L'impact de la pollution et du réchauffement sur les hormones féminines
Ralf Mohr. Plainpicture
La pollution de l'air et le réchauffement climatique pourraient avoir des effets négatifs sur le reproduction humaine, notamment en agissant sur les hormones féminines.
Les conséquences de la pollution atmosphérique sur la santé ne sont pas encore toutes connues. «On a commencé par s’intéresser aux effets sur la mortalité, les maladies cardiovasculaires ou respiratoires chez l'adulte. Il est en effet plus simple d’avoir un nombre conséquent de données sur des paramètres suivis en routine par les systèmes de santé», explique Rémy Slama, chercheur à l’Inserm.
Mais petit à petit, les chercheurs s’intéressent à des effets moins évidents. Comme ceux spécifiques sur les femmes. Rémy Slama s’est ainsi demandé si la pollution de l’air pouvait avoir un effet sur le cycle menstruel. L’idée ne vient pas de nulle part. «Nous avons des éléments suggérant que le délai pour concevoir s’allongeait chez les couples en milieu pollués», explique le chercheur.
Mais étudier le cycle menstruel féminin n’est pas si simple. Il faut commencer par trouver des femmes qui ne prennent pas de contraception, afin d’étudier des cycles naturels. Heureusement, en France, il existe l’Observatoire de la fertilité. Soit un projet qui a consisté à appeler au hasard 64 000 foyers pour recruter finalement 16 000 femmes de 18 à 44 ans pour des interviews régulières. Mille ne prenaient pas de contraceptif. Sur ce millier, 184 ont accepté d’envoyer régulièrement un échantillon d’urine par la poste au laboratoire de Rémy Slama.
Résultat ? Les chercheurs ont observé que chaque augmentation de 10 µg/m3 de la concentration en particules fines (PM10) dans l’air sur la période de trente jours avant le cycle considéré était associée à un décalage de l’ovulation d’environ 1,6 jour. Pour le dioxyde d’azote, une hausse de 10 µg/m3 entraîne un décalage de l’ovulation de 0,7 jour. Les résultats sont publiés dans la revue Environmental Pollution. «Il ne s’agit pas d’une preuve forte car l’effectif est faible, mais le résultat est cohérent avec ce que l’on sait de l’effet de la pollution atmosphérique sur le système hormonal humain. Il est aussi cohérent avec des résultats chez la souris», détaille le chercheur. Dans ses prochains travaux il se penchera sur les effets de la pollution sur le développement du fœtus.
Justement, une autre recherche récente a étudié le lien entre vague de chaleur et risque de naissance précoce. Publiée dans Nature Climate Change, cette recherche d’Alan Barreca démontre que le nombre de naissances quotidiennes augmente de 5% si la température dépasse 32,2°C (en se basant sur des données de 1969 à 1988 aux Etats-Unis). L’impact de la chaleur sur le déclenchement du travail peut passer par plusieurs mécanismes. La chaleur peut augmenter la sécrétion d’ocytocine, hormone clé de l’accouchement. La chaleur cause un stress au système cardiovasculaire. Enfin, la chaleur peut jouer sur le sommeil et donc l’état de santé général de la mère.
La pollution, comme le réchauffement climatique, a donc des effets spécifiques sur la santé des femmes. «Je veux savoir comment nous pouvons aider à protéger les femmes enceintes avec peu d’argent ou sans accès à la climatisation, explique Alan Barreca. Je pense que le changement climatique est un problème de justice économique puisque les plus fortunés pourront s’adapter mais les pauvres ne le pourront pas.»
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