la clinique actuelle qui permet d’ajuster leurs questionnements théoriques à la singularité de chacun. Ils s’efforcent de différencier, dans la constitution du symptôme corporel, la part respective qui revient à l’initiative de l’enfant manifestant sa subjectivité, à la trame familiale dans laquelle il s’inscrit et à l’incidence du discours consumériste actuel.
Marika Bergès-Bounes et Jean-Marie Forget sont psychanalystes à Paris, membre de l’Association lacanienne internationale.

Infirmiers en psychiatrie : tranches de vies en Paca


De la prison à l’appartement thérapeutique, du centre d’accueil d’urgences des personnes hospitalisées sous contrainte à la médiation thérapeutique par l’art, le métier d’infirmier en psychiatrie s’exerce de multiples manières. Des soignants se sont réunis en Paca pour échanger sur leurs pratiques.


« Le degré de civilisation d'une société se mesure à la manière dont elle traite ses fous », affirmait le psychiatre Lucien Bonnafé au début du XXe siècle. En pleine refonte des modalités d’hospitalisation sous contrainte, les infirmiers de psychiatrie réfléchissent plus que jamais à la manière d’améliorer leurs pratiques. Ainsi le Serpsy  (Soin étude et recherche en psychiatrie) de Provence-Alpes-Côte d’Azur a-t-il organisé le 15 septembre une après-midi de réflexion sur le thème « Le soin infirmier en psychiatrie aujourd’hui, qu’en est-il ? ». Des échanges nourris par des témoignages sur le quotidien d’infirmiers travaillant dans diverses structures, à l’hôpital ou en-dehors.
Laurent Séguy, infirmier psychiatrique en prison,  a été le premier à prendre la parole face aux 200 personnes présentes ce jour-là au centre hospitalier Edouard Toulouse de Marseille.  Durant une vingtaine de minutes, il a confié la difficulté qu’il y a à se trouver quotidiennement face à des détenus considérés comme très dangereux, condamnés à des lourdes peines, et en l’occurrence incarcérés à la Maison centrale d’Arles. L’infirmier a levé le voile sur cet univers carcéral où l’on vit dans des cellules fermées en permanence, où l’intimité nécessaire aux soins est souvent très difficile à organiser face à des gardiens qui ont peur de leurs détenus, lesquels sont parfois atteints de pathologies psychiatriques très lourdes. « Pourquoi tu soignes un monstre ? », lui demandent parfois les gardiens… L’infirmier n’en démord pas : on ne peut pas réduire une personne à ses actes.
Rétablir la confianceAprès cette immersion en prison, c’est de l’hospitalisation sous contrainte dont il a été question avec Yves Benoist et Raphaël Jacquetin, infirmiers au pavillon d’accueil du centre hospitalier psychiatrique de Laragne (05). Lorsqu’il leur est demandé de sortir de leur structure pour aller chercher des personnes dont l’hospitalisation sous contrainte vient d’être décidée, ont-ils raconté, il n’est pas rare qu’on leur dise que le patient « est calme, tout à fait d’accord pour venir ». C’est alors que la question a fusé: « Quelqu’un qui a déjà mobilisé des policiers, un préfet et un juge peut-il vraiment être calme ? » Il arrive pourtant que certains patients reviennent se présenter d’eux-mêmes, sans contrainte cette fois. Là, c’est une vraie victoire, insistent les infirmiers ; le fruit d’années de travail et de mise en confiance.
Ont ensuite témoigné Vannina Philipi, infirmière au centre hospitalier spécialisé Montperrin d’Aix-en-Provence, à propos de la médiation thérapeutique par l’art, puis Anne-Laure Friard-Brame et Marie-Laure Vella, exerçant dans le même hôpital, pour parler de la complémentarité entre les métiers d’infirmière et d’éducatrice spécialisée. Enfin, Nicole Taliana, cadre de santé en psychiatrie, s’est penchée sur le rôle du cadre prenant soin de son équipe.
Laure de Montalembert


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Les psychiatres de cité
MARDI 27 SEPTEMBRE 2011


Par Claire Hédon
La prise en charge des populations les plus vulnérables telles que les personnes résidant dans les Zones Urbaines Sensibles représente un enjeu particulier pour la psychiatrie publique. Un environnement défavorable, un faible niveau d’éducation et des retards dans l’accès aux soins se cumulent avec le caractère toujours stigmatisant de la maladie mentale. Cette question a rassemblé nombreux spécialistes ce mois-ci à Grenoble à l’occasion d’une journée d’étude dédiée à La psychiatrie publique à l’épreuve des zones urbaines sensibles. Alors y a t-il une épidémiologie et une clinique spécifiques de ces territoires urbains ? Si oui, les acteurs de la psychiatrie publique ont-ils les moyens de maintenir une offre de soins qui garantisse aux populations concernées une véritable équité ?
Pour en parler :
  • Dr Pierre Murry, psychiatre et chef de Pole Grenoble Sud-Isère au CH Alpes-Isère.
  • Tao Adohane, psychologue clinicien et psychothérapeute dans le champ social et de l’enfance en région parisienne. Auteur d’Itinéraires déracinés aux éditions de L’Harmattan.
  • Michel Dzalamou, Psychologue clinicien au service psychiatrique du CHU de Brazzaville.
En fin d’émission, à l’occasion du G20 « Travail/Emploi » qui se tient les 26 et 27 septembre à Paris, Médecins du Monde, Oxfam France et Avocats pour la Santé dans le Monde se mobilisent pour interpeller les leaders du G20 en faveur de la couverture maladie universelle. Pour en parler : Pierre Salignon, directeur général de Médecins du Monde.


LIVRES Jeudi dernier à 0h00

Perdre la tête par temps de révolution


CRITIQUELaure Murat explore les relations entre troubles politiques et folie au XIXe siècle
Par DOMINIQUE KALIFA

«Jamais il n’y eut autant de maladies mentales qu’après l’orage de la Révolution», écrit Michelet dans Ma jeunesse : «La vie nerveuse semblait atteinte dans ses sources mêmes.» L’idée d’une relation directe entre les désordres de la vie publique et ceux de l’esprit trouble le XIXe siècle. Dès 1816, le Dr Esquirol estime que les «malheurs politiques» du pays conditionnent ses délires. Dix ans plus tard, son collègue Félix Voisin explique comment «les commotions politiques produisent les maladies mentales».C’est cette relation singulière entre l’histoire et la folie, entre le politique et le pathologique qu’explore le livre de Laure Murat, archives des asiles de la Seine à l’appui.
Rationalisation. La Révolution constitue un évident point de départ. L’aliénisme moderne y trouve sa source, tant sur le plan de l’organisation que sur celui des pratiques médicales. A Bicêtre à compter de 1793, puis à la Salpêtrière où il officie vingt-cinq ans, Philippe Pinel s’efforce de rationaliser le traitement de la folie, qu’il considère comme une altération curable de la raison.
Mais la Révolution est en elle- même porteuse d’anxiétés psychiques : à l’ordre stable de l’Ancien Régime, elle substitue un monde où l’individu est promu sujet politique et social, acteur de son propre destin. On perçoit qu’un tel bouleversement, lié au choc de la Terreur, ait pu susciter des dérèglements. Pour Pinel, un quart des internés de Bicêtre a vu sa «raison aliénée par les événements de la Révolution». La guillotine, autre invention médicale et politique du temps, symbolise bien ce risque de «perdre la tête».
S’y ajoutent les différents usages politiques de la folie. Certaines convictions jugées déraisonnables sont vite rangées du côté de la pathologie. Le député Jacob Dupont, qui prêche l’athéisme à l’Assemblée en 1792, est interné pour«rêveries métaphysiques et révolutionnaires» et la carrière de la féministe Théroigne de Méricourt s’achève en 1794 à la Salpêtrière.
La Terreur transforme de nombreuses maisons de santé en lieux de réclusion et la tendance s’accentue sous l’Empire, qui confond internement médical et détention administrative. De nombreux opposants font ainsi l’expérience de l’asile, comme l’abbé Fournier, les complices de Cadoudal ou encore le général Malet. Sous la Restauration, on interne des journalistes comme Paul-François Dubois ou des caricaturistes comme Philippon ou Daumier, coupables de délits d’opinion.
A compter de 1830, les révolutions relancent l’attention des aliénistes, qui diagnostiquent le morbus democraticus. On dénonce les utopies comme une déraison, la conspiration comme un désordre intellectuel, le communisme comme une monomanie. A l’hôpital d’Arbois, le Dr Bergeret affirme que les cas de folie se sont multipliés par dix en 1848. «J’ai toujours pensé que dans les révolutions et surtout dans les révolutions démocratiques, les fous jouent un rôle politique considérable», surenchérit Tocqueville. D’autres, comme l’aliéniste allemand Wilhelm Grisienger, contestent ce constat, simple projection suscitée selon eux par l’effervescence du moment.
«Panophobie».Les comptages opérés par Laure Murat dans les registres d’admission confirment cette version : ni 1830, ni 1848 ou 1871 n’enregistrent de pic particulier. Mais la population asilaire est profondément troublée par les événements : le spectre de la barricade ou de l’insurrection hante les esprits, les guillotinés imaginaires animent les cabanons. Le paroxysme est atteint en 1871, au lendemain de la Semaine sanglante, lorsque tout s’enchaîne en visions de cauchemar: les obus, les Prussiens, les communards, les versaillais et les flammes de la guerre civile. Des aliénistes parlent de «panophobie» ou peur de tout.
«Moi colossal». Le cas d’école, qui donne son titre au livre, réside dans la figure devenue lieu commun de «l’homme qui se prend pour Napoléon». L’identification aux grands de ce monde est bien sûr un symptôme classique de dérèglement mental, mais cette identification-là est particulièrement révélatrice des désirs et des anxiétés du temps. Sa relation au contexte est évidente puisque c’est après le retour des cendres de l’ex-empereur, en décembre 1840, que l’on recense le plus grand nombre de cas. Mais quelque chose de plus profond, que les aliénistes vont intituler «monomanie orgueilleuse», se joue autour de Napoléon. Qu’est-il d’autre en effet que ce«moi colossal», perversion de la conscience individuelle, que ce héros démocratique, sorti de nulle part et devenu Dieu et surhomme à la fois, que cet être au psychisme dissocié (Bonaparte vs Napoléon) incarnant toutes les contradictions du sujet moderne ? Prudent, le livre de Laure Murat ne nous dit pas pour qui on se prend aujourd’hui.

Jacques Lacan, 30 ans après : rencontre-débat à la BnF

Mardi 4 octobre 2011 à 18h30, la BnF organisera une rencontre-débat en hommage à la disparition du psychiatre et psychanaliste français Jacques Lacan.



Figure majeure du paysage intellectuel français de l’après seconde-guerre mondiale, Lacan a notamment travaillé sur le rapport entre le langage et l’inconscient, avant de fonder sa propre école, proche du structuralisme.



Cette rencontre-débat sera animée par Christine Goémé et verra des interventions d’Elisabeth Roudinesco, historienne de la psychanalyse et Alain Badiou, philosophe et romancier.



Lacan, 30 ans après - Mardi 4 octobre 2011, 18h30 - BnF I François-Mitterrand, Hall Est - Grand auditorium - Entrée libre


Quotidien marocain d'information générale

Un ensemble de réflexions sur la psychanalyse au Maghreb et au Machreck

CULTURE | SALIM JAY | 22 SEPTEMBRE 2011 
La revue freudienne Topique que publient les éditions L’Esprit du Temps consacre son n° 110 à un riche ensemble de réflexions et de mises en perspective autour de la psychanalyse au Maghreb et au Machreck. Les contributions de ce numéro sont, pour une part, issues d’un colloque organisé en octobre 2009 par l’Association internationale d’histoire de la psychanalyse. Les lecteurs découvriront dans ce panorama non exhaustif mais stimulant des articles concernant le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, l’Egypte, le Liban, la Syrie, la Turquie.
Des informations stupéfiantes apparaissent. Par exemple, lorsque Raja Ben Slama évoque dans sa contribution intitulée La psychanalyse en Egypte – Un problème de non-advenue : « le féminisme anti-freudien, chez une grande féministe, psychiatre de formation, Nawal Saadaoui (née en 1930). Qui force le respect par son militantisme, mais qui sidère par la force de son déchaînement contre Freud et la confusion qu’elle érige en méthode entre le juridique et le psychique. Ainsi va-t-elle jusqu’à comparer Freud aux inquisiteurs qui pourchassaient les sorcières et lui attribuer des propos caricaturaux qu’il n’a jamais écrits ».
Raja Ben Slama montre, par ailleurs, que Mustapha Ziwer, le fondateur de la psychanalyse en Égypte, « n’est pas tout à fait perçu par lui-même, par ses disciples et par la postérité comme un psychanalyste. » Et de signaler que l’Association égyptienne de psychanalyse qui a vu le jour en 2004 « continue, par ses objectifs et ses activités, à ne pas identifier la psychanalyse comme discipline spécifique ».

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Féministes en tous genres

entretiens et articles de chercheuses sur le genre et les sexualités


Au lieu du féminin


Entretien avec Monique Schneider (première partie)


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Monique Schneider est psychanalyste, et membre de la Société de psychanalyse freudienne. Directrice de recherche émérite au CNRS, après avoir enseigné dans le département de psychanalyse de Paris VII, elle assure un séminaire à l’Ecole normale supérieure.

 Monique Schneider a répondu par écrit à nos questions, tandis qu'elle rédigeait La détresse aux sources de l'éthique (parution en avril 2011).




Dans La détresse aux sources de l’éthique, Monique Schneider repart de L’« Esquisse d’une psychologie scientifique », rédigée par Freud en 1895 sous l’inspiration et à l’adresse de Fliess (p. 10) [1]. En bonne et nombreuse compagnie – celle, entre autres, de Melville, Montaigne, Herman Cohen, Levinas et Claude Lévi-Strauss –, elle poursuit son questionnement sur le rapport à l’autre et « le partage sexué » promus par une psychanalyse d’obédience freudo-lacanienne.

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Jeune mère de famille paraplégique, Stéphanie vit comme tout le monde. Sauf quand la réalité la rattrape…

22 septembre 2011

Toujours à la recherche d'un emploi, j’ai pensé me réinscrire à la fac afin de faire de la sociologie dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience (VAE)...
Je parle de tout ça à mon mari qui me dit «rue d'Hautpoul c’est au fin fond du 19e, ça va être compliqué en bus et j’ai bien peur que les rues soient un peu en dévers dans ce coin là de Paris!»
L
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Euthanasie : pour une médecine humaine et responsable

Par VÉRONIQUE FOURNIER Cardiologue, directrice du Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin , DENIS BERTHIAU Juriste


L’affaire récente de Bayonne m’évoque ce que nous avons souvent entendu au cours du travail que nous venons de terminer au Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin à Paris. A savoir ce que disent attendre de la médecine, au moment de leur mort, les personnes de plus de 75 ans : un message auquel nous ne nous attendions absolument pas…

En janvier 2009, nous avons lancé une étude auprès de 200 personnes âgées de plus de 75 ans, malades ou non, dépendantes ou non, vivant chez elles ou en maison de retraite, pour savoir ce qu’elles pensaient du dispositif des «directives anticipées», introduit en 2005 par la loi Leonetti et les autorisant, comme tout un chacun, à écrire ce qu’elles souhaiteraient qu’il soit décidé pour elles au moment de leur fin de vie. L’objet n’est pas ici de dévoiler les résultats de l’étude qui seront présentés pour la première fois lors d’un colloque organisé le 11 octobre, à la MGEN à Paris, en partenariat avec Libération et France Culture. Il est d’évoquer plus spécifiquement trois d’entre eux.

Le premier est que tous ceux que nous avons rencontrés, quasi sans exception, expriment fortement qu’ils veulent vivre et vivre encore, résolument, quels que soient leur âge et leur état de santé.

Le deuxième est que la très grande majorité d’entre eux ne veulent pas entendre parler d’euthanasie, au sens où on l’entend usuellement d’un droit ouvert permettant d’obtenir, en tant qu’homme libre, une aide active à mourir de façon anticipée, à son heure et en toute conscience. 

Pour autant, et c’est le troisième message intéressant ici, ils sont nombreux à dire clairement qu’ils souhaiteraient que la médecine, au bout du bout, le jour où elle n’aura vraiment plus rien à leur proposer, quitte à ce qu’ils soient déjà inconscients et dans l’incapacité de s’exprimer, prenne sur elle de précipiter les choses en douceur.

Pourvu que je tombe sur un médecin qui aura assez d’humanité pour cela, disent-ils ! Et beaucoup d’entre eux ni ne considèrent qu’il s’agit vraiment là d’euthanasie ni ne veulent écrire de directives anticipées dans ce sens : ils ont bien trop peur qu’elles servent alors de blanc-seing aux médecins pour arrêter prématurément le combat ! Certes, tous n’expriment pas cela. La plupart éludent le sujet, le tiennent à distance, disent qu’il n’y a rien à en dire et que l’on ne peut rien anticiper. D’autres expriment qu’ils sont contre toute forme de précipitation, ils sont souvent de fervents adeptes des soins palliatifs - mais ceci n’est pas toujours exclusif de cela.

Enfin, il y a aussi ceux qui sont militants de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité, ou proches de ses thèses ; mais même ceux-là, poussés dans leurs retranchements, sont près d’un tiers à dire qu’ils aimeraient ne pas avoir à aller jusqu’à devoir s’exprimer in ultime pour demander la mort. Et tous ceux qui espèrent que quelqu’un acceptera de précipiter au dernier moment le cours des choses utilisent les mêmes arguments : mieux que personne, la médecine sait quand cela ne vaut plus la peine de continuer, c’est son métier ; c’est elle aussi qui est la mieux placée pour savoir comment faire partir les gens en douceur ; il devrait donc faire partie de son travail, de ses «bonnes pratiques», d’accepter de faire cela aussi, en plus du reste, pour ceux qui le souhaitent…

Somme toute, ce qu’ils demandent n’est-il pas assez proche de ce qu’aurait fait pour ses patients le docteur Bonnemaison de l’hôpital de Bayonne - et de ce qui du reste se fait régulièrement dans nos hôpitaux, sous une forme ou sous une autre ? Et sommes-nous sûrs qu’il soit moralement si condamnable de répondre positivement à de telles demandes, si tant est que l’on n’y réponde pas seul, ce qui est probablement le moindre des garde-fous indispensables ?

C’est vrai que le débat se profilerait alors de façon radicalement différente de celle envisagée jusqu’ici. Nous serions loin de l’euthanasie-liberté, choisie par plusieurs de nos voisins européens, et consistant à ouvrir la possibilité de mettre fin à la vie d’une personne qui le demande, après mûre réflexion, au nom de sa liberté, ou de l’euthanasie-exception à laquelle il ne pouvait être fait appel que pour des cas dramatiques et rarissimes, proposée par le Comité consultatif national d’éthique il y a quelques années.

Se pourrait-il que le débat sur l’euthanasie en France devienne celui ouvert par l’affaire de Bayonne ? En effet, à en croire les résultats de notre étude récente, comme ceux du dernier sondage sur «Les Français et l’euthanasie» réalisé par l’Ifop pour Sud Ouest du 17 au 19 août, il semblerait bien que ce soit ce type d’euthanasie qui rencontre l’écho le plus large dans la population : une euthanasie banale, quotidienne, confiée à une médecine en qui on a confiance, une euthanasie accordée à la toute fin d’une vie, comprise comme une libération offerte, au nom de ce qu’on appelait autrefois le «paternalisme médical», c’est-à-dire à l’inverse exactement du mouvement qui a porté les législations ailleurs.

Y aurait-il sur la question une spécificité française et comment la comprendre ? Une hypothèse pourrait être que l’équilibre entre l’individu et le collectif soit particulier chez nous. Nous serions comme imprégnés d’une tradition d’allégeance à la règle collective. Gageons qu’il y a encore du chemin avant que les Français fassent de l’euthanasie une revendication de l’individu au nom de son autonomie.

Aujourd’hui, leur principale attente est ailleurs : dans une loi qui autorise, au nom de la solidarité collective, la médecine à être à la fois humaine mais aussi responsable, jusqu’au point de précipiter in extremis leur mort, pour leur épargner d’ultimes souffrances, et peu importe avec quel produit pourvu que la fin soit douce. Est-ce possible ?

 Et si on parlait plutôt de la fin de vie ?
Par PHILIPPE BATAILLE Sociologue, directeur de recherche à l’EHESS (Cadis-CNRS)

Lors de la médiatisation de l’affaire de Bayonne, de nombreux contrastes sont apparus. Retenons en trois qui font s’interroger sur le devenir de la loi Leonetti dans la gestion médicale de la fin de vie. Cette loi autorise à «laisser mourir» un patient qui le souhaite en arrêtant tous les traitements, puis en arrêtant l’alimentation et l’hydratation si le corps survit à l’arrêt des traitements. Sa mise en œuvre a favorisé le développement des soins palliatifs qui font désormais autorité pour prendre en charge la mort à l’hôpital.

Mais il faut savoir plusieurs choses. D’abord, sur plus de 500 000 décès par an en France, quelque 200 000 ont lieu dans des activités cliniques reliées à l’urgence, notamment en réanimation. Dire que 80% des décès se produisent à l’hôpital masque les circonstances dans lesquelles ils se produisent. Qui s’est soucié de cette femme parvenue au terme de son existence, d’un âge très avancé, évidemment affaiblie, qui ne réclame rien de plus, dans un ultime filet de voix, que la possibilité d’uriner, et que l’on retrouve morte et inondée lorsqu’on se penche sur son brancard, à l’exact emplacement où elle fut déposée quelques heures plus tôt par un ambulancier. Des cas comme celui-ci sont quotidiens.

Retenons alors qu’il n’existe pas d’offre de soins réels, et surtout pas palliative, pour ceux qui rejoignent l’hôpital au seuil de leur mort. Nul ne peut plaider le manque de moyens palliatifs, car le mourant déjà à l’agonie qui arrive aux urgences n’intéresse pas ces services qui affirment ne pas être une médecine du mourant.

Un second contraste étonne. Que n’a-t-on pas entendu sur le caractère isolé du geste du médecin ? Le suicide de son père, médecin lui aussi, a suscité le doute sur son propre équilibre psychologique et sa compétence de médecin. En même temps, plusieurs centaines de ses collègues se sont rassemblés dans le hall de l’hôpital de Bayonne pour lui apporter leur soutien. Et les familles concernées par la mort d’un des leurs n’ont toujours pas porté plainte.

Que faut-il penser ? La justice le dira. Admettons malgré tout la faiblesse de l’argument de l’acte irraisonné, voire de la manifestation d’une pathologie souterraine ou de la transcription médicale d’un rapport personnel à la mort. La spontanéité avec laquelle diverses manifestations et pétitions de soutien à l’urgentiste ont fleuri détruit plus encore l’impression d’une hérésie. Le soupçon du désordre psychologique nous rappelle que c’est toujours le cas pour ceux qui envisagent de se soustraire à l’agonie, ce temps de la mort que les soins palliatifs réhabilitent.

Pourquoi soupçonner d’intentions mortifères celui qui envisage le décès d’un être qu’il aime profondément, ou pourquoi traiter de suicidaire le candidat à la dispense de l’agonie ? Le silence des familles de Bayonne demeure sur ce point bien troublant. Supposons qu’elles entretiennent leur paix personnelle du travail de deuil qui était à l’œuvre. Mais à quelles conditions favorise-t-on le deuil de ceux qu’on laisse derrière soi au moment de mourir ? Et qu’y peut l’hôpital puisque c’est dans ses bras que nous mourons presque tous ?

Sur ce point, les soins palliatifs ont d’évidence une réponse défaillante qui promeut la culture de l’agonie à laquelle n’adhèrent pas les Français qui en financent pourtant l’activité.

Dans l’affaire de Bayonne, un troisième contraste interroge. Pourquoi les premières interventions politiques du gouvernement n’incitent-elles à ne parler que d’euthanasie, pour en condamner précipitamment la pratique avant que l’on sache très précisément ce qui s’est passé, sans plus parler de la fin de vie alors que c’est aussi la question ? Comment meurt-on en France lorsqu’on est orienté vers des services d’urgence à la toute fin de sa vie ? Parlons de l’euthanasie après l’élection présidentielle, propose Jean Leonetti, actuel ministre des Affaires européennes. C’est à n’y rien comprendre. Que n’a-t-on pas organisé ce débat avant et pourquoi pas maintenant puisque des candidats ont déjà fait des propositions sur ce sujet ?

Ces incohérences s’expliquent si l’on admet que le masque tombe. La réalité est que la loi Leonetti sur la fin de la vie est devenue le protocole Leonetti d’arrêt de vie. On ne peut s’entendre sur sa mort avec un médecin que s’il pratique le «laisser mourir». Avec ce cadre juridique devenu protocole de médecine depuis peu, il arrive qu’on arrête l’alimentation et l’hydratation de grands prématurés de moins d’un kilogramme.

Le protocole Leonetti (arrêt de l’alimentation et de l’hydratation) s’applique aussi à des patients atteints d’une pathologie évolutive qui sont parvenus au bout de leur lutte personnelle et qui réclament que «cela cesse», ne souhaitant pas voir la maladie les «dévorer», selon leurs propos que j’ai recueillis dans un service de soins palliatifs. Ce protocole est-il appelé à s’étendre à des vieillards à l’agonie dont le corps ne s’éteint pas ?

On doit, c’est une évidence, faire preuve d’humanité envers ceux qui ont lutté contre la maladie et la mort, et envers leurs proches. Cette humanité, n’est-on pas en droit d’espérer qu’elle offre un accompagnement vers la fin de vie qui soit autre chose qu’une proposition d’affamer et d’assoiffer jusqu’à ce que mort s’ensuive ?

Ayant compris l’équation de la mort à l’hôpital, nombre de vieillards ou de malades hésitent désormais à s’engager dans des soins dont ils savent qu’ils ne sortiront plus ou, à l’inverse, s’obstinent à en recevoir plus encore, mais en espérant finalement mourir de l’effet secondaire ou délétère de l’un d’entre eux. Pour beaucoup, mieux vaut mourir aux urgences qu’au terme d’une agonie dont ils ne veulent pas.