blogspot counter

Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

mercredi 29 juin 2011

Psychiatrie : un lourd transfert sur les familles



La réforme de la loi sur les soins sans consentement innove en obligeant un malade à se soigner en dehors de l'hôpital. Ce qui n'est pas sans conséquence sur la responsabilité sanitaire et sociale des familles, analyse Hélène Davtian, psychologue clinicienne et thérapeute familiale.

puceinvite.jpg
Lors des débats autour de la révision de la loi de 90, la question de ses effets sur la dynamique familiale a été peu évoquée. Dans le prolongement du travail que j'ai mené autour de la prise en compte de l'entourage des patients en psychiatrie et en particulier de leur entourage jeune voici quelques éléments de réflexion.


Tout d'abord il ne faut pas nier la dimension purement économique de cette approche déjà à l'œuvre dans d'autres pathologies (cancer, sclérose en plaques, AVC,..). Le basculement des soins de l'hôpital vers la cité, et plus précisément vers l'entourage familial, est une tendance forte dans lequel s'inscrit cette loi qui acte que les familles peuvent être une alternative à l'hôpital psychiatrique. La charge des familles en psychiatrie n'était-elle pas déjà suffisante ?


Les temps d'hospitalisation du patient représentaient pour les familles un temps de récupération et de répit où elles pouvaient être un peu attentives à leurs besoins et en particulier à ceux de l'entourage jeune ; avec cette loi, ce temps si précieux pour l'équilibre de chacun sera encore rogné. Et l'on semble oublier que ce temps de récupération des familles, après le stress intense vécu lors de la montée de la crise, est essentiel pour le patient lui-même. De nombreuses études (Julian Leff en particulier) ont établi une corrélation montrant que plus le niveau de stress était important dans la famille, plus le taux de rechutes était important pour le patient. Donc l'intérêt porté à l'entourage est aussi un intérêt porté au malade.


Concernant les familles en psychiatrie, l'augmentation de la charge sera de plus majorée par le fait qu'on attendra d'elles de gérer l'ordre public. En effet, si un malade commet un délit alors qu'il est en soin ambulatoire sans consentement chez ses parents, vers qui se tournera la victime pour demander justice ? Qui sera accusé de ne pas avoir alerté assez tôt, de ne pas avoir suffisamment surveillé les allées et venues du malade, voire de l'avoir laissé sortir ? L'Etat se dédouane des risques sécuritaires sur les familles alors qu'il rogne sans cesse sur les budgets de suivi et de soin aux malades et qu'il ne soutient pas les projets d'accompagnement des familles.

Sur le plan de l'organisation des soins ambulatoires sans consentement, les choses restent floues sur le qui fait quoi. Est-ce que ce sera aux membres de l'entourage de surveiller les entrées et sorties du malade ? La famille sera-t-elle placée dans un rôle de surveillant de son proche ? Sera-t-elle auxiliaire des soins (distribution des médicaments, hygiène corporelle,...), doit-elle assurer le gîte et le couvert (fonction qu'assure l'hôpital) ? Si le malade a un logement indépendant, attend-t-on de son entourage une action quelconque ?

En bref, qu'est-ce qui reste à la charge des soignants et qu'est-ce qui est à la charge de l'entourage ? Si l'on pousse plus loin : les aidants familiaux pourront-ils prétendre à une rétribution de leurs services (ce pour quoi milite l'association des aidants familiaux)? On peut imaginer que ceci aura forcément des répercussions sur les relations et le climat familial.


Pour en revenir précisément à la question du sans-consentement, on sait que majoritairement ces situations de danger pour autrui se jouent en direction de l'entourage proche et familial. Or, on légifère sur des événements intervenus dans l'espace public (Grenoble...), alors que la question du danger sur autrui dans la psychose relève le plus souvent de la sphère intime : résultat, on renvoie les malades dans le lieu où ils sont le plus susceptibles d'être violents. Il y a donc un paradoxe que beaucoup de familles que j'ai suivies vivent déjà « votre fils est trop malade pour notre structure, on ne peut pas le gérer, reprenez-le » ; « votre frère est trop dangereux, on n'a pas les moyens de le prendre en charge ». En dix ans de travail auprès des familles, j'ai en tête de nombreux drames dans les familles.

Ce paradoxe vient aussi d'une méconnaissance de la nature de cette violence par ceux qui légifèrent. Tant que cette violence sera traitée comme un acte délinquant à éradiquer, les réponses seront absurdes et inefficaces.


Ce paradoxe en effet est encore plus flagrant en direction de l'entourage jeune des patients (enfants et frères et sœurs). Alors que, du fait de leur jeune âge, ils n'ont pas la possibilité de visiter leur proche malade quand il est hospitalisé, les soins ambulatoires sans consentement feront qu'à l'extrême ils seront dans un contact quotidien avec lui au moment où ses symptômes et son angoisse le débordent et sont projetés sur son entourage. Ils étaient tenus à l'écart, ils seront inclus : deux positions tout aussi excessives et dangereuses.

Il faudrait au minimum exiger, avant de prendre une décision de soin en ambulatoire sans consentement, que l'on prenne en compte la configuration familiale et que l'on travaille avec tous les membres de la famille qui vivent sous le même toit (et pas uniquement ceux qui sont en position adultes de décideurs et d'interlocuteurs).

C'est à la société et aux adultes de protéger les jeunes. Cette loi renforce leur proximité avec la souffrance psychotique et nie ses retentissements sur la santé et l'équilibre de ces jeunes. En évacuant cette question, elle va totalement à l'encontre du travail que l'Unafam avait amorcé en direction des jeunes proches.


Enfin, concernant le climat familial, on peut se demander sur qui porte le non-consentement, sur le patient ou sur ses proches, et qu'en est-il si un des proches vivant sous le même toit ne se sent pas en capacité d'assurer cette charge, est-ce à lui de partir ? (C'est ce que font beaucoup de frères et sœurs: « je lui ai laissé ma famille et moi je n'en ai plus », ai-je entendu). Par ailleurs mettre l'entourage et notamment les jeunes en position de choisir peut les plonger dans des conflits de loyauté vis-à-vis de leur proche malade qui seront très couteux psychiquement et affectivement: « si tu refuses, à cause de toi je serai obligé de rester à l'hôpital ».

Mais surtout on sait que pour une personne souffrant de troubles psychotiques, toute intrusion dans son intimité est une violence. Violence qui peut en engendrer d'autres et le plus souvent envers elle-même. Leur seul refuge est leur chambre, leur studio. Faire de leur seul lieu d'intimité un lieu possible de privation de liberté me semble éthiquement contestable et représente une solution de court terme qui se paiera dans le long terme. Que leur restera-t-il comme espace de liberté : la rue, l'errance ?

On peut anticiper une augmentation du recours au sans consentement, car à quoi bon s'en priver alors que c'est si simple et que ça dédouane les soignants mais bien plus la société et les politiques.
Certes par cette loi les familles peuvent se sentir reconnues, mais à quoi bon être reconnu si le renforcement de la charge augmente et si cela induit une instrumentalisation des aidants familiaux?

Par ailleurs, quelles contre parties seront exigées à l'aide fournie gratuitement par les familles (d'ailleurs cette aide n'a-t-elle jamais été évaluée depuis la réduction des lits en psychiatrie : De 300 jours par an en moyenne par patient à moins de 30 jours de soin en institution actuellement?) ? Accès gratuit à des groupes de parole? Psychothérapie de soutien (comme dans certains réseaux ville hôpital pour le cancer)? Appui professionnel pour soutenir les familles dans les démarches d'hospitalisation en cas de crise comme le propose la Ffapamm, (équivalent de l'Unafam au Québec) ? Ou juste des ateliers d'entraide fonctionnant sur la bonne volonté d'une poignée de bénévoles, mais qui permettent à l'état de dire: « on vous a aidé, maintenant débrouillez-vous ».

Il faudrait arrêter de banaliser les troubles psychotiques en niant leur dimension projective. En cette période où l'on fait face aux effets d'une crise nucléaire majeure, je dirai que le trouble psychotique a ceci de bien particulier qu'il émet des radiations sur l'entourage, parfois sans laisser de traces apparentes. « J'ai absorbé ses délires comme une éponge », « j'étais la confidente de tous ses délires » sont des phrases qui revenaient constamment dans mon travail auprès des jeunes proches. Toutes les équipes soignantes en psychiatrie le savent, le Dr Racamier dans sa formation aux équipes le disaient: « celui qui côtoie le malade peut avoir la sensation de vivre en perpétuel déséquilibre, dans l'incertitude, l'étrangeté, la perplexité, de ne rien comprendre, d'être dans le flou et la confusion ». On ne peut pas exposer les familles et notamment les jeunes mineurs de l'entourage du malade sans soutien, sans information spécifique, sans temps de répit.

Le plus étonnant, c'est que le pendant de cette banalisation pour les familles est la dramatisation de chaque fait divers impliquant une personne souffrant de troubles psychotiques. Comme me disait un garçon de 13 ans dont le père souffrait de troubles bipolaires sévères « pourquoi il existe des cellules psychologiques quand il y a un accident et pour moi il n'y a rien! ».

Banalisation à l'intérieur des familles, dramatisation sur l'espace public : il faut sortir de ces positions extrêmes et infondées et arrêter de légiférer sur l'émotion. Il faut prendre toutes les données du problème, être attentifs à toutes les personnes impliquées dans la situation. Rassembler et non pas diviser.

Hélène Davtian, psychologue clinicienne et thérapeute familiale.
A été pendant 10 ans au siège national de l'Unafam
chargée du développement de l'aide aux familles en psychiatrie.

Essai : La rue des précaires, Soins psychiques et précarités de Jean-Pierre Martin

9782749214153.jpg

La « souffrance psychique » des « exclus » est devenu un sujet sur lequel se penche la compassion médiatique. Mais c’est aussi une réalité que côtoient quotidiennement travailleurs sociaux ou professionnels de santé engagés dans l’aide ou le soin à ces hommes et ces femmes « en trop ».

À partir de son expérience de psychiatre de service public et de militant, Jean-Pierre Martin montre les dangers d’une approche de l’errance qui la transformerait en « trouble du comportement » relevant de réponses normatives, de traitements ou de soins imposés.

C’est pourtant dans cette voie que sont aujourd’hui engagés la psychiatrie et le travail social, sous l’impulsion des politiques libérales qui opèrent le basculement de l’État « social » à l’État « pénal ». C’est aussi celle qui menace « l’humanitaire ».

Le livre fournit une analyse précise des effets désastreux, pour les pratiques d’aides et de soin, de la soumission des institutions sanitaires et sociales au « management » et aux politiques sécuritaires.
Il montre également les alternatives qui ont pu se construire, notamment avec les équipes « psychiatrie précarité », et leur démarche d’aller vers ceux qui ne demandent rien. Le soin commence par être un « prendre soin », de personnes qu’il ne s’agit pas d’invalider mais de respecter.

Ce livre, au-delà des professionnels de la psychiatrie et de l’action sociale, concerne les militants intéressés par la dimension subjective de la misère et de la précarité.

Jean-Claude Delavigne

Érès

Au ministère de la Santé, on ne remplace pas les fonctionnaires qui partent

La règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux a été pratiquement respectée en 2010 (48,4% selon le rapport du député Gilles Carrez. Cent mille fonctionnaires sont ainsi partis sur la période 2009-2011. En 2012, 30.401 suppressions de poste sont prévues. Le document qu’à rédigé le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée Natiuonale pointe toutefois «des différences entre ministères assez surprenantes». Le taux de remplacement varie ainsi de plus de 100% de partants non remplacés aux ministère des Affaires étrangères et de la Santé à 21% à la Culture et 23% dans les services du Premier ministre. Le rapport Carrez montre que l’économie budgétaire est limitée pour l’Etat, du fait notamment des primes versées aux agents restants. Et il s'étonne que paradoxalement, les ministères pour lesquels la règle de non remplacement a été la plus stricte (Santé, Affaires étrangères ou Agriculture), sont aussi ceux pour lesquels les mesures catégorielles bénéficiant aux agents restants ont été les plus faibles.

“A 30 kg, l’urgence est médicale avant d’être psychologique” : Marcel Rufo, pédopsychiatre, spécialiste de l’adolescence

Marcel Rufo, pédopsychiatre spécialiste de l'adolescence
Marcel Rufo, pédopsychiatre spécialiste de l'adolescence SIPA

FRANCE-SOIR Peut-on faire une erreur de diagnostic sur une anorexique qui se présente aux urgences ?

MARCEL RUFO Ça me semble difficile. Quand une jeune fille pèse 30 kg et n’a pas de cancer, il n’y a pas d’autre option. Le problème est ailleurs : paradoxalement, les cas extrêmes d’anorexie suscitent un rejet de la part de beaucoup de médecins.

F.-S. Pourquoi ?

M. R. L’anorexie est le seul cas ou le patient aime sa maladie. Les jeunes filles, souvent, ne veulent pas se soigner et sont capables de toutes les manipulations pour tromper les médecins. Dans n’importe quelle autre maladie, le patient collabore. Trop souvent, les anorexiques sont considérées comme responsables de ce qui leur arrive. Comme si elles avaient choisi de ne plus manger. Hélas, la maladie est plus forte qu’elles. Il ne faut pas leur en vouloir de leurs stratégies d’évitement, qui font partie intégrante des troubles de l’alimentation.

F.-S. Quelles sont-elles, ces stratégies ?

M. R. Elles cachent les aliments, font semblant de manger, parlent beaucoup de nourriture pour tromper leurs interlocuteurs. Elles promettent, manipulent… Le mécanisme fonctionne malgré elles. Et lorsque la manipulation échoue, elles s’effondrent. Tant qu’elles manipulent, elles sont vivantes. A l’hôpital, par exemple, au moment de la pesée, certaines boivent deux ou trois litres d’eau pour augmenter temporairement leur poids. Il faut penser à surveiller le ballonnement de leur ventre. Avec l’anorexie, il faut être extrêmement vigilant à tout. Et, surtout, il faut soigner la maladie, mais ne pas attaquer l’anorexique.

F.-S. Aurélie est morte d’un arrêt cardiaque. Est-ce une cause fréquente de décès chez ces patientes ?

M. R. Les décès représentent entre 5 et 22 % des anorexiques. Les autres guérissent, même si 40 % d’entre elles rechutent avant de guérir totalement. Plusieurs causes médicales sont responsables des décès, comme un affaiblissement de la résistance de l’organisme aux infections pulmonaires par exemple. Les troubles cardiaques interviennent souvent lorsque les jeunes filles se font vomir. Le cœur est un muscle, qui peut donc maigrir et rétrécir. De plus, ces patientes manquent de potassium, qui alimente le moteur électrique cardiaque. Le rythme cardiaque se ralentit. Les vomissements forcent alors sur un cœur épuisé.

F.-S. Que devrait faire un service d’urgence non spécialisé lorsqu’il voit arriver une jeune fille autour de 30 kg ? Certains les transfèrent immédiatement en psychiatrie…

M. R. Dans ces cas-là, l’urgence est médicale avant d’être psychologique. Et c’est un psy qui vous le dit ! La seule chose à faire est de les envoyer en réanimation, de leur poser une sonde pour les alimenter et de surveiller leurs paramètres organiques. Mais cela implique de les accueillir sans peur, et avec bienveillance. Ensuite, quand elles ont repris 3 kg, on peut les transférer dans une unité spécialisée qui offre une prise en charge globale, tant sur le plan psychologique, qu’endocrinologique. Elles auront alors la force psychologique pour l’affronter.

Lire la suite ici

mardi 28 juin 2011

Le gène de l'épilepsie identifié

LEMONDE.FR avec AFP | 27.06.11

La double hélice de l'ADN.
La double hélice de l'ADN.AFP/HO

Une équipe de chercheurs américains et marseillais ont identifié un gène clé dans le mécanisme de transformation d'un cerveau sain en cerveau épileptique, a annoncé l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) dans un communiqué.
Menés par le neurobiologiste Christophe Bernard, directeur de recherche Inserm à l'hôpital de la Timone, en collaboration avec un laboratoire californien, les travaux ont porté sur sa forme la plus fréquente chez l'adulte : l'épilepsie du lobe frontal (ELT), qui résiste à tout traitement pharmacologique dans 30 % des cas.

L'étude affirme que la neutralisation de ce gène chez des rats mène à des "bénéfices thérapeutiques immédiats". Cette découverte ouvre la voie à des traitements préventifs chez les personnes risquant de développer une épilepsie à la suite d'une affection du cerveau de type méningite ou traumatisme crânien.
 Le Magazine Littéraire
24/06/2011  |  Entretien Annie Le Brun : « L'actuelle bonne conscience se veut à la fois subversive et normative » - Annie Le Brun ©Frédéric Poletti / Opale - ©

Annie Le Brun : « L'actuelle bonne conscience se veut à la fois subversive et normative »

24/06/2011

Entretien

Poétesse aux accents surréalistes, figure intellectuelle à l’esprit incisif et polémique, exégète notamment de Sade, Alfred Jarry et Raymond Roussel, Annie Le Brun n’a de cesse d’explorer les marges comme d’autres sondent les lignes de faille. Son dernier livre, Ailleurs et autrement (paru récemment chez Gallimard), revient, au fil de chroniques publiées dans La Quinzaine littéraire durant la dernière décennie, sur ses engagements littéraires et idéologiques. L’occasion d’une rencontre avec l’auteur des Châteaux de la subversion.

Bon nombre des textes d’Ailleurs et autrement s’inscrivent dans la dénonciation d’une époque de la «fausse conscience» à la «subversion subventionnée», une période où la poésie même paraît menacée. Dans ce contexte, faut-il selon vous repenser le lien historique qui l’unit à la Résistance ?
Annie Le Brun. Dans ce livre, il n’y a rien de délibéré concernant l’articulation dont vous parlez puisqu’il s’agit de la réunion d’articles portant sur les sujets les plus divers mais dont la succession chronologique sur une dizaine d’années n’en rend pas moins compte d’une critique se développant à l’encontre  d’une sorte de simulation critique qui est désormais une posture comme une autre. Ainsi me paraît-il insupportable qu’à tout propos on parle de «Résistance», en se référant implicitement ou non à l’époque de la Seconde Guerre mondiale. C’est encore une de ces approximations, au bout du compte monstrueuses, qui en dit long sur la fausse conscience devenue norme. Et, à l’évidence, la littérature en participe, sans parler de la mômerie intitulée «Printemps des poètes», dès lors qu’elle ne se propose pas d’abord d’échapper à la confusion, mieux de la combattre en se tournant vers de tout autres horizons. 

Lire la suite ici

Un lycée de ZEP, de l’ombre à la lumière

Ou les vertus d'un projet pédagogique en zone sensible

Dans la grisaille de la plus longue soirée de l'été, des étoiles scintillent sur la façade du lycée Romain Rolland, à Goussainville. Au premier plan, des tables sont dressées comme pour une fête de village. L’établissement inaugure l’installation qui illuminera désormais sa cour d’honneur : une œuvre pérenne réalisée par une classe de première professionnelle sous les auspices de l’artiste Yann Kersalé. C’est l’aboutissement d’une année de travail avec des lycéens réputés " difficiles ". Une manière aussi pour le lycée de faire oublier son allure de bunker et son image d’établissement violent héritée d’une décennie mouvementée des années 90 au début des années 2000.

Les professeurs et les techniciens qui ont porté le projet ont travaillé jusqu’à la dernière minute. Yann Kersalé a fait un dernier tour d'inspection dans la cour. Ils sont tous heureux, soulagés et presque surpris d’avoir achevé l’entreprise à temps. Adrien, qui a participé au projet, admet qu’il n’a jamais bien cru en cette histoire. Comme beaucoup de ses camarades, il s’en était un peu vite désintéressé. Ce soir, il semble avoir changé d’avis.

Répétition dans l'atrium (photo : Marie Augustin)
Répétition dans l'atrium (photo : Marie Augustin)
Tous les élèves de la classe ne sont pas venus. Mais la dizaine de garçons présents prennent la cérémonie très au sérieux. Ils ont soigné leur look, enfilé le costume. Et avant de monter sur l’estrade pour expliquer leur œuvre devant une petite centaine de personnes, Victor, Jordan et Bokari ont tenu à répéter le discours préparé avec leur professeur de français, Mlle Humeau. L’enseignante a prolongé les vertus du projet pédagogique, dans l’atrium du lycée, où les élèves ont travaillé leur diction et leur posture pour la scène.

Lire la suite ici

vendredi 24 juin 2011

Désobéir en psychiatrie

Les Pieds sur terre
25.05.2011

par Sonia Kronlund
Le site de l'émission
Emission Les pieds sur terre
du lundi au vendredi de 13h30 à 14h
Ecoutez l'émission 28 minutes

Les règles sont édictées pour le bien commun, mais ils les contournent au nom de ce même bien commun. Deux jeunes psychiatres nous donnent leurs interprétations de ces contradictions, et révèlent quelques unes de leurs techniques de survie en milieu psychiatrique. 

Reportage : Pauline Maucort
Réalisation : Nicolas Berger

A écouter ici


Réforme de l'hospitalisation sans consentement : "étonnement et profonde inquiétude"


"J'aimerais tellement qu'on comprenne la signification de ce que je dis : ça peut arriver à tout le monde. Et c'est scandaleux que des gens soient malades et qu'en plus, comme cela existait, chers amis, il y a encore quelques années pour les cancers, non seulement le malade souffrait mais en plus il devait s'en excuser, le cacher. C'est inadmissible. Ça peut arriver à tout le monde : d'être victime d'une dépression, de devoir avoir à faire à un psychiatre. Tout ceci, la société française doit ouvrir les yeux et son cœur sur cette maladie."

Voilà ce que nous disait le 21 octobre 2009, le président de la République qui voulait  honorer à travers nous les personnes concernées par cette discipline médicale.


Élus par nos pairs, usagers et médecins, nous travaillons depuis douze ans ensemble à améliorer le sort des personnes souffrant de troubles psychiques dans notre pays. Ce partenariat fructueux nous a ainsi permis d'élaborer la charte de l'usager en santé mentale cosignée en 2000 avec la ministre de la santé.

Nous avons contribué à améliorer les conditions d'accueil, à promouvoir des soins somatiques adaptés à des personnes dont le corps est souvent négligé et source d'angoisse, à définir des critères d'évaluation de la qualité des soins et des modalités de financement.


Nous avons aussi abordé sans angélisme les questions de dangerosité et de sécurité liées à la maladie, développé "des groupes d'entre aide mutuelle" pour aider les patients à sortir de leur isolement et surtout inscrit notre démarche dans un dialogue constant "usagers-professionnels" à tous les niveaux institutionnels.


C'est dire, si nous avons été sensibles aux paroles prononcées ce 21 octobre 2009 par la plus haute autorité de l'Etat demandant à la société française "d'ouvrir ses yeux et son cœur sur cette maladie". Oui, "ça peut arriver à tout le monde", et tu sais au fond de toi, cher concitoyen, que toi aussi, tu as failli basculer dans l'angoisse ou la dépression, ces mondes où la passion vient submerger la raison, et où l'homme se sent perdu dans une indicible souffrance.


Et, parfois, cette souffrance est si intense que la maladie devient comme l'un de ces cauchemars où l'on essaie d'appeler au secours sans y parvenir ; ou si l'on y parvient, sans personne pour entendre. A cette situation de vulnérabilité extrême, qui ne permet plus de demander de l'aide, toute société civilisée doit s'efforcer de répondre par des soins particuliers dans la mesure où ils vont devoir être momentanément pratiqués contre le gré de la personne concernée.


Alors que la loi du 4 mars 2002 insiste sur l'importance du consentement éclairé du patient qui prend les décisions concernant sa santé, tu comprendras, cher concitoyen, que l'on touche là au cœur de métier du psychiatre. Priver une personne de sa liberté individuelle n'est légitime que si le soin est nécessaire et indispensable pour restaurer chez elle les espaces de liberté psychique invalidés par la maladie.


Et ce n'est pas une situation figée, il est crucial de le comprendre. La nécessité d'un soin sans consentement doit se réévaluer en permanence, dans une perspective évolutive. La démarche soignante est toujours guidée par ce souci constant de la recherche d'une alliance thérapeutique. A terme, tout doit tendre à permettre la levée de la contrainte, pour un patient qui fait désormais confiance à l'équipe qui le prend en charge. Si nous savons que la maladie peut porter la violence sur soi ou sur autrui, surtout lorsqu'elle n'est pas soignée, nous savons aussi qu'il n'y a pas de malades violents mais des moments de violence dans des périodes critiques de l'évolution de leur pathologie.


ÉTONNEMENT ET PROFONDE INQUIÉTUDE


La loi votée par nos parlementaires touche à l'organisation des soins dans cette situation extrême. Le sujet est grave et il est temps pour nous, cher concitoyen, de te faire part de notre étonnement et surtout de notre profonde inquiétude.


Étonnement, car nous avons déjà exprimé, dans un communiqué commun aux usagers et aux professionnels, la nécessité de faire évoluer le texte proposé aux parlementaires. Madame Nora Berra, secrétaire d'Etat à la santé, après avoir souligné lors de son audition publique au Sénat du 13 avril le caractère constructif de nos demandes, n'a paradoxalement soutenu aucune de nos propositions.


Étonnement qui confine à la stupéfaction, devant les propos de la même ministre se prévalant à plusieurs reprises de notre adhésion au projet de loi (comme lors de l'émission "Du grain à moudre" du 9 mai, la veille de l'examen de la loi au Sénat), dans une lecture pour le moins très personnelle de notre communiqué auquel il suffit de se référer pour mesurer les réserves majeures qui y sont formulées.


Ainsi, comment peut-on qualifier de soutien au projet de loi des mises en garde telles que : "la loi, si elle était promulguée en l'état, serait inapplicable dans un grand nombre d'établissements, tant par le juge des libertés et de la détention que par les directeurs des hôpitaux concernés, ou les psychiatres hospitaliers" ?

Profonde inquiétude car l'absence totale de prise en compte de mesures pragmatiques de bon sens demandées par les quinze signataires, annonce sans nul doute le désordre dans un domaine dont chacun sait qu'il n'est pas sans risque au regard de la population concernée, population dont les soins requièrent avant tout calme et sérénité.

A titre d'exemple, il faut que tu saches, cher concitoyen, qu'en cas de divergence entre la prescription médicale et la décision administrative du préfet, notre demande de recours systématique au juge des libertés et de la détention n'a pas été reprise dans la loi. Si bien qu'en France, dans les semaines qui viennent, une personne (toi ou un de tes proches peut-être) pourra rester hospitalisée à la demande du préfet alors que son état de santé ne le nécessite plus.

Nous ne pouvons accepter, comme tous les usagers et professionnels de la psychiatrie, que dans notre pays, un citoyen soit maintenu à l'hôpital pour d'autres raisons que pour y être soigné. La France du XXIe siècle ne peut tolérer le retour à la lettre de cachet pour les malades psychiques !

Voilà une loi qui n'envisage l'usager en santé mentale qu'en termes "d'individu dangereux" que l'on prétend contrôler par une multiplication de procédures d'expertises. Les examens réitérés n'ont pas pour objet de traiter, mais d'évaluer, sans tenir compte de l'effraction dans l'intimité psychique. On oublie qu'il s'agit avant tout d'une personne dont il faut soulager la souffrance par des soins. On oublie que cette personne, dans l'immense majorité des cas, va peu à peu voir son état s'améliorer, comprendre qu'elle a besoin de soins et les accepter. Ce que l'on imposera à une personne profondément dépressive, accepterait-on de l'imposer, par exemple à une femme atteinte d'une maladie physique ? Imagine-t-on cinq à six examens imposés à l'intime du corps en quelques jours, sans objectif thérapeutique ?

C'est pourquoi la loi ne peut pas dissocier l'organisation des soins sans consentement de celle des soins demandés par le patient, deux registres thérapeutiques qui doivent être envisagés comme deux moments du parcours de soins d'un même patient. C'est bien d'une loi globale de psychiatrie et santé mentale dont notre pays a besoin. Cette loi, promise, le 8 janvier 2009 par le président de la République aux représentants des usagers et professionnels, et dont la nécessité a été soulignée par plusieurs rapports (Larcher, Couty, Milon) doit s'appuyer sur ce qui fait la spécificité de la psychiatrie française, et que nous savons reconnue hors de nos frontières, le "secteur" qui permet à tout patient sur le territoire l'accès à des soins de proximité.


Surtout il faut que tu saches, cher concitoyen, que l'un des grands acquis de la psychiatrie moderne est fondé sur la persistance, même chez la personne la plus malade, d'une partie saine sur laquelle doit se construire la démarche de soins : alliance avec cette partie saine contre la maladie qui en tissant un climat de confiance constitue, comme tu peux le comprendre, le meilleur levier thérapeutique.


Il se trouve qu'il y a précisément 500 ans, en 1511 était publié L’Éloge de la Folie, best-seller de l'époque écrit par Erasme, figure emblématique de l'humanisme à la Renaissance qui proclame que la folie est l'apanage de l'humanité. Il est si vrai que le degré de civilisation d'une société se traduit toujours par la façon dont elle traite ses fous.


500 ans après Erasme, 200 ans après Pinel et Pussin, qui libérèrent les aliénés de leurs chaînes, cinquante ans après la création du secteur, de quelle loi notre pays veut-il se doter pour la psychiatrie ?

Cher concitoyen, quelle psychiatrie veux tu pour toi et pour tes proches ?



La Fnapsy est la Fédération nationale des associations d'usagers en psychiatrie et la CME-CHS est la Conférence nationale des présidents des commissions médicales d'établissement des centres hospitaliers spécialisés.

Claude Finkelstein, présidente de la Fnapsy, et Yvan Halimi, président de la CME-CHS





Le projet de réforme de l'hospitalisation sans consentement s'expose aux dérives sécuritaires
08.06.11

Un projet de loi destiné à réformer les hospitalisations sans consentement en psychiatrie est actuellement en cours de discussion au Parlement. Ce projet déplace les équilibres sociaux et civils entre respect des libertés et droit à la protection.

D'après le droit encore en vigueur, tout citoyen qui, à un moment donné, n'est plus capable de décider pour lui-même et dont l'état de santé psychique nécessite des soins intensifs, peut se voir hospitalisé contre son gré après avis médical, soit à l'initiative d'un tiers, soit à l'initiative du maire ou du préfet. Il pourrait désormais, selon le projet de loi actuellement débattu, faire l'objet d'une obligation de soin psychiatrique en ambulatoire, après une hospitalisation. Ces soins sans consentement consisteraient, par exemple, en des consultations régulières mais aussi potentiellement en un traitement médicamenteux obligatoire.


Bien que la réforme des hospitalisations psychiatriques sans consentement soit souhaitée depuis des années, son sens politique actuel est associé à un climat sécuritaire que de nombreux professionnels critiquent, ainsi qu'à une batterie de mesures de surveillance et d'enfermement relativement récentes (plan de sécurisation des établissements, aménagement de nouvelles chambres d'isolement et d'unités d'hospitalisation fermées, création d'unités pour malades dits difficiles). Les associations d'usagers et de leurs proches ont une position plus réservée et concentrent leur attention sur le nouveau plan de santé mentale déjà annoncé.


Au-delà des critiques légitimes, la création de soins psychiatriques ambulatoires sans consentement offre l'opportunité de débattre d'enjeux à la fois thérapeutiques (quelle incidence sur l'accès aux soins ainsi que sur leur efficacité ?) et éthiques (s'est-on donné tous les moyens pour préserver l'autonomie des personnes ?).


L'ADHÉSION DE LA PERSONNE


Dans une perspective thérapeutique, le soin le plus efficace est celui qui est réalisé avec l'adhésion de la personne. Ce principe, qui doit être l'objectif de toute prise en charge, se traduit dans les politiques de santé mentale par la recherche de dispositifs qui limitent ou réduisent le recours à la contrainte et favorisent l'engagement de la personne. C'est d'ailleurs la situation de loin la plus commune en psychiatrie. Il y a déjà plusieurs décennies que la majorité des personnes suivies par les services de psychiatrie ne sont jamais hospitalisées et la plupart des personnes hospitalisées en psychiatrie le sont avec leur accord (87 % des admissions en hospitalisation complète sont libres en 2007).


Or on sait que l'organisation des soins joue un rôle essentiel dans le recours ou non à des mesures de soins sans consentement. Ainsi, aujourd'hui, de nombreux usages "détournés" de l'hospitalisation sans consentement pallient des lacunes plus générales : on hospitalise en psychiatrie une personne sur motif de trouble à l'ordre public parce que l'élu municipal est le seul à se mobiliser, dans l'urgence faute de médecin disponible pour signer un certificat, pour avoir une place à l'hôpital parce qu'on manque de lits ; ailleurs, on maintient un patient à l'hôpital faute de logement attribué, pour apaiser un temps des troubles du voisinage, etc. Les décisions d'hospitalisation sans consentement dépendent certes de l'offre de soins mais aussi pour une très grande part de ce qui s'organise en amont et en aval de l'hospitalisation : accessibilité des dispositifs d'urgences, possibilité de visites à domicile ponctuelles, intensives lors d'une crise ou régulières, articulation entre la médecine de ville et la médecine hospitalière, délais pour obtenir une consultation, offre de logement, accompagnement social, concertation locale entre usagers et professionnels, entre professionnels du sanitaire et du social, etc.


Tout effort de réduction de la contrainte doit donc porter sur les éléments d'un système favorisant l'adhésion aux soins et non uniquement sur les mesures sans consentement. Le législateur devrait en conséquence se concentrer sur les moyens de garantir à toute la population des services et lieux de soins permanents dénués de stigmates. Le dispositif d'obligation de soins proposé peut-il favoriser une réorganisation des soins qui permette de se passer de la contrainte à terme, en évitant notamment des hospitalisations sous contrainte potentiellement traumatisantes ? Ne risque-t-il pas d'étendre au contraire le recours à la contrainte ? Un tel dispositif pourrait en effet créer l'illusion qu'il est possible de supprimer le risque de rechute et de faire l'économie de la recherche de l'accord de la personne aux soins, rendant inapplicable la perspective de soins négociés.


Les expériences étrangères en matière de soins sans consentement sont instructives. Elles montrent d'abord la nécessité de préciser comment la mesure s'articule au dispositif de prise en charge. S'agit-il de décider de soins sans consentement comme une alternative directe à une hospitalisation ? De prévenir une rechute, dès que les professionnels ou les proches en ont l'intuition ? De s'assurer de la poursuite du suivi et du traitement au moment de la sortie d'hospitalisation, qu'elle soit libre ou sans consentement ? L'obligation constitue alors le dernier recours dans un ensemble de mesures de "prises en charge assistées" dont le degré de formalisation de la contrainte varie (directives anticipées, soins ambulatoires "renforcés" ou "intensifs", mesures de tutelle et de curatelle, sorties conditionnelles, tribunaux de santé mentale) et qui visent à engager dans les soins les personnes ayant des troubles mentaux graves ne se reconnaissant pas malades. Elles montrent ensuite que l'intérêt et l'efficacité éventuelle d'une telle mesure ne peut être dissociée de la qualité et de l'intensité du suivi dispensé.


LA CONTINUITÉ DANS LES SOINS PSYCHIATRIQUES


Surtout, la réforme ne peut avoir pour enjeu principal un risque qui n'est présenté que par quelques personnes et seulement à certains moments de leur vie, alors même qu'elle concernera bien au-delà d'eux un très grand nombre de personnes prises en charge. La préoccupation du législateur devrait rejoindre celle du professionnel de santé, du proche ou de l'usager, à savoir le développement de l'accès et de la continuité dans les soins psychiatriques, qui ne se réduisent pas à un traitement médicamenteux. Or, sur cette question, autrement complexe et prégnante en psychiatrie, l'obligation de soin s'impose autant sur la personne suivie que sur les professionnels tenus d'offrir de tels soins.


En l'absence d'une telle réflexion, il y a fort à parier que l'obligation de soins définie dans la nouvelle loi sera soit peu utilisée, comme on l'observe dans de nombreux exemples étrangers, soit utilisée comme un moyen de réduire la prise de risque des professionnels du soin ou des responsables administratifs, sans justification thérapeutique.


Dans une perspective éthique, la préservation de l'autonomie de la personne est un principe essentiel du soin, que la loi du 4 mars 2002 a voulu garantir : le consentement aux soins a été affirmé par l'égalité des citoyens devant le droit au refus de soins. La question se pose alors de savoir comment ce principe d'autonomie est conciliable avec le soin qu'une société doit à ses membres, notamment dans les moments où ils ne peuvent consentir (pour des personnes âgées démentes, dans le coma, atteintes de troubles psychiques sévères, etc.). Articuler ces impératifs implique de reconsidérer le cadre juridique du consentement des personnes. A quelles conditions peut-on obliger à des soins ?


Doit-on défendre un droit général au refus de soins ? En France, les seules mesures d'obligation de soin qui existent actuellement sont prises par le juge dans le cadre d'une procédure pénale. En revanche, il existe des formes juridiques qui prévoient l'acceptation de l'obligation de soin par anticipation, comme le mandat de protection futur instauré par la loi du 5 mars 2007 ou les directives anticipées prévues par la loi du 22 avril 2005.


Dans cette perspective, la mise en place d'un dispositif de soins ambulatoires obligatoire nécessite de penser le consentement dans une temporalité plus longue. Elle offre l'opportunité de dépasser une vision juridique minimaliste du consentement qui le localise dans un moment trop circonscrit, lors de la proposition de soin, juste avant le recours éventuel à la contrainte. Elle invite à inventer, à l'instar de ce qui se fait déjà dans certains pays, un cadre légal de soins obligatoires qui intègre la garantie des droits et englobe toutes les incapacités provisoires, les capacités partielles à consentir. Il est regrettable que le projet de loi actuel ne présente aucune prise en compte de ces enjeux.

En proposant la création d'une obligation de soin hors de tout contexte d'infraction, ce projet de loi ouvre un débat nécessaire sur les aménagements possibles du consentement aux soins et sur les obligations de protection. Faute de répondre aux exigences éthiques et thérapeutiques auxquels une politique envers des personnes vulnérables doit être soumise, le projet actuel s'expose à l'inefficacité, voire aux dérives sécuritaires et étouffe un débat qui commence tout juste à s'ouvrir.



Magali Coldefy
, géographe ;

Benoît Eyraud, sociologue ;
Aurélia Michel, historienne ;
Delphine Moreau, sociologue ;
Pauline Rhenter, politiste ;
Livia Velpry, sociologue.

des membres du collectif d'animation et de recherche interdisciplinaire en santé mentale (Carisme)



La chronique philo de Cynthia Fleury

L’appel, la suite

L’Appel des appels continue sa route. Initié, en janvier 2009, il poursuit sa succession de réappropriations. Le 18 juin dernier, c’était à Brest. Du cœur des métiers, les enseignants, les psychiatres, les psychanalystes, les policiers, les juges, les éducateurs, les journalistes, etc., se sont réunis pour refuser la transformation de l’homme en une série de fonctionnalités, qui confine au meurtre ordinaire de soi et de l’autre. Votre serviteur y était.

Sihem Souid et Gérard Gatineau ont dénoncé, dans leur atelier, la logique du chiffre et du faux rendement dans la police, soit le devenir quasi commercial de cette police, la mise en scène des perquisitions, la création des reconduites à la frontière pour faire grimper les statistiques, la banalisation des discriminations. Loin de mettre en accusation toute la police, Sihem Souid plaide, au contraire, en faveur de la création d’un comité éthique susceptible d’avoir et l’autorité et la légitimité pour réformer ce genre de comportements. 
On lui oppose le droit de réserve, en oubliant un peu vite que l’article 40 du Code de procédure pénale rappelle que « toute autorité constituée, tout officier public 
ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit 
est tenu d'en donner avis sans délai au procureur 
de la République et de transmettre à ce magistrat 
tous les renseignements, procès-verbaux et actes 
qui y sont relatifs ».

Roland Gori est revenu également sur le projet de loi sur les hospitalisations sans consentement 
en psychiatrie, permettant notamment les soins non consentis à domicile, 
qui est actuellement en examen en seconde lecture 
au Sénat. Le souci : ce dernier, proprement délétère 
et liberticide, est désireux de transformer la psychiatrie en dépistage et gestion des risques, bien loin 
de ses réalités initiales de soin et d’accompagnement des individus en grande difficulté.

Lire la suite ici

Réforme de la Psychiatrie : Nous exigeons toujours le retrait du projet de loi (USP)

 Alors que Sénat débattait en deuxième lecture du Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge, à Paris et dans de nombreuses régions des rassemblements se sont organisés pour faire du 15 JUIN 2011 : UNE JOURNÉE de REFUS.

Il s'agissait notamment de défendre la déclaration commune rédigée durant le week-end de Pentecôte par de très nombreux organisations, associations, collectifs et partis politiques, bien au-delà des professionnels de la psychiatrie(1).

A LILLE, La "CAGEAUZAUTRES" dont ce fut la 4e participation à une manifestation, a pu accueillir un noyau dur d'une douzaine de personnes et quelques dizaines de "visiteurs". Les aumôniers des EPSM de la régions, des travailleurs sociaux, des infirmiers, des psychologues, des psychiatres, des usagers de passages, quelques "indignés" venus manifester leur solidarité, ont pu entrer et sortir librement de la cage. Les syndicats de psychiatres étaient pour la plupart représentés, Sud santé sociaux, quelques militants CGT, de nombreux jeunes psychiatres et psychiatres en formation étaient présents.

Lire la suite ici