Publié le 30 janvier 2024
Pour préserver les muscles, les personnes qui avancent en âge doivent veiller à consommer davantage de protéines. Mais pour réduire les risques de cancer, il est recommandé par ailleurs de manger moins de viande rouge. Comment concilier ces deux recommandations ? Voici des repères très pratiques pour composer des menus équilibrés, meilleurs pour soi mais aussi pour l’environnement.
Pour les personnes âgées, une réduction de la consommation de viande doit composer avec la nécessité d'augmenter un peu leurs apports en protéines. « Tout le monde perd du muscle en vieillissant et cela entraîne de graves complications », explique la Pr Agathe Raynaud-Simon, cheffe du département de gériatrie à l’hôpital Bichat (Paris). La fatigue ou les chutes sont souvent les premiers indices de l’accélération de la fonte musculaire, un phénomène appelé sarcopénie par les médecins et qui commence dès l’âge de 35 ans. Mais bonne nouvelle, ajoute-t-elle : « Le muscle est un organe qui est accessible, c’est-à-dire qu’il est possible de retrouver de la force à tout âge avec une alimentation adaptée et une activité physique suffisante. »
Davantage de protéines
Pour lutter contre ce phénomène de fonte musculaire, les médecins et chercheurs recommandent en premier lieu d’augmenter les apports à 1 g, voire 1,2 g de protéines par kilogramme de poids de corps et par jour chez la personne âgée, contre 0,8 g/kg/jour dans la population générale. « Les protéines sont des briques qui construisent nos muscles. Avec l’âge, le métabolisme va être moins efficace, et il va donc falloir encore plus de protéines pour maintenir la masse musculaire », explique Marine Gueugneau, chercheuse spécialisée en nutrition humaine au sein de l’Inrae. « On entend souvent qu’une personne âgée doit manger moins pour ne pas prendre de poids, et c’est complètement faux », regrette la Pr Raynaud-Simon.
Jusqu’où les seniors peuvent-ils alors réduire leur consommation de produits animaux sans mettre en danger leur santé ? « Puisque aucune étude clinique n’a encore documenté les effets d’une végétalisation plus importante, nous recommandons la prudence »,dit la Pr Raynaud-Simon. Un objectif d’environ 50 % de protéines végétales et 50 % de protéines animales représenterait, selon elle, une base intéressante pour élaborer les menus, à ajuster en fonction des profils. Car tous les patients âgés ne sont pas touchés par la sarcopénie de la même façon, notent les deux expertes. « Une personne en forme, avec une vie active, peut envisager de réduire les protéines animales et de manger plus de légumineuses, ce qui ne sera pas le cas d’une personne ayant des problèmes de santé »,résume Marine Gueugneau.
Diversifier les sources
Selon les recommandations nutritionnelles, les repas doivent donc au moins apporter environ 70 g de protéines par jour pour une personne de 70 kg. Trouver la moitié de ces apports dans la viande signifie manger au moins 150 g de steak, de volaille ou de poisson. Toutes les viandes se valent en termes de qualité nutritionnelle et de digestibilité. Mais toutes ne se valent pas d’un point de vue environnemental ou de la santé. L’impact carbone de la viande de bœuf est ainsi 10 fois supérieur à celui du poulet. Et ce sont les viandes rouges qui exposent à un risque accru de cancer colorectal, pas celles de volaille. « Donc, si vous voulez réduire votre consommation de bœuf, vous pouvez déjà commencer par varier ces sources », invite Dominique Dardevet, directeur de recherche spécialisé en nutrition à l’Inrae. « Les œufs et les produits laitiers,poursuit-il, sont également des sources intéressantes de protéines, avec des teneurs de 13 % et 22 % respectivement. »
Les équilibres sont plus subtils en matière de sources végétales. Céréales et légumineuses sont plus pauvres en quantité de protéines, avec environ 8 % dans le pain et les lentilles ou 10 % dans le tofu. « Il faut bien lire les indications nutritionnelles sur les paquets : la teneur des lentilles en protéines, par exemple, est indiquée en poids sec. Mais la cuisson apporte de l’eau et va diminuer les apports »,prévient Dominique Dardevet. Mais comme on en mange souvent et en plus grandes quantités que la viande, l’apport n’est pas négligeable. Il faut aussi veiller à allier systématiquement céréales et légumineuses, souligne-t-il. Car les deux manquent de certains acides aminés essentiels (les éléments de base des protéines) : les premières manquent de lysine ou les secondes de méthionine. Seule solution pour une assiette sans viande : toujours mélanger céréales et légumineuses à hauteur d’un tiers et deux tiers respectivement dans l’assiette, pour un total d’environ 250 à 300 g. Dans ce cas, pensez aussi à varier les aliments, avec de la semoule, du riz ou du quinoa pour les céréales, sans oublier flageolets, pois cassés, lentilles et pois chiches pour les légumineuses. « Cuisiner soi-même permet d’éviter les additifs et surtout de diminuer une partie des facteurs antinutritionnels qui rendent la digestion des protéines végétales difficile », complète Marine Gueugneau.
Composer avec l’appétit
Avec l’âge peut aussi survenir un manque d’appétit. « Les patients privilégient les produits sucrés, et la viande est le premier aliment qui saute », observe Alexis Pichereau, diététicien nutritionniste à l’AP-HP. Ces situations rendent également plus complexe l’introduction de sources de protéines volumineuses comme les céréales et les légumineuses. « Nous essayons de proposer des produits laitiers, ou même des équivalents végétaux à base de soja, qui ont des apports en protéines très proches », explique le diététicien. Attention encore à bien lire les étiquettes : en dessous d’une teneur en protéines de 15 %, ces « produits végétaux alternatifs », qui ressemblent à des steaks, des saucisses ou du fromage mais sont en réalité du soja, ne représentent pas des sources de protéines satisfaisantes.
L’ensemble de ces conseils permet d’envisager un menu hebdomadaire qui garantit d’apporter une quantité suffisante de protéines, tout en limitant les aliments volumineux et en réduisant la part de produits animaux. Pour une personne en bonne santé, vous pouvez prévoir un repas végétarien sur deux, en vous assurant d’y ajouter suffisamment de légumineuses. Pour le reste des repas, efforcez-vous de diversifier les sources de protéines animales en misant sur les œufs, la volaille et le poisson.
Petits déjeuners, desserts et collation doivent aussi être mis à profit pour ajouter des protéines au travers de produits laitiers ou de leurs équivalents végétaux. Dans le cas où vous choisissez ces alternatives, misez avant tout sur des produits suffisamment riches en protéines et les moins transformés possible. Si l’équation devient trop complexe au quotidien, la Pr Raynaud-Simon résume un principe de base : « Mangez de tout, et surtout ce que vous aimez. En cas de doute, n’hésitez pas à consulter un professionnel de la diététique. »
Apports en protéines - Tous les repères
Les viandes et poissons sont effectivement les aliments les plus riches en protéines. Mais de nombreux aliments, comme les œufs, les céréales, les produits laitiers ou les légumineuses, en contiennent aussi. Les teneurs sont moindres, mais comme on en mange régulièrement et en quantités (on peut avoir des céréales à tous les repas ou presque), ils sont une source importante de protéines. Une demi-baguette apporte autant de protéines qu’une demi-portion de poisson !
Les besoins quotidiens
Les équivalents
On trouve 10 g de protéines dans :
- 45 g de fromage
- 50 g de viande rouge
- 50 g de poulet
- 50 g de poisson
- 75 g d’œuf
- 120 g de lentilles cuites
- 120 g de pain
- 125 g de fromage blanc
- 130 g de pois chiches cuits
- 250 g de pâtes cuites
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