DOSSIER / ENTRETIEN
Les portes de tout mon désir
Entretien entre Élisabeth
Roudinesco et Michel Wieviorka,
7 décembre 2017
Michel Wieviorka (MW) : Quel a été votre mai 68 ?
Élisabeth Roudinesco (ÉR) : En
1968, j’avais 24 ans et je revenais d’un an d’enseignement en Algérie où j’avais suivi mon mari
Michel Favart qui était cinéaste dans la
coopération. À Alger, je me destinais à
la critique de cinéma. J’étais anticolonialiste, d’une famille gaulliste du côté de mon père et social-démocrate du côté de ma mère.
De retour à Paris, je me suis inscrite
en lettres à la Sorbonne
pour terminer ma licence avec
l’option linguistique. De novembre 1967 à mai 1968,
j’ai suivi un enseignement plutôt ridicule. En particulier
celui d’André Martinet1 – l’incarnation même du mandarin sorbonnard. C’était quelque chose qui ne se s’observait pas en philosophie ou ailleurs. La Sorbonne, en lettres, c’était véritablement ce qu’il y avait de plus archaïque. Les étudiants n’avaient pas le droit
d’aller écouter le séminaire
de Roland Barthes et on leur enseignait que la littérature s’arrêtait à Mallarmé. Le xxe siècle ne faisait pas partie du programme.
1.
Linguiste, fondateur de l’approche fonctionnaliste de la syntaxe,
directeur d'études à l'École pratique
des hautes études,
directeur du département de linguistique à l'uni- versité Columbia, titulaire de la chaire de linguistique générale à la Sorbonne, puis à l’université Paris V. Il est l’auteur notamment de Éléments de linguistique générale (Armand Colin, 1960).
Socio • 10 • mars 2018 • p. 67-84 67
En linguistique, je pensais que ce serait
un peu mieux, mais avec
Martinet, qui se considérait
comme le plus grand linguiste de son
époque, cela ne laissait guère de place aux œuvres
de Ferdinand de Saussure et de Roman Jakobson
que ce mandarin prétendait éclipser. Inutile de dire
que les penseurs contemporains – de
Foucault à Lacan en passant par Claude Lévi-Strauss – n’étaient pas en odeur
de sainteté. Bien entendu,
c’est à eux que je m’intéressais et pas du tout au cours de Martinet,
dont l’assistant, Pierre Encrevé,
maoïste, ne jurait
que par Noam Chomsky et Pierre Bourdieu tout en obéissant au mandarin.
J’étais à la fois cinéphile et structuraliste et cet assistant
était calamiteux. Je l’ai revu depuis et il
continue à justifier son attitude.
Il nous enseignait du Martinet en disant
que la « révolution » ne pouvait
être que politique. Avec mon
amie Mitsou Ronat2, qui deviendra linguiste et chomskyenne, nous brandissions les livres « interdits » pendant le
cours. C’était une contestation culturelle et non politique.
MW : Avant Mai 1968,
un épisode a préfiguré quelque peu ce qui allait se passer, « l’affaire Langlois », du nom du directeur et fondateur de la Ciné- mathèque française, licencié
par André Malraux
pour mauvaise gestion et adoré des cinéphiles, lesquels ont manifesté, François Truffaut en tête,
pour le soutenir. Votre mari était cinéaste, vous fréquentiez le milieu du cinéma… vous êtes-vous alors mobilisée?
ÉR
: J’étais, comme
je l’ai dit,
mariée à Michel
Favart, avec qui
je suis restée amie. Il y avait, parmi les cinéphiles, Alain Corneau et toute une génération
qui faisait l’IDHEC3. Il y avait aussi Jean-Louis Comolli et Jean Narboni, venus d’Alger, il y avait un foyer
formidable, et nous étions concernés.
2.
Poêtesse, linguiste et spécialiste de la théorie littéraire.
3.
L’Institut des hautes études
cinématographiques, la grande école du cinéma français depuis 1944, ancêtre de la Fémis
(École nationale supérieure des
métiers de l’image et du son).
Les Cahiers du cinéma
ont évolué vers
la lecture de Roland Barthes, Michel Foucault, Jacques Lacan.
MW : Vous étiez bien
plus dans une vie
intellectuelle que politique? Vous
fréquentiez des gauchistes, des maoïstes?
ÉR : Je
n’étais pas du tout maoïste.
La raison pour laquelle
le maoïsme ne m’a pas intéressée, c’est que j’enseignais à Alger durant
l’année 1966-1967 en pleine Révolution culturelle
et nous pouvions voir ce qu’il en était à l’ambassade de Chine. De plus, en 1966, à Alger, il y avait
la cinémathèque qui était
une merveille, j’y fréquentais des gens de toutes sortes
très engagés politiquement : anarchistes, maoïstes, communistes ou
trotskistes. Pour ma part, j’étais
immergée dans l’esthétisme : l’art
pour l’art, ce qui était une façon d’être
d’« avant-garde ».
J’aimais le cinéma américain, j’aimais
Hollywood, j’étais formaliste. À l’ambassade de Chine étaient projetés des films de propagande comme L’Orient
rouge. Les Chinois
de l’ambassade défilaient en costume Mao et
me paraissaient assez stupides et surtout très staliniens. Je me souviens d’un
film incroyable qu’on nous projetait
sur la bombe atomique chinoise, dont on nous montrait
qu’elle ne tuait que les ennemis.
MW : Votre problème en 1968,
c’est donc les profs de la Sorbonne!
ER : À
Paris, oui, je contestais l’enseignement de la Sorbonne au nom du structuralisme.
Arrive mai 68 et apparaît Daniel Cohn-Bendit, et cela me réjouit. Cette
jovialité me plaisait
beaucoup. À partir de là, nous faisons la révolution à la Sorbonne. J’habitais dans le 14e arrondissement, et
j’allais à la Sorbonne par la rue du Faubourg-Saint-Jacques en passant devant
la Société des gens
de lettres, l’hôtel
de Massa, qui
était occupée. À la Sorbonne, nous avons fait le ménage, mais j’étais
du genre à dire : « Si on fait la révo- lution, on la fait dans l’ordre. » Jamais je n’ai pensé qu’il
y aurait des morts,
j’ai toujours pris ça comme un grand jeu,
une véritable partie de plaisir.
MW : La Sorbonne était occupée?
ÉR : Oui, dès le 4
mai.
MW : Et votre parcours en est profondément modifié?
ÉR : J’avais des manuscrits, je voulais écrire
des romans, et je passe
devant l’hôtel de Massa. J’apprends qu’il est occupé
par Philippe Sollers,
Margue- rite Duras et la revue Action poétique : Jacques Roubaud, Henri Deluy4. J’y entre donc,
tous les écrivains français
étaient là. Cela a changé ma vie. J’ai vécu huit ans avec Henri Deluy. Il y avait là les poètes proches de
Louis Aragon, des intellectuels communistes pas mal alcoolisés, en bref toute l’intelligentsia de l’époque. Une fête permanente.
J’avais envoyé un roman chez Gallimard
à Georges Lambrichs qui m’avait
convoquée et m’avait
dit : « C’est mauvais,
mais vous savez écrire, alors faites autre chose que de la fiction.
» Henri m’a aidée à trouver
ce qu’il fallait faire, en me conseillant d’écrire dans sa revue.
Ces poètes communistes étaient particuliers. C’étaient des poètes
non pas staliniens, mais
plutôt en voie de déstalinisation. Il y avait
une intense activité intellectuelle avec des revues
telles que France nouvelle, La Nouvelle Critique5, La Pensée6 et bien entendu Les Lettres françaises7, c’était en pleine rénovation. Il y avait
Action poétique, la revue
Change. Je rentre en plein
dans la querelle des avant-gardes.
Mes premiers textes portaient sur le structuralisme, sur Lacan et surtout
sur Georges Politzer.
Et j’ai adhéré au Parti communiste français en 1971. La condamnation de
l’intervention soviétique en Tchécoslovaquie m’avait frappée.
MW : C’est un peu au rebours du mouvement d’ensemble de
1968, qui s’inscrit plutôt dans la logique du déclin du parti communiste!
L’image générale que l’on avait, comme disait Dany Cohn-Bendit, c’était que le communisme était la maladie sénile du gauchisme!
4.
Revue de poésie fondée
en 1950 par deux poètes
marseillais, Jean Malrieu
et Gérald Neveu, dont la
direction sera ensuite assurée par Henri Deluy,
également poète mar- seilais. Elle cesse de paraître en 2012.
5.
Revue créée en 1948 par le Parti communiste français et disparue en 1980.
6.
Revue
pluridisciplinaire créée en 1939 par le philosophe
des sciences et physicien Paul Langevin et le philosophe Georges Cogniot, tous deux liés au Parti communiste français. Elle est désormais éditée par la Fondation Gabriel-Péri.
7.
Revue créée
clandestinement en septembre 1942 pendant l’Occupation par l’écrivain
résistant Jacques Decour et l’écrivain, critique
et éditeur Jean Paulhan à laquelle
ont collaboré notamment Louis Aragon, François Mauriac ou Raymond Queneau. De 1953 à 1972, la revue, désormais dirigée par Louis Aragon, bénéficie du soutien financier du PCF.
ÉR : J’avais beaucoup de sympathie pour Cohn-Bendit comme
personnage, mais je n’étais pas libertaire
du tout.
MW : Il y a d’ailleurs eu une
altercation entre Cohn-Bendit et Aragon!
ÉR : Je considérais Aragon comme un grand poète. Je disais qu’on avait
hérité au parti communiste d’un maître
fou – Louis Althusser – et d’un maître pervers – Aragon, dont j’admirais l’œuvre
poétique et romanesque. J’avais lu La Semaine sainte
et Aurélien avec enthousiasme. Ce moment 68, c’est pour moi la rencontre avec Action poétique à
l’hôtel de Massa, et je suis allée
à toutes les manifestations!
MW : Le monde culturel,
intellectuel dont vous parlez préexiste à Mai 68. Edgar
Morin a utilisé l’expression de « brèche » pour rendre compte de l’ouverture
qui s’est opérée alors.
ÉR : Oui, mais je l’ignorais. Je me suis engouffrée dans une brèche litté- raire. C’était
un monde auquel j’aspirais. À
l’époque, je me rendais bien compte qu’à la Sorbonne, le département philo
était bien mieux, et j’étais déchaînée contre le département lettres.
Je considérais comme un scandale
que les auteurs que je lisais, Barthes,
etc., ne soient
pas les vrais « maîtres » de la
Sorbonne.
Nous les étudiants, nous nous considérions, à juste titre, comme bien
meilleurs que nos enseignants. On avait le sentiment que le département lettres
de la Sorbonne devait cesser d’enseigner toutes sortes de bêtises alors qu’il
y avait de grands intellectuels contemporains dont on ne voulait
pas parler. Toute cette activité
m’intéressait. La dimension
d’engagement politique direct, en
revanche, ce n’était pas directement ma tasse de thé. Toutefois, le spectacle de la classe
ouvrière me plaisait beaucoup. Soixante-
huit m’a permis de vivre le Front populaire que je connaissais par le cinéma (notamment celui de Jean Renoir),
avec les usines occupées, les affiches superbes, Paris en effervescence. Dans ma mémoire
inconsciente, je retrou- vais
aussi le Paris de la
Libération. Je suis née juste après la
libération de
Paris, j’ai
des lettres de ma mère enceinte et prête à accoucher où elle la décrit à son
frère. Je suis née dans la joie de la Libération. Je viens d’une famille de la grande
bourgeoisie, avec le culte de la Résis- tance, très gaulliste chez mon
père. Ma mère était d’une famille philan-
thrope, sociale-démocrate. J’admirais beaucoup mes parents,
la Résistance ; il était impensable pour moi d’être
gauchiste, je trouvais cela absurde. En revanche, le Parti communiste, c’était le parti
de la Libération, le parti qui
avait fait la Résistance. Il y avait aussi quelque chose du souvenir du Front populaire.
En mai 68, mon père m’a dit : « C’est la chienlit,
et maintenant tu deviens
bolchevique », je lui ai répondu
: « Tu es gaulliste, je suis communiste, c’est le même héritage,
c’est le parti de la Résistance. » J’avais voté Mitterrand
en 1965 et pourtant
je n’étais pas sociale-démocrate. Mon père m’a dit : « Tu votes
pour la francisque. » Mais j’avais
honte, je n’aimais
pas Mitterrand à cette
époque. En 1968,
j’ai eu l’impression d’être à la libération de Paris. J’ai
un véritable culte de la Résistance.
Ce qui me plaisait et qui me conduira vers le Parti communiste français – pas le parti communiste russe –, c’était que, s’il fallait faire l’alliance des intellectuels et des ouvriers,
il n’y avait que là que c’était possible. Les trotskistes et les
maoïstes n’avaient pas le peuple avec eux.
Les trotskistes
pour moi, c’était la révolution qui échoue tout le temps, et les maoïstes… je n’ai jamais bien compris ! Je pense qu’il
faudrait écrire une vraie grande histoire de la Gauche prolétarienne (GP)8 au sein de laquelle beaucoup d’intellectuels étaient très brillants. Quel étrange
mouvement que la GP! Une partie mystique, une autre déjà
sociale-démocrate et une autre encore fascinée par la folie ou le passage à
l’acte violent.
MW : Vous parlez maintenant de la retombée de Mai
68, et de ceux, notamment au sein de la GP, qui veulent faire vivre un mouvement
alors qu’il est terminé.
8.
La Gauche prolétarienne est une organisation « maoïste » créée en septembre 1968 qui compte parmi ses dirigeants Alain Geismar et Benny Lévy.
ÉR : L’alliance de Serge July9, Olivier Rolin10, Christian Jambet11 ! Je les ai tous interrogés quand j’ai écrit mon Histoire de la psychanalyse car il y a eu le moment maoïste des lacaniens comme Jean-Claude Milner12. Je ne comprenais
pas comment on pouvait être anticommuniste alors que c’était le parti de
la Résistance, même si je comprenais qu’on soit
antistalinien, d’ailleurs je l’étais.
MW : Mais
au cœur du mouvement de Mai 68, il a plus d’anticommunisme que de communisme!
ÉR : C’estvrai. Le moment 68 est étrange
pour moi et me permet de
rejoindre le parti communiste.
C’est aussi l’ouverture de l’université de Vincennes, dès janvier 1969, où
je vais tous les jours. J’y termine ma maîtrise avec Tzvetan Todorov,
sur Raymond Roussel.
Et je m’inscris aux cours de Gilles Deleuze,
de Michel Foucault, de Michel de Certeau, puis
je m’inscris en thèse. Il y a là
les structuralistes et les
chomskiens. Je déteste
Chomsky, destructeur du structuralisme.
Il était devenu l’ennemi de Jakobson pour promouvoir une psychologie cognitive du langage.
Je liquide donc mon rapport
à la linguistique à Vincennes.
Et à Vincennes, je me dis que je dois faire de l’histoire. Cette vocation
est née là.
MW : Vous êtes la grande historienne de la psychanalyse
: cela a-t-il à voir avec 68 ?
ÉR : Pour
moi, il n’y a pas de psychanalyse en 1968. Il y a la rencontre avec les textes de Lacan, le structuralisme. J’entre dans la psychanalyse par les textes de Lacan, et non par Freud, ce qui est bizarre comme entrée. Sans Lacan, la psychanalyse pour moi serait restée une affaire de médecin, mais aussi l’affaire de ma mère Jenny Aubry, pionnière de la psychana- lyse d’enfant en France. Ce que je vois à ce moment-là des lacaniens n’est pas brillant, sauf Serge Leclaire13, qui invite Certeau au département de psychanalyse de Vincennes.
9.
Journaliste, cofondateur du quotidien Libération. Il est un des fondateurs de la Gauche prolétarienne.
10.
Membre
dirigeant de la GP, écrivain, auteur notamment de Port-Soudan (prix Femina 1994).
11. Philosophe et islamologue.
12.
Philosophe, linguiste, membre de la GP de 1968 à 1971.
J’intègre l’École freudienne de Paris (EFP) en 1969, et j’écoute les séminaires de Lacan, mais je ne vois pas une révolution. Lacan disait : « Vous sortirez de la révolution par la
psychanalyse », ce n’est pas quelque chose qui me passionne.
Quand j’intègre l’École
freudienne, je suis membre du parti communiste et je suis donc traitée
de tous les noms, « l’œil de Moscou » par exemple.
MW : Vous êtes restée longtemps
communiste?
ÉR : Je
voyage très tôt dans les pays du socialisme réel et je vois bien que
c’est en train de s’écrouler.
Jusqu’en 1979, je reste communiste,
et cela m’amuse de voir tous ces maoïstes qui vomissent les communistes et que
je soupçonne, moi, de ne rien comprendre à la Résistance française.
Mais les lacaniens et les althussériens me semblent très conservateurs,
maniant les concepts de façon dogmatique, n’ayant pas assez de culture historique et littéraire. Mon amitié avec Georges Pérec14 a compté à ce
moment-là. Je ne savais pas être fanatique ou dogmatique mais par moments
j’essayais.
MW : J’ai le sentiment en vous écoutant que Lacan n’est guère ébranlé par 68.
ÉR : Dans sa famille,
tout le monde était maoïste. L’École
freudienne de Paris existe
depuis 1964. En 1968, comme je lis Lacan, ma
mère me dit :
« Enfin, tu te rends compte
que c’est important! » Il faut dire que j’avais
même hésité à m’inscrire à la Sorbonne, me disant, comme
un défi à mon père : « Je vais peut-être faire médecine. » Ma mère m’en avait dissuadée, me conseillant à bon escient de m’inscrire en lettres. Ce qui m’a amenée à la psychanalyse, c’est la lecture de Lacan, c’est l’approche littéraire des textes, à la suite de ma cinéphilie.
13.
Psychiatre et psychanalyste, disciple de Jacques Lacan.
14.
Écrivain, membre de
l’Oulipo, auteur notamment de La Vie mode
d’emploi et Les Choses.
Je commence à beaucoup fréquenter le séminaire de Lacan et je trouve que
j’entre dans un milieu réactionnaire et apolitique. Un milieu qui existe avant 68 mais qui est traversé
par la modernité, via une
nouvelle génération, celle de Jacques-Alain Miller15, qui avait participé à la création des Cahiers pour
l’Analyse. Eux, dans l’ensemble, ils sont plutôt
maoïstes. Je m’aperçois en
rentrant dans cette École qu’il va y avoir un souffle nouveau
avec Miller qui
va bousculer cette
école et moi aussi, j’ai
envie de faire
bouger tout cela.
À
ce moment-là, en 1969, Lacan
me dit : « Vous êtes
liée à La Nouvelle Critique, que se passe-t-il au Parti communiste français, est ce qu’on commence à enseigner ma doctrine? » Ce qui l’intéressait c’était
l’enthousiasme de la jeunesse, et surtout deux
choses : l’Église catholique et le parti communiste. Il considérait que le maoïsme
n’avait aucun avenir.
C’est le sens des « quatre discours16 » de Lacan. Il considérait que la révolution allait reconduire à la même chose et qu’il fallait
revenir au bercail,
à la psychanalyse. Mais il
était parfaitement lucide sur le vrai pouvoir de l’époque : le parti communiste qui était encore le parti du peuple
et l’Église catholique romaine qui détenait le pouvoir de régenter le psychisme.
Moi, je ne faisais pas la révolution, je la rêvais.
J’ai rejoint l’histoire du mouvement psychanalytique. Je rejoignais quelque chose de
flamboyant, me disant que l’analyse pouvait
être novatrice, revue
et corrigée par Lacan.
D’où ma déception de rencontrer une
École qui n’était pas à la hauteur.
MW : Aussi réactionnaire que
vos profs de la Sorbonne?
ÉR : Oui! Les
psychanalystes étaient apolitiques, sans aucun engagement autre que l’analyse.
15.
Philosophe et psychanalyste, disciple
d’Althusser et de Lacan, dont
il est le gendre, il est
l’éditeur des séminaires de ce dernier
et fondateur de l’École de la cause
freudienne.
16.
Voir « Les quatre discours », livre XVII du séminaire de Jacques Lacan, 1969.
MW :
Mai 68 n’a rien amélioré?
ÉR :
Si, chez les psychiatres. La
psychothérapie institutionnelle, le versant «
gauche » de la psychanalyse. Il y a la clinique de La Borde17, Deleuze, Felix Guattari, et tout le mouvement
de la psychothérapie institutionnelle issue de la Résistance, dont je vous rappelle que l’avant-garde était le parti communiste.
MW : Pourtant les Anglais, si importants dans
le mouvement de l’antipsy-
chiatrie, les Cooper et Laing18, eux, n’étaient pas communistes.
ÉR : Non, eux,
c’était autre chose, ils étaient anticolonialistes, comme Cooper que j’ai
bien connu. Il n’y avait pas de communistes dans la psychiatrie anglaise car il
n’existait pas de parti communiste anglais aussi puissant qu’en France et en Italie
!
En revanche, il y avait en France
la gauche de l’EFP, c’est vers elle que
je suis allée. C’est-à-dire Octave et Maud Mannoni19. Elle, c’était une vraie femme de gauche, très liée au communisme. C’était
la gauche lacanienne. Elle avait du courage, un passé anticolonial, elle avait signé le
Manifeste des 12120. Octave était lié aux Temps modernes. Je vais donc en analyse chez Octave Mannoni, c’était le seul choix possible pour moi.
MW :
Lacan, c’était exclu?
17.
Clinique
psychiatrique située à Cour-Cheverny créée et dirigée par Jean Oury qui y a mis en pratique les principes
de la psychothérapie institutionnelle, fondée sur une humanisation du fonctionnement des établissements psychiatriques.
18.
David Cooper et
Ronald Laing sont des psychiatres exerçant en Grande-Bretagne fondateurs du courant de pensée de l’« antipsychiatrie » qui remet en question
les trai- tements psychiatriques, perçus comme des instruments de coercition voire
d’oppression et qui met en avant la liberté individuelle et le droit
à la différence.
19.
Psychanalystes, figures importantes du mouvement lacanien.
20.
Intitulé « Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre
d'Algérie », rédigé à l’initiative de Dionys Mascolo
et Maurice Blanchot, il est signé
par nombre d’intellectuels de gauche, parmi lesquels Jean-Paul Sartre ou Pierre Vidal-Naquet. Il critique le rôle de l’armée française en Algérie et reconnaît la « cause du peuple algérien ».
ÉR : Tout à fait, il n’était pas
question pour moi d’aller en analyse chez
Lacan, il suscitait un culte et j’en étais
incapable. En tant que clinicien, Lacan
était inapprochable pour moi mais pas comme chef d’école. Et puis
c’était un ami de ma mère. Il voulait que je vienne chez lui en analyse, mais je refusais. Il me disait : « Qu’allez-vous faire chez Mannoni? »,
je répondais : « Mais Mannoni est votre disciple, il est lacanien! »
À l’université de Vincennes, dans la suite des événements de 1968, que je
bénis, la rencontre avec Michel de Certeau a été formidable. Il était à la
fois historien, jésuite,
membre de l’EFP, lié mondialement au mouvement
communiste et surtout au marxisme. En
1969, il donne des cours épous- touflants à Vincennes. Il parle de la mystique
devant peu d’étudiants, alors que c’était la ruée pour Deleuze. Il parle de cas de névroses démoniaques, de possédés, d’Althusser, que j’avais déjà commencé à fréquenter. J’ai été
élevée dans un milieu laïc et républicain, la foi n’existait pas. Un jour,
Michel de Certeau me dit : « Althusser c’est un mystique. » « Pourquoi
un mystique? » « C’est un mystique du communisme, et tu vas me
faire un exposé là-dessus. » Il avait raison…
Je découvre alors sa thèse sur la
mystique, le moment où la mystique conteste l’ordre établi. Je lui dis : « Au fond, tu es un marxiste », il me répond : « Non, je suis un jésuite.
» C’était un maître.
Il était homosexuel, mais il ne le revendiquait pas. Je le trouvais magnifique. Il a très bien écrit sur la prise de parole de 1968.
Je me suis retrouvée d’un côté avec Certeau dans un grand accord, et de
l’autre côté avec Deleuze, qui
avait un vrai talent. Il m’a formée contre
les dogmes. Il critiquait déjà le dogmatisme lacanien.
Pour moi, 68, c’est l’accès
à tout cela. Je rentre
dans ma vie intellectuelle à partir de 68. Ce n’est pas la révolution sociale
qui m’intéresse. Le social, je
le vois par le parti communiste.
C’est
proprement imaginaire ! Après, j’ai eu des discussions avec des militants
politiques. C’est vrai que je n’avais lu ni Pierre Bourdieu, ni Alain Touraine.
Rien de la sociologie.
Mai 68, c’était pour moi une révolution intellectuelle qui bouleversait l’enseignement
universitaire et je m’en félicitais.
MW : Uniquement l’enseignement supérieur?
ÉR : J’avais été malheureuse à l’école
républicaine. Je n’aimais
pas l’école républicaine, où les filles
étaient d’un côté, les garçons de l’autre. Je ne m’étais pas adaptée à cet univers
et ma mère m’avait
mise, dès la cinquième,
dans
le privé, au collège Sévigné.
On n’avait pas de blouse, c’était
l’autodiscipline. J’étais confrontée à une vraie compétition et je suis devenue
bonne à l’école.
Je ne suis pas un pur produit de l’école républicaine,
sauf en ce qui concerne la laïcité.
Dans ma famille, il n’y avait que des
polytechniciens, des médecins, des normaliens. Quand ma mère m’a dit
de faire ce dont j’avais envie, j’ai choisi
de ne pas préparer les concours. Ce qui a été bénéfique pour moi, c’est l’entrée dans le supérieur. Ma maîtrise avec Todorov21, puis une thèse de troisième cycle en lettres avec Béatrice Didier22 et Jean Levaillant23. Ensuite, j’ai quitté l’université. J’ai hérité de mon père en 1974 et
je n’avais pas besoin de gagner ma vie.
Sauf que, quand on est enfant de bourgeois et qu’on n’a pas besoin
de gagner sa vie, il faut faire quelque
chose de très bien, sinon on n’est rien et
on risque de sombrer dans l’ennui
et la dépression. Cela m’a permis de commencer à écrire vraiment,
de me mettre au travail, et d’écrire dans les revues.
C’est Certeau qui m’a conseillé d’entreprendre l’Histoire de la
psychanalyse en France. De 1977 à 1986, je me suis lancée là-dedans, sans passer par l’université. J’ai rejoint l’université par l’habilitation en 1991, grâce à Jean-Claude Passeron24 et Michelle Perrot25.
MW : Donc 68 vous ouvre des portes?
ÉR : Oui, cela m’ouvre les portes de tout mon désir!
MW : Pouvons-nous parler de 68 sous l’angle de la question
juive?
21.
Tzvetan Todorov, critique littéraire, sémiologue et historien des idées.
22.
Professeur de littérature, spécialisée dans le xviie et xviiie siècles français.
23.
Professeur de littérature à l’université Paris VIII.
24.
Sociologue.
25.
Historienne, professeur à l’université Paris VII.
ÉR : En 1966, à Alger, au moment de l’arabisation, je découvre
pour la première fois ce qu’est l’antisémitisme.
Dans
ma famille, nous n’étions pas juifs au sens du judaïsme. Nous étions juifs-pas-juifs. Mon père était juif, venait
de Roumanie, et considérait qu’il fallait
s’assimiler à un point tel qu’on cesse d’être juif : c’était à ses yeux la manière d’échapper à l’antisémitisme. Il
avait émigré en 1904, fait la guerre
de 1914, il était français, il ne voulait plus être considéré comme juif. Je suis élevée dans le culte de Georges
Clemenceau, d’Émile Zola, de la haine
de l’antisémitisme et de l’importance de l’assimilation.
Mon père disait : « Tu n’épouseras jamais un juif !
» Ma mère était juive, « israélite française
» par sa mère, protestante par son père. Quand elle épouse mon père, elle partage les mêmes idéaux que
lui. Sauf que dans sa famille, on traitait
volontiers les émigrés de l’Europe centrale de « métèques youpins ». L’avantage d’avoir des parents intelligents,
c’est que j’ai entendu parler du génocide
des Juifs très tôt alors que mes camarades de classe n’en savaient rien. Vers 7 ou 8 ans, je me suis mise à
parler des camps d’extermination. J’étais
au courant car mes parents n’avaient pas porté l’étoile jaune et me disaient : « Regarde à quoi on a échappé! »
J’ai été élevée dans le culte de la
Résistance et la connaissance de l’extermination, à une époque où les enfants des familles juives avaient honte
et se cachaient, avec des comportements
de victimes.
Moi, c’était le
contraire, je disais : « On a échappé
parce qu’on était résis- tant », et en même temps j’allais au
catéchisme. Mon père disait : « Ça te permettra
de rentrer dans les églises et
de comprendre ce qu’on y dit et ce qu’on y voit ! » Il avait une grande
admiration pour le catholicisme romain, la religion de l’art. Quant à ma mère,
elle était anticléricale.
Je ne pouvais pas supporter l’antisémitisme et je ne pourrai jamais. Chaque fois que je croise un
antisémite, je deviens féroce. Mais cette attitude ne veut
pas dire qu’on se sent juif comme
les Juifs. Nous
n’allions pas à la synagogue. Nous célébrions les fêtes catholiques de façon laïque.
MW : Que s’est-il donc passé exactement en Algérie de ce point
de vue, dans votre expérience?
ÉR : En 1966-1967, je rencontre des «
pieds-rouges26 » qui vont basculer dans le maoïsme, qui enseignent comme moi la
littérature à Rocher Noir – c’est
le nom colonial pour Boumerdès. Je savais que
si j’allais enseigner à Boumerdès (au Centre
africain des hydrocarbures et des textiles), il fallait
porter de longues
jupes et faire
attention aux viols
et aux violences des étudiants qui avaient mon âge, étaient internes et peu enclins à la libération des femmes.
C’était une époque d’émancipation. Mais
quand j’ai voulu enseigner à ces étudiants des auteurs comme Frantz Fanon ou Kateb Yassine, ils m’ont
réclamé La Rochefoucauld,
Racine, etc. Ils étaient conformistes,
traumatisés par la guerre d’Algérie. On commençait à voir poindre, sinon
l’islamisation, du moins l’arabisation, et en même temps existait
un grand désir de culture française classique.
Quand j’ai commencé à enseigner Frantz
Fanon, les étudiants m’ont dit : « Mais Madame,
c’est un nègre, il n’est pas de chez nous. » Les professeurs
gauchistes qui étaient là considéraient que l’on
ne pouvait pas traiter les élèves algériens comme des élèves français et qu’il fallait comprendre ce genre de discours. Ils affirmaient que c’était le résultat du
colonialisme français, oubliant qu’il
y avait eu en France des anticolonialistes : ils oubliaient Sartre et le Manifeste des 121. Pas moi : je n’aimais pas cette « repentance »
et cette culpabilité. Arrive la
guerre des 6 jours, je rentre dans ma classe à Boumerdès et il y a des croix gammées
partout. Le conseil des professeurs décide que l’on ne dit rien, que les murs des classes ne
doivent pas être nettoyés. Je m’étonne et dénonce cet antisémitisme, on me
répond : « Mais non, ils sont juste
contre Israël, contre le sionisme. » Je rentre dans ma classe, les étudiants sont contents d’eux
et j’entame une discussion à ce sujet.
Je décide d’improviser un cours sur la Seconde guerre mondiale, et je leur parle de l’extermination des Juifs. Les élèves étaient
curieux, et ils sont
venus me demander pardon tout en me demandant si j’étais juive. C’était la première fois que je me sentais « assignée à résidence ». Je leur ai expliqué que l’on n’avait pas besoin d’être juif pour combattre l’antisémitisme
26.
C’est ainsi que l’on nomma
les Français communistes, trotskistes, libertaires ou chrétiens qui décidèrent d’accompagner la nouvelle
Algérie indépendante pour parti- ciper à la reconstruction du pays, qu’ils
pensaient sur la voie de l’émancipation, voire du
socialisme.
.
MW : Et en 68 ?
ÉR : J’avais découvert là-bas que l’antisémitisme existait toujours. Mon éducation juive
était inexistante, je ne me sentais jamais
juive, sauf quand on
venait me chercher
avec l’antisémitisme. Beaucoup
plus tard, quand j’ai vu le spectacle postrévolutionnaire, post-68,
de chacun de ceux qui retournaient à une « identité », j’ai
commencé à réfléchir à la question
juive. J’ai redécouvert la question juive à travers l’Histoire de la psychanalyse.
MW : J’ai le sentiment que vous contournez 68, comme s’il n’y avait
pour vous rien à dire sur 68 et la question juive.
Il y a quand même eu ce célèbre
« nous sommes
tous des Juifs allemands », en réponse à la façon dont le parti communiste
traitait Cohn-Bendit!
ÉR : Pour
moi, ce n’était pas un thème en 68. Mis à part Cohn-Bendit, qui n’était pas plus juif que moi, et effectivement ce « Nous sommes tous des
juifs allemands ». C’est un slogan contre l’antisémitisme et le nationalisme antiallemand qui me va tout à fait.
MW : On a accusé à l’époque
Georges Marchais d’être antisémite.
ÉR : Marchais a peut-être commis une
énormité, mais je n’ai pas
rencontré d’antisémites autour d’Aragon ou d’Althusser, même s’il y en avait au
sein du PC.
MW : Et dans le monde maoïste?
ÉR : J’ai fréquenté Étienne
Balibar, Dominique Lecourt27… Jean-Claude Milner : à ce moment-là, il ne parlait pas de cette
question juive.
27.
Philosophes et professeurs d’université.
MW : C’est venu pas si tard que
cela, avec la question palestinienne et le meurtre d’athlètes israéliens en 1972 à Munich.
ÉR : J’étais absolument défavorable à la politique de la droite
israélienne, je ne comprenais pas l’évolution de ce pays. Mais j’étais capable
de vibrer à Exodus (le
film) de façon extraordinaire tout en considérant qu’Israël, en tant que tel, n’était
pas mon histoire. C’est venu progressivement, avec des
injonctions, à un moment donné les
discussions étaient : « Tous les juifs ont
la terre d’Israël
dans la tête. » Moi je répondais : « Pas du tout, j’aime
la diaspora et non pas l’assignation à résidence. »
Ce qui m’a intéressé dans l’histoire de la psychanalyse, c’est surtout les débuts avec
Freud. J’ai beaucoup parlé de la question juive avec mon père dont je vous ai dit qu’il était pour une assimilation
totale, moi je me démarquais. Il y avait un problème
juif dans la famille, mes frères ne se sont pas rendu
compte qu’ils étaient
juifs à force d’avoir
été assimilés. Un de mes frères
a fait la guerre d’Algérie et est devenu
d’extrême droite sans être militant, sans poser de bombes. Il faisait partie de ces gens qui n’étaient pas antisémites mais qui voulaient maintenir l’Algérie dans la France au nom des valeurs de la Résistance française. C’était
un égarement.
MW : Vous avez discuté 68 en
famille?
ÉR : Ma
mère voulait défiler,
elle a vécu 68 dans son service de pédiatrie à l’hôpital des Enfants-Malades.
Elle était grand patron de pédiatrie,
on voulait virer les grands patrons
mais pas elle, on ne pouvait pas, puisqu’elle
avait introduit une pratique dite « subversive » : la psychanalyse.
En 1968, je ne parlais pas avec mon frère qui était devenu d’extrême
droite. Mon père était encore vivant, il m’accusait d’être bolchevique et de
voter pour la francisque. Moi j’avais compris que j’étais juive au sens de la judéité, mais mes frères, qui avaient vécu la période
de l’Occupation, convaincus
qu’ils n’étaient pas juifs, avaient fini par ne pas comprendre ce que voulait
dire la notion de judéité. J’ai beaucoup reproché cela à ma mère en voyant les dégâts.
J’ai suivi un cheminement important qui m’a évité d’aller
vers le culte d’une prétendue « identité
juive », ce qui m’a permis de trouver
ma place.
MW : J’avais noté deux autres
thèmes à propos
de 68 sur lesquels je souhaite
connaître votre point de vue : l’homosexualité, et le féminisme.
ÉR : En
1968, pour moi,
ces thèmes n’étaient pas présents. Je n’ai jamais été féministe. Je n’en avais pas besoin. Dans ma famille, les femmes étaient intellectuellement supérieures aux hommes. Les hommes étaient
des bêtes à concours. Le travail d’émancipation des femmes était fait et j’en étais l’héritière. Je ne me suis jamais
sentie victime de la domination masculine et les femmes
féministes avaient tendance
à me le reprocher, comme si
j’avais eu le privilège de n’avoir
pas besoin de ce combat.
Par ailleurs, le modèle de ma tante Louise Weiss28 était complexe. Dans sa jeunesse elle avait été suffragette
mais dans la seconde partie
de sa vie, durant laquelle je l’ai connue, elle était
devenue très réactionnaire, hostile d’ailleurs à l’avortement et proche de l’extrême droite. Ma mère,
quant à elle,
m’a élevée dans le culte de Simone de Beauvoir. Les Mémoires
d’une jeune fille
rangée étaient son livre
de chevet avec La recherche du temps perdu.
L’homosexualité n’était pas du tout présente pour moi en 1968. J’ai
découvert la question beaucoup plus tard, et
alors, cela pour moi allait de soi
qu’il y ait un mouvement de libération
des homosexuels. Vivant dans un milieu
intellectuel, avec les poètes et les écrivains, j’avais une tolérance naturelle envers
l’homosexualité : la moitié de mes amis étaient
homo- sexuels. Plus tard, j’ai milité pour la dépénalisation de l’homosexualité
et pour le mariage homosexuel. C’était évident.
28.
Femme politique, féministe et écrivaine.
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