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dimanche 1 janvier 2012


Trop d'enfants traités contre l'hyperactivité

Par figaro icon Aude Rambaud - le 26/12/2011
La Ritaline est sans risque cardiaque mais des médecins s'inquiètent de l'envolée des prescriptions.
Ritaline, ce mot résonne comme une bénédiction pour des milliers de parents en France. Il s'agit en fait du méthylphénidate, traitement de référence des troubles de l'attention et de l'hyperactivité dès l'âge de 6 ans. Mais la molécule n'est pas seulement utilisée chez l'enfant, de plus en plus d'adultes y ont également recours. Il s'agit d'un psychostimulant proche des amphétamines.
Pourtant, depuis 2005, un doute planait sur sa sécurité cardio-vasculaire. Plusieurs cas d'arrêt cardiaque avaient été signalés outre-Atlantique chez de jeunes hyperactifs traités par amphétamines. Le Canada avait aussitôt décidé d'en suspendre la commercialisation avant de revenir sur sa décision, compte tenu du fait que toutes les personnes décédées présentaient en fait des problèmes cardiaques susceptibles d'expliquer ces accidents. Quoi qu'il en soit, le doute a subsisté pendant toutes ces années. À ce titre, deux études récentes sur des enfants et des adultes et plutôt rassurantes sur ce point sont les bienvenues pour la communauté médicale et les familles. Ces travaux ne justifient pas pour autant des prescriptions jugées excessives par un certain nombre de médecins.

Contractions musculaires

La première, publiée il y a un mois dans le(NEJM), a porté sur plus de 1,2 million d'enfants agés de 2 à 24 ans et la seconde, datant du 12 décembre, est parue dans le Journal of American Medical Association (Jama) et porte sur 450 000 adultes de 25 à 64 ans. Elles ne montrent aucune association entre la prise de ces traitements contre les troubles de l'attention et l'hyperactivité et la survenue d'arrêts cardiaques, infarctus du myocarde ou encore accidents vasculaires cérébraux. Des résultats assez positifs qui ne lèvent pas la prudence des auteurs. Selon eux, ces observations n'excluent pas un risque non décelé dans ce cadre, notamment en raison d'un suivi moyen des adultes assez court (1,3 an en moyenne) et avec des durées de traitement restreintes. En outre, la rareté des événements cardio-vasculaires chez les enfants doit inciter à interpréter ces résultats avec prudence. Parmi les jeunes individus inclus, il y avait environ 375.000 utilisateurs par année. L'échantillon aurait donc mérité d'être encore plus important.
Ces données sont néanmoins «rassurantes», selon le Dr François Banne, psychiatre libéral à Paris, même si elles ne modifieront pas sa pratique. La Ritaline augmente la concentration de dopamine dans le cerveau. Or, celle-ci accroît les contractions musculaires. À ce titre, le médicament peut provoquer une augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle. « Il est vrai que des enfants se plaignent parfois de tachycardie, précise-t-il. En cas de signe fonctionnel comme celui-ci ou d'antécédents cardiaques, je demande systématiquement une visite chez le cardiologue. Il y a une inquiétude sérieuse autour de la prescription, notamment dans le contexte de l'affaire Mediator. En outre, je recommande à tous les adultes un bilan cardiaque en raison de l'augmentation des facteurs de risques et maladies cardio-vasculaires avec l'âge.» L'Agence européenne du médicament recommande en effet de rechercher des anomalies de la tension artérielle ou de la fréquence cardiaque et de certains troubles psychiatriques chez tous les patients avant la mise sous traitement puis d'assurer une surveillance régulière. Elle rappelle, par ailleurs, qu'il existe un ralentissement de croissance chez les enfants traités sur de longues périodes.
Pour le Pr Maurice Corcos, chef du service de psychiatrie à l'Institut mutualiste Montsouris à Paris, les résultats de ces études sont effectivement rassurants mais ne répondent pas aux inquiétudes actuelles des psychiatres. «Qu'en est-il du développement cérébral, de la croissance physique et affective de l'enfant?, interroge-t-il. La Ritaline est de plus en plus prescrite à travers le monde à de jeunes enfants et à des adolescents, à des périodes où la formation de nouvelles synapses est très active. Or, cette substance agit directement sur le cerveau et est parfois administrée pendant plusieurs années. Ce n'est pas anodin.»
l s'inquiète également de l'envolée des prescriptions: «Certaines données de la littérature évoquent des augmentations de la prévalence de l'hyperactivité de plus de 600% en dix ans. Je ne veux pas croire à une épidémie! Ces chiffres révèlent un surdiagnostic et par conséquent une surprescription de médicaments. Celle-ci doit être adaptée à un contexte clinique précis, en éliminant par exemple des causes d'anxiété ou de dépression.» Les travaux de recherche sur les causes de l'hyperactivité et les excès de diagnostic, sur les meilleures prises en charge et les conséquences des traitements méritent en tout cas d'être poursuivis.

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05.03.11

par Michel Serres, de l'Académie française

Michel Serres
Michel SerresAFP/ETIENNE DE MALGLAIVE
Ce nouvel écolier, cette jeune étudiante n'a jamais vu veau, vache, cochon ni couvée. En 1900, la majorité des humains, sur la planète, travaillaient au labour et à la pâture ; en 2011, la France, comme les pays analogues, ne compte plus qu'un pour cent de paysans. Sans doute faut-il voir là une des plus fortes ruptures de l'histoire, depuis le néolithique. Jadis référée aux pratiques géorgiques, la culture, soudain, changea. Celle ou celui que je vous présente ne vit plus en compagnie des vivants, n'habite plus la même Terre, n'a plus le même rapport au monde. Elle ou il n'admire qu'une nature arcadienne, celle du loisir ou du tourisme.
- Il habite la ville. Ses prédécesseurs immédiats, pour plus de la moitié, hantaient les champs. Mais, devenu sensible à l'environnement, il polluera moins, prudent et respectueux, que nous autres, adultes inconscients et narcisses. Il n'a plus la même vie physique, ni le même monde en nombre, la démographie ayant soudain bondi vers sept milliards d'humains ; il habite un monde plein.
- Son espérance de vie va vers quatre-vingts ans. Le jour de leur mariage, ses arrière-grands-parents s'étaient juré fidélité pour une décennie à peine. Qu'il et elle envisagent de vivre ensemble, vont-ils jurer de même pour soixante-cinq ans ? Leurs parents héritèrent vers la trentaine, ils attendront la vieillesse pourrecevoir ce legs. Ils ne connaissent plus les mêmes âges, ni le même mariage ni la même transmission de biens. Partant pour la guerre, fleur au fusil, leurs parents offraient à la patrie une espérance de vie brève ; y courront-ils, de même, avec, devant eux, la promesse de six décennies ?
- Depuis soixante ans, intervalle unique dans notre histoire, il et elle n'ont jamais connu de guerre, ni bientôt leurs dirigeants ni leurs enseignants. Bénéficiant d ‘une médecine enfin efficace et, en pharmacie, d'antalgiques et d'anesthésiques, ils ont moins souffert, statistiquement parlant, que leurs prédécesseurs. Ont-ils eu faim ? Or, religieuse ou laïque, toute morale se résumait en des exercices destinés à supporter une douleur inévitable et quotidienne : maladies, famine, cruauté du monde. Ils n'ont plus le même corps ni la même conduite ; aucun adulte ne sut leur inspirer une morale adaptée.
- Alors que leurs parents furent conçus à l'aveuglette, leur naissance est programmée. Comme, pour le premier enfant, l'âge moyen de la mère a progressé de dix à quinze ans, les parents d'élèves ont changé de génération. Pour plus de la moitié, ces parents ont divorcé. Ils n'ont plus la même généalogie.
- Alors que leurs prédécesseurs se réunissaient dans des classes ou des amphis homogènes culturellement, ils étudient au sein d'un collectif où se côtoyent désormais plusieurs religions, langues, provenances et mœurs. Pour eux et leurs enseignants, le multiculturalisme est de règle. Pendant combien de temps pourront-ils encore chanter l'ignoble "sang impur" de quelque étranger ? Ils n'ont plus le même monde mondial, ils n'ont plus le même monde humain. Mais autour d'eux, les filles et les fils d'immigrés, venus de pays moins riches, ont vécu des expériences vitales inverses.
Bilan temporaire. Quelle littérature, quelle histoire comprendront-ils, heureux, sans avoir vécu la rusticité, les bêtes domestiques, la moisson d'été, dix conflits, cimetières, blessés, affamés, patrie, drapeau sanglant, monuments aux morts, sans avoir expérimenté dans la souffrance, l'urgence vitale d'une morale ?
VOILÀ POUR LE CORPS ; VOICI POUR LA CONNAISSANCE
- Leurs ancêtres fondaient leur culture sur un horizon temporel de quelques milliers d'années, ornées par l'Antiquité gréco-latine, la Bible juive, quelques tablettes cunéiformes, une préhistoire courte. Milliardaire désormais, leur horizon temporel remonte à la barrière de Planck, passe par l'accrétion de la planète, l'évolution des espèces, une paléo-anthropologie millionnaire. N'habitant plus le même temps, ils vivent une toute autre histoire.
- Ils sont formatés par les médias, diffusés par des adultes qui ont méticuleusement détruit leur faculté d'attention en réduisant la durée des images à sept secondes et le temps des réponses aux questions à quinze secondes, chiffres officiels ; dont le mot le plus répété est "mort" et l'image la plus représentée celle de cadavres. Dès l'âge de douze ans, ces adultes-là les forcèrent à voir plus de vingt mille meurtres.
- Ils sont formatés par la publicité ; comment peut-on leur apprendre que le mot relais, en français s'écrit "- ais", alors qu'il est affiché dans toutes les gares "- ay" ? Comment peut-on leur apprendre le système métrique, quand, le plus bêtement du monde, la SNCF leur fourgue des "s'miles" ?
Nous, adultes, avons doublé notre société du spectacle d'une société pédagogique dont la concurrence écrasante, vaniteusement inculte, éclipse l'école et l'université. Pour le temps d'écoute et de vision, la séduction et l'importance, les médias se sont saisis depuis longtemps de la fonction d'enseignement.
Critiqués, méprisés, vilipendés, puisque pauvres et discrets, même s'ils détiennent le record mondial des prix Nobel récents et des médailles Fields par rapport au nombre de la population, nos enseignants sont devenus les moins entendus de ces instituteurs dominants, riches et bruyants.
Ces enfants habitent donc le virtuel. Les sciences cognitives montrent que l'usage de la toile, lecture ou écriture au pouce des messages, consultation de Wikipedia ou de Facebook, n'excitent pas les mêmes neurones ni les mêmes zones corticales que l'usage du livre, de l'ardoise ou du cahier. Ils peuventmanipuler plusieurs informations à la fois.
Ils ne connaissent ni n'intègrent ni ne synthétisent comme nous, leurs ascendants. Ils n'ont plus la même tête.
- Par téléphone cellulaire, ils accèdent à toutes personnes ; par GPS, en tous lieux ; par la toile, à tout le savoir ; ils hantent donc un espace topologique de voisinages, alors que nous habitions un espace métrique, référé par des distances. Ils n'habitent plus le même espace.
Sans que nous nous en apercevions, un nouvel humain est né, pendant un intervalle bref, celui qui nous sépare des années soixante-dix. Il ou elle n'a plus le même corps, la même espérance de vie, ne communique plus de la même façon, ne perçoit plus le même monde, ne vit plus dans la même nature, n'habite plus le même espace. Né sous péridurale et de naissance programmée, ne redoute plus, sous soins palliatifs, la même mort. N'ayant plus la même tête que celle de ses parents, il ou elle connaît autrement.
- Il ou elle écrit autrement. Pour l'observer, avec admiration, envoyer, plus rapidement que je ne saurai jamais le faire de mes doigts gourds, envoyer, dis-je, des SMS avec les deux pouces, je les ai baptisés, avec la plus grande tendresse que puisse exprimer un grand-père, Petite Poucette et Petit Poucet. Voilà leur nom, plus joli que le vieux mot, pseudo-savant, de dactylo.
- Ils ne parlent plus la même langue. Depuis Richelieu, l'Académie française publie, à peu près tous les vingt ans, pour référence, le dictionnaire de la nôtre. Aux siècles précédents, la différence entre deux publications s'établissait autour de quatre à cinq mille mots, chiffres à peu près constants ; entre la précédente et la prochaine, elle sera d'environ trente mille. A ce rythme, on peut deviner qu'assez vite, nos successeurs pourraient se trouver, demain, aussi séparés de notre langue que nous le sommes, aujourd'hui, de l'ancien français pratiqué par Chrétien de Troyes ou Joinville. Ce gradient donne une indication quasi photographique des changements que je décris. Cette immense différence, qui touche toutes les langues, tient, en partie, à la rupture entre les métiers des années récentes et ceux d'aujourd'hui. Petite Poucette et son ami ne s'évertueront plus aux mêmes travaux. La langue a changé, le labeur a muté.
L'INDIVIDU
Mieux encore, les voilà devenus tous deux des individus. Inventé par saint Paul, au début de notre ère, l'individu vient de naître ces jours-ci. De jadis jusqu'à naguère, nous vivions d'appartenances : français, catholiques, juifs, protestants, athées, gascons ou picards, femmes ou mâles, indigents ou fortunés… nous appartenions à des régions, des religions, des cultures, rurales ou urbaines, des équipes, des communes, un sexe, un patois, la Patrie. Par voyages, images, Toile et guerres abominables, ces collectifs ont à peu près tous explosé.
Ceux qui restent s'effilochent. L'individu ne sait plus vivre en couple, il divorce ; ne sait plus se tenir en classe, il bouge et bavarde ; ne prie plus en paroisse ; l'été dernier, nos footballeurs n'ont pas su faire équipe ; nos politiques savent-ils encore construire un parti plausible ou un gouvernement stable ? On dit partout mortes les idéologies ; ce sont les appartenances qu'elles recrutaient qui s'évanouissent.
Cet nouveau-né individu, voilà plutôt une bonne nouvelle. A balancer les inconvénients de ce que l'on appelle égoïsme par rapport aux crimes commis par et pour la libido d'appartenance – des centaines de millions de morts –, j'aime d'amour ces jeunes gens.
Cela dit, reste à inventer de nouveaux liens. En témoigne le recrutement de Facebook, quasi équipotent à la population du monde. Comme un atome sans valence, Petite Poucette est toute nue. Nous, adultes, n'avons inventé aucun lien social nouveau. L'entreprise généralisée du soupçon et de la critique contribua plutôt à les détruire.
Rarissimes dans l'histoire, ces transformations, que j'appelle hominescentes, créent, au milieu de notre temps et de nos groupes, une crevasse si large et si évidente que peu de regards l'ont mesurée à sa taille, comparable à celles visibles au néolithique, à l'aurore de la science grecque, au début de l'ère chrétienne, à la fin du Moyen Age et à la Renaissance.
Sur la lèvre aval de cette faille, voici des jeunes gens auxquels nous prétendonsdispenser de l'enseignement, au sein de cadres datant d'un âge qu'ils ne reconnaissent plus : bâtiments, cours de récréation, salles de classes, amphithéâtres, campus, bibliothèques, laboratoires, savoirs même… cadres datant, dis-je, d'un âge et adaptés à une ère où les hommes et le monde étaient ce qu'ils ne sont plus.
Trois questions, par exemple : que transmettre ? A qui le transmettre ? Comment le transmettre ?
QUE TRANSMETTRE ? LE SAVOIR !
Jadis et naguère, le savoir avait pour support le corps du savant, aède ou griot. Une bibliothèque vivante… voilà le corps enseignant du pédagogue. Peu à peu, le savoir s'objectiva : d'abord dans des rouleaux, sur des velins ou parchemins, support d'écriture ; puis, dès la Renaissance, dans les livres de papier, supports d'imprimerie ; enfin, aujourd'hui, sur la toile, support de messages et d'information. L'évolution historique du couple support-message est une bonne variable de la fonction d'enseignement. Du coup, la pédagogie changea au moins trois fois : avec l'écriture, les Grecs inventèrent la Paideia ; à la suite de l'imprimerie, les traités de pédagogie pullulèrent. Aujourd'hui ?
Je répète. Que transmettre ? Le savoir ? Le voilà, partout sur la Toile, disponible, objectivé. Le transmettre à tous ? Désormais, tout le savoir est accessible à tous. Comment le transmettre ? Voilà, c'est fait. Avec l'accès aux personnes, par le téléphone cellulaire, avec l'accès en tous lieux, par le GPS, l'accès au savoir est désormais ouvert. D'une certaine manière, il est toujours et partout déjà transmis.
Objectivé, certes, mais, de plus, distribué. Non concentré. Nous vivions dans un espace métrique, dis-je, référé à des centres, à des concentrations. Une école, une classe, un campus, un amphi, voilà des concentrations de personnes, étudiants et professeurs, de livres en bibliothèques, d'instruments dans les laboratoires… ce savoir, ces références, ces textes, ces dictionnaires… les voilà distribués partout et, en particulier, chez vous – même les observatoires ! mieux, en tous les lieux où vous vous déplacez ; de là étant, vous pouvez toucher vos collègues, vos élèves, où qu'ils passent ; ils vous répondent aisément. L'ancien espace des concentrations – celui-là même où je parle et où vous m'écoutez, que faisons-nous ici ? – se dilue, se répand ; nous vivons, je viens de le dire, dans un espace de voisinages immédiats, mais, de plus, distributif. Je pourrais vous parler de chez moi ou d'ailleurs, et vous m'entendriez ailleurs ou chez vous, que faisons-nous donc ici ?
Ne dites surtout pas que l'élève manque des fonctions cognitives qui permettent d'assimiler le savoir ainsi distribué, puisque, justement, ces fonctions se transforment avec le support et par lui. Par l'écriture et l'imprimerie, la mémoire, par exemple, muta au point que Montaigne voulut une tête bien faite plutôt qu'une tête bien pleine. Cette tête vient de muter encore une fois. De même donc que la pédagogie fut inventée (paideia) par les Grecs, au moment de l'invention et de la propagation de l'écriture ; de même qu'elle se transforma quand émergea l'imprimerie, à la Renaissance ; de même, la pédagogie change totalement avec les nouvelles technologies. Et, je le répète, elles ne sont qu'une variable quelconque parmi la dizaine ou la vingtaine que j'ai citée ou pourrais énumérer.
Ce changement si décisif de l'enseignement – changement répercuté sur l'espace entier de la société mondiale et l'ensemble de ses institutions désuètes, changement qui ne touche pas, et de loin, l'enseignement seulement, mais aussi le travail, les entreprises, la santé, le droit et la politique, bref, l'ensemble de nos institutions – nous sentons en avoir un besoin urgent, mais nous en sommes encore loin.
Probablement, parce que ceux qui traînent, dans la transition entre les derniers états, n'ont pas encore pris leur retraite, alors qu'ils diligentent les réformes, selon des modèles depuis longtemps effacés. Enseignant pendant un demi-siècle sous à peu près toutes les latitudes du monde, où cette crevasse s'ouvre aussi largement que dans mon propre pays, j'ai subi, j'ai souffert ces réformes-là comme des emplâtres sur des jambes de bois, des rapetassages ; or les emplâtres endommagent le tibia, même artificiel : les rapetassages déchirent encore plus le tissu qu'ils cherchent à consolider.
Oui, depuis quelques décennies je vois que nous vivons une période comparable à l'aurore de la Paideia, après que les Grecs apprirent à écrire et démontrer ; semblable à la Renaissance qui vit naître l'impression et le règne du livre apparaître ; période incomparable pourtant, puisqu'en même temps que ces techniques mutent, le corps se métamorphose, changent la naissance et la mort, la souffrance et la guérison, les métiers, l'espace, l'habitat, l'être-au-monde.
ENVOI
Face à ces mutations, sans doute convient-il d'inventer d'inimaginables nouveautés, hors les cadres désuets qui formatent encore nos conduites, nos médias, nos projets adaptés à la société du spectacle. Je vois nos institutions luire d'un éclat semblable à celui des constellations dont les astronomes nous apprirent qu'elles étaient mortes depuis longtemps déjà.
Pourquoi ces nouveautés ne sont-elles point advenues ? Je crains d'en accuser les philosophes, dont je suis, gens qui ont pour métier d'anticiper le savoir et les pratiques à venir, et qui ont, ce me semble, failli à leur tâche. Engagés dans la politique au jour le jour, ils n'entendirent pas venir le contemporain. Si j'avais eu àcroquer le portrait des adultes, dont je suis, ce profil eût été moins flatteur.
Je voudrais avoir dix-huit ans, l'âge de Petite Poucette et de Petit Poucet, puisque tout est à refaire, puisque tout reste à inventer. Je souhaite que la vie me laisse assez de temps pour y travailler encore, en compagnie de ces Petits, auxquels j'ai voué ma vie, parce que je les ai toujours respectueusement aimés.

Pour lire l'intégralité des textes de la coupole du 1er mars, reportez-vous sur le site de l'Institut de France.

jeudi 22 décembre 2011


La consommation de poisson contribuerait à la bonne santé mentale

02.12.2011
Des chercheurs de l'Université de Pittsburgh ont découvert que les personnes qui consommaient du poisson grillé ou cuit à la vapeur au moins une fois par semaine disposaient d'un volume plus important de matière grise dans les parties du cerveau les plus susceptibles d'être touchées par la maladie d'Alzheimer. Leurs résultats ont été présentés cette semaine au  du congrès annuel de la Radiological Society of North America.
Le volume de matière grise est essentiel à la mentale. Plus le cerveau dispose de matière grise, plus il jouit d'une bonne santé. La perte de volume de cette matière indique que les cellules cérébrales rétrécissent.
Selon les chercheurs, leur étude serait la première à établir une relation directe entre la  de poisson, la structure cérébrale et le risque de souffrir d'Alzheimer, cette maladie dégénérative du cerveau qui met à mal progressivement et irrémédiablement les fonctions mentales, dont la mémoire.
Parmi les 260 sujets choisis pour l'étude Cardiovascular Health Study, 163 ont confié avoir consommé du poisson de façon hebdomadaire. La plupart de ces patients ont aussi expliqué en consommer entre une et quatre fois par semaine.
Afin d'évaluer leur santé mentale, les sujets ont subi des IRM permettant de mesurer leur volume de matière grise. Une modélisation a ensuite été créée pour établir la relation entre la matière grise et la consommation de poisson afin de prédire la structure cérébrale 10 ans plus tard.
Les chercheurs ont aussi montré que la consommation de poisson séché ne protégeait pas contre la perte de facultés intellectuelles.
Ces résultats ne sont pas très surprenants, car de nombreuses recherches sur la maladie d'Alzheimer ont déjà mis en lumière l'importance des oméga-3 et des huiles de poisson sur la santé cérébrale.
En août dernier, des chercheurs du Rhode Island Hospital à Providence (Etats-Unis) ont établi un lien entre la consommation de compléments alimentaires à base d'huile de poisson et le fonctionnement cognitif -- un lien qui change la structure cérébrale des consommateurs contrairement à ceux qui n'en prennent pas.
Ces résultats ont été présentés au cours de la conférence internationale sur la maladie d'Alzheimer, à Paris, l'été dernier.
Au cours d'une autre étude, publiée quelques mois après dans la revue britannique Journal of Nutrition, des scientifiques de l'Université de Northumbria ont aussi trouvé qu'un certain complément alimentaire à base d'huile de poisson - riche en DHA (type d'oméga-3) - améliorait la circulation sanguine vers le cerveau pendant l'activité mentale des jeunes adultes.
Relaxnews


@llo #maman :-(


Dans un cybercafé en Bulgarie - Photo Uros Velickovic, CC BY
La voix au bout du fil est inquiète. Comme souvent, c’est une mère qui appelle. Depuis plusieurs jours, un homme de 20 ans cherche à entrer en contact sur Internet avec sa fille de 13 ans via la messagerie instantanée MSN. « Il est très intéressé par la photo de son profil, lui parle des vêtements qu’elle porte. Il branche sa webcam et demande à ma fille de faire de même. »
Il est 9 heures, premier appel de la journée chez Net Ecoute. Unique en France, ce numéro vert (08 00 200 000), lancé en 2008 par l’association e-Enfance dans le cadre du programme européen Safer Internet, conseille ados et adultes sur les usages du Web. Dans leurs locaux du XVIe arrondissement de Paris, ils sont cinq « écoutants », comme ils s’appellent, à recevoir les appels au compte-gouttes du lundi au vendredi.
Aujourd’hui, c’est une voix pleine de bonhomie qui répond à cette mère anxieuse. Dominique Delorme, responsable du service, rassure.« Vous pouvez baisser votre niveau d’inquiétude. En vous en parlant, votre fille a très bien réagi. Mon premier conseil, c’est qu’elle quitte MSN. Les contacts n’y sont pas forcément sûrs et les enfants ont tendance à les collectionner. » « Et son blog ? » questionne la mère.« Il ne faut pas qu’elle y mentionne son nom, ni son adresse, ni son téléphone ou ses habitudes de vie. Il faut en dévoiler le moins possible », égrène Dominique Delorme.
Si cette helpline (ligne d’assistance) anonyme et gratuite est ouverte à tous, elle est essentiellement destinée aux parents, souvent paumés face aux nouvelles technologies et ignorant tout des activités de leur progéniture sur Internet. « Les parents mettent en garde contre l’alcool, la drogue, les relations sexuelles non protégées mais n’ont pas encore le réflexe de sensibiliser sur Internet car ils ne sont pas forcément en mesure de le faire », explique Justine Atlan, directrice de e-Enfance, l’association qui a lancé le numéro vert. « Notre but n’est pas de jouer les gendarmes du Net ni de dramatiser. Si on fait peur aux parents, ils débranchent Internet. Ce n’est pas le but. Nous souhaitons juste que chaque parent puisse se faire une idée des usages possibles et de la nature des éventuels dangers. »

Autisme : les professionnels consultés sur de nouvelles recommandations

11/07/2011
La HAS et l’ANESM souhaitent recueillir l’avis des professionnels sur la version préliminaire de leurs recommandations de bonne pratique pour améliorer le suivi et l’accompagnement des enfants et adolescents autistes ou souffrant d’autres troubles envahissants du comportement.

Dans le cadre du plan Autisme 2008-2010, la Haute Autorité de santé (HAS) et l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) ont élaboré une série de recommandations encore provisoires sur l’autisme et les troubles envahissants du comportement (TED) chez les enfants et adolescents. Ces recommandations doivent permettre aux professionnels de « mieux évaluer les besoins et ressources individuels de l’enfant et de sa famille, dans chacun des domaines de fonctionnement et de participation habituellement touchés par les conséquences des TED ». Le but étant de pouvoir correctement définir « un projet individualisé d’interventions coordonnées ».

Parmi les axes d’intervention prioritaires, la HAS et l’ANESM insistent sur l’importance d’une prise en charge précoce. Lorsqu’un TED est suspecté chez un enfant ou adolescent, l’évaluation initiale du fonctionnement doit être réalisée, avec l’accord des parents, « dans les délais les plus brefs » et au plus tard dans les trois mois après la première consultation ayant évoqué un trouble du développement. « La mise en place des interventions peut débuter avant même que l’ensemble des évaluations initiales soient terminées », indique la HAS. Tout au long de la prise en charge, il est essentiel que les professionnels favorisent l’expression et l’écoute de l’enfant ou de l’adolescent, qui « doit être positionné d’emblée comme acteur de son accompagnement ».

En ce qui concerne le suivi, la HAS recommande une évaluation au minimum annuelle par l’équipe de proximité mettant en œuvre les interventions auprès du jeune sujet (réseau libéral, structure médico-sociale, service de pédopsychiatrie, etc.). Pour les enfants âgés de 2 à 6 ans, une évaluation complémentaire par une équipe spécialisée (Centre d’action médico-sociale précoce, service de pédopsychiatrie, neuropédiatrie, etc.) doit être menée tous les deux ans, puis reconduite ultérieurement « aux âges et situations de transition ».
Les recommandations détaillent les bonnes pratiques à ce jour arrêtées par la HAS et l’ANESM autour des divers examens d’évaluation et modes d’intervention auprès de ces enfants et adolescents. La question des traitements médicamenteux et biomédicaux est abordée, tout comme l’organisation des interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées tout au long du parcours de l’enfant ou de l’adolescent.

En ligne.

Avant la finalisation de leurs recommandations, la HAS et l’ANESM souhaitent recueillir l’avis des organismes, institutions et associations impliqués dans le suivi et l’accompagnement des enfants et adolescents atteints d’autisme ou autre TED. Les professionnels ont jusqu’au 9 septembre pour faire part de leurs critiques et remarques sur la version préliminaire de ces recommandations de bonne pratique via le questionnaire disponible sur le site Internet de la HAS. Une synthèse des commentaires recueillis sera alors remise aux membres du groupe de travail de la HAS et de l’ANESM qui rédigera la version finale de ces recommandations. Ces dernières devraient être publiées au premier trimestre 2012.
DAVID BILHAUT
 

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Un facteur de réponse aux traitements antidépresseurs

19/12/2011
      
Un test sanguin pourrait-il permettre de prévoir la réponse d’un patient à un antidépresseur de la classe des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) ? Des chercheurs de l’Université de Loyola ont rapporté que plus de 85 % des déprimés qui ont un taux de VEGF supérieur à la normale sont de bons répondeurs à un IRS, avec un soulagement partiel ou complet de la symptomatologie. Par comparaison, moins de 10 % des patients ayant des taux bas de VEGF répondent au traitement.
Angelos Halaris et coll. ont dosé la protéine VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) chez 35 patients prenant un IRS pour un trouble dépressif majeur. Une confirmation de cette découverte pourrait conduire à un marqueur de l’efficacité de ces molécules. Les auteurs avancent une hypothèse selon laquelle l’IRS stimulerait la neurogenèse dans des régions cérébrales atrophiées chez les dépressifs et que cette régénération serait alimentée par le VEGF, protéine qui stimule la croissance vasculaire et participe au maintien des neurones.
› Dr BÉ. V.
Présentation au Congrès de la Society of Biological Psychiatry.

Un plus dans les TOC de l’enfant



Un essai américain dans les TOC de l’enfant montre que, associé au traitement pharmacologique, un programme complet de thérapie cognitivo-comportementale (TCC) apporte un gain de 30 % sur le score de l’échelle CY-BOCS.
L’équipe de Martin E. Franklin (Université de Pennsylvanie) a mis en place l’étude POTS II dans laquelle 124 patients de 7 à 17 ans avec un diagnostic de TOC (DSM-IV) et ayant des symptômes résiduels (score de 16 ou plus sur l’échelle CY-BOCS - Children’s Yale-Brown Obsessive Compulsive Scale) après inhibiteur de la recapture de la sérotonine (IRS) ont été randomisés en trois groupes : un groupe (n = 42) traité uniquement par IRS ; un autre (n = 42) par un IRS associé à de simples directives comportementales (6 séances) ; et le reste des sujets par la combinaison d’un IRS et d’un programme complet de TCC (en moyenne, 12,5 séances d’une heure, chacune incluant psychoéducation et éducation cognitive).
Les patients ayant connu, au bout de douze semaines, une réduction d’au moins 30 % de leur score CY-BOCS initial se trouvaient majoritairement dans le groupe ayant suivi un programme complet de TCC (68,6 %), par rapport aux deux autres groupes : 34 % des sujets ayant eu de simples directives + IRS et 30 % des sujets traités uniquement par IRS. Il n’y avait pas de différences significatives entre les patients qui avaient reçu de simples directives et ceux traités par médicament seul.
L’étude POTS II met donc clairement en évidence l’avantage, en pédiatrie comme en médecine de l’adulte, de l’association, au traitement pharmacologique des TOC, d’un programme de TCC, à condition que celui-ci soit complet. Près de deux tiers des patients ainsi traités voient une forte amélioration de leurs symptômes sur l’échelle CY-BOCS, alors que le traitement par les IRS n’avait permis d’obtenir que des résultats partiels. L’association d’une thérapie comportementale brève (6 séances sur 12 semaines), limitée à de simples instructions, n’a pas d’apport significatif par rapport au médicament seul. Les versions tronquées de thérapie comportementale devraient donc être abandonnées, estiment les Américains, au profit du protocole complet, seul efficace.
› Dr BERNARD GOLFIER
M.E. Franklin, J.S. March et coll. « JAMA » (« Journal of American Medical Association », 2011). Publié en ligne.