Christophe, un jeune infirmier fait face impuissant et terrifié à l’agitation d’un patient, quand soudain un autre patient lui propose son aide et parvient à ramener le calme.
Les vacances ont été longues. Trop peut-être. Car le retour est difficile. À la fois présent et absent, j’ai beaucoup de mal à retrouver mes marques dans l’unitée fermée où nous recevons des patients hospitalisés sous contrainte. Pourtant le service est calme. Mais il y fait une chaleur étouffante. Malgré le froid hivernal, mes deux sympathiques mais frileuses collègues m’interdisent fermement d’ouvrir les fenêtres, soutenues par de nombreux patients, frileux eux aussi. Quel choc thermique pour moi qui revient de plusieurs semaines dans ma Creuse natale, enneigée et si fraîche. C'est du petit jardin où je me suis réfugié et où je semble être le seul à venir régulièrement prendre l’air, sauf quelques courageux patients fumeurs et couverts de plusieurs épaisseurs de vêtements, que j’entends des éclats de voix venant de l'intérieur.
Au pas de course, je suis le premier à rejoindre Monsieur T., qui parait désireux lui aussi de quitter au plus vite la fournaise du service, mais de façon définitive, par la porte fermée à clé, et à coups de pieds. Il est hospitalisé depuis plus d’une semaine et j’ai fait sa connaissance quelques heures auparavant lorsque je me suis présenté à tous les patients. Je n’ai pas encore pris le temps de lire attentivement tous les dossiers et ne connais pas parfaitement son histoire. Dans mes souvenirs des transmissions, ce Monsieur est très déprimé, a fait une tentative de suicide et refuse les soins. Nous n’avons pas encore vraiment échangé tous les deux et nous ne nous connaissons pas.
Je tente donc de discuter avec lui pour comprendre les raisons de cette soudaine tension, mais très vite, mon impuissance est évidente.
Si seulement je connaissais mieux ce patient.
“Laissez-moi sortir ! Ouvrez la porte ou je continue de tout casser ! Ça suffit maintenant ! ” hurle t-il en frappant la vieille porte en bois qui tremble à chaque coup porté. Sans cesse il tape, à coups de pieds ou d’épaule, bien décidé à s’enfuir. Doté d’un imposant gabarit, sa force et sa colère font lentement plier le bas de la porte qui va bientôt céder. Sa souffrance est intense, je la perçois à travers chacun de ces gestes, de ses cris, et chacune de ses larmes. Seul et incapable, figé sur place et écrasé par la chaleur, je sens des perles de sueur, ou peut-être de terreur, couler sur mon front et le long de mon dos. Malgré la chaleur, je frissonne. Pendant ces quelques instants qui me semblent une éternité, je ne cesse de chercher du regard mes collègues qui sont je ne sais où.
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