La Mutualité Loire-Haute-Loire a dévoilé son dernier projet : l'analyse d'impact du robot Paro sur la douleur des résidents atteints d'Alzheimer, leur interaction avec les soignants et les familles mais aussi sur les conditions réelles d'usage et d'intégration de la gérontotechnologie en Ehpad. Trois études seront ainsi menées sur dix-huit mois.
La curiosité suscitée par le robot Paro ne faiblit pas. Treize ans après l'arrivée du petit phoque sur le marché, la communauté sanitaire et médico-sociale s'interroge encore sur son bien-fondé. Expérimenté pour la première fois en France au sein des services gériatriques de l'hôpital Broca (Paris) et déjà présent dans une quarantaine d'Ehpad, Paro va être introduit sur onze Ehpad de Loire et de Haute-Loire. La Mutualité française locale, gestionnaire des établissements, a annoncé ce 21 novembre devant la presse y mener trois projets de recherche. Objectif : mesurer l'usage et l'impact de la solution technologique sur les résidents, les soignants et les aidants. Initiée en septembre 2016 et financée à hauteur de 300 000 euros (€) par la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) et la Fondation Paul Bennetot (fondation du groupe Matmut), la démarche sera engagée sur dix-huit mois. Elle concernera près d'un millier de personnes âgées et devrait livrer ses résultats d'ici mai 2018.
Anticiper la douleur induite par les soins ?
Constatant que la douleur touche 45 à 80% de personnes âgées en institution mais que celle-ci "demeure sous-estimée et insuffisamment traitée chez les résidents souffrant de troubles cognitifs" faute d'évaluation adéquate, la mutualité Loire-Haute-Loire espère objectiver les bienfaits de robots sociaux comme Paro sur le bien-être. La structure le souligne en effet : associée au repérage systématique, l'utilisation de nouvelles technologies de ce type pourrait contribuer à une meilleure anticipation et prise en charge de la douleur induite par les soins.
Pour ce faire, la Mutualité a fait appel au laboratoire d'analyse des usages en gérontologie (Lusage), living lab de l'hôpital Broca (Assistance publique-Hôpitaux de Paris, AP-HP) et l'université Paris-Descartes. À la charge du Pr Anne-Sophie Rigaud, coordonnatrice du laboratoire et à l'origine de nombreuses études cliniques sur Paro, de voir cette fois si l'utilisation individuelle du robot phoque permet de prévenir les manifestations de la douleur sur ce public. L'effet de Paro sur leurs symptômes psychocomportementaux, leurs prises de médicaments et sur la charge des soignants sera également étudié. À terme, l'équipe entend dresser le profil des personnes ayant répondu positivement au robot.
La douleur mesurée sur trente résidents
Mené sur quatre Ehpad, le protocole de recherche du laboratoire Lusage sera réalisé sur trente résidents atteints d'un syndrome démentiel au stade modéré à sévère et douloureux lors des soins. L'évaluation se basera quant à elle sur la stabilité voire la réduction du score Painad (échelle de mesure de la douleur chez la personne âgée non communicante) entre le début et la fin du soin. La charge soignants, la réduction de la prise en charge médicamenteuse et l'évaluation de l'agitation feront également partie des critères pris en compte.Découvrir les valeurs d'usage de Paro
En parallèle, deux protocoles d'étude seront réalisés. Le premier sera déployé sur trois structures et se focalisera sur l'impact du robot au regard des interactions du malade avec le personnel soignant et les familles en présence de Paro. S'il est en effet reconnu que l'usage du robot entraîne une modification des rapports, reste à en analyser les bénéfices à court et long terme, mais aussi au regard de l'acceptabilité de la gérontechnologie. Un travail dont se chargera le laboratoire de recherche Parcours de santé systémique (P2S) de l'université Claude-Bernard de Lyon 1.
Réalisée pour sa part sur quatre Ehpad, la seconde étude sera menée par le centre d'expertise Madopa. L'enjeu ? "Identifier dans le temps avec précision les conditions d'usage réelles et d'intégration du robot Paro dans un Ehpad", et en particulier les enjeux éthiques qui s'y rapportent. Les bénéfices et les risques relationnels et professionnels de l'intégration du robot seront ainsi évalués à partir d'une analyse socio-ethnographique articulée autour de quatre dimensions : la vie des résidents malades d'Alzheimer, la relation de soin, la relation entre familles et Ehpad, la relation entre la personne âgée et la famille. Autant d'éléments qui devraient se traduire par une modélisation et des recommandations sur les usages, les non-usages, et les conditions d'appropriation par les résidents et dans les pratiques professionnelles des Ehpad. Un moyen pour la FNMF de jeter les bases d'un éventuel déploiement de Paro ou d'une solution similaire sur le reste de ses établissements.
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