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mercredi 1 juillet 2015

Le visage de Dominique Cottrez, comme un paysage

Le Monde Blogs , par Pascale Robert-Diard

Le visage de Dominique Cottrez est comme un paysage un peu tremblé que l'on regarderait à travers la vitre d'un train filant dans la campagne. Il prend l'ombre des nuages, la lumière d'un rai de soleil, s'éteint, se voile, s'inonde, s'offre à crû.  Tout s'y reflète, tout s'y engouffre. A cette femme sans mots, à ce corps masse,  il donne un langage. Mardi 30 juin, pour la première fois depuis quatre jours d'audience, on l'a vu se lever sans honte, sans crainte, presque affamé.
A la barre se tient le docteur Roland Coutanceau, l'un des experts psychiatres qui a été chargé de l'examiner. Plus il parle d'elle, plus le visage de Dominique Cottrez s'ouvre et reçoit. La veille, l'accusée d'un octuple infanticide qui comparaît devant la cour d'assises du Nord à Douai, a pris tout le monde de court en affirmant que, contrairement à ce qu'elle soutenait encore quelques minutes plus tôt, elle n'a jamais été victime d'inceste enfant et n'a pas plus entretenu de relations sexuelles consenties, adulte, avec son père.  
Elle l'a confirmé mardi. Fermement, obstinément. La cour est encore dans ce moment là, dans la béance qu'il a ouverte en la privant d'une explication aussi terrifiante que rassurante à la mort donnée à huit nouveaux-nés. La cour aussi a faim, elle a besoin de remplacer, de substituer. C'est cette attente que les mots de Roland Coutanceau sont arrivés.
"On n' a pas besoin d'inceste pour comprendre" dit-il. Et il parle de l'accusée, de"sa pudeur au cube" qui lui fait refuser d'offrir la vue de son corps à un médecin. De sa passivité, de sa soumission au regard des autres - on le connaît ce regard, c'est le nôtre, celui que l'on porte sur les gens comme elle, que l'on traverse sans les voir, comme un objet inanimé. De sa "souffrance emmurée." 

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