À l’occasion de la présentation de son avis sur « les addictions » adopté, aujourd’hui en séance plénière, le conseil économique social et environnemental (CESE) a plaidé pour l’ouverture d’un débat public sur la sanction de l’usage de cannabis.
La consommation de cannabis est actuellement considérée comme un délit puni par une peine maximum d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende. « Dans les faits, cette peine n’est jamais appliquée note la pharmacienne Gisèle Ballaloud, rapporteuse de l’avis du CESE, cela entretient l’idée que fumer du cannabis n’est pas très grave, et que l’on peut s’en tirer avec quelques conseils. Nous pensons donc que transformer cette peine en une contravention qui serait appliquée de manière systématique. »
Pour le CESE, le passage d’une sanction pénale à une contravention n’est donc pas une forme de dépénalisation mais au contraire un renforcement de la législation dans la mesure où la contravention serait appliquée dès la première interpellation.
Appel à un débat public« Il y a eu un débat important au sein de la section sur cette question, raconte Gisèle Ballaloud, ce qui prouve que l’idée ne fait pas consenssus. Il ne faut organiser un débat d’experts mais une discussion publique organisée au CESE. » En novembre dernier, le rapport parlementaire Le Drain-Marcangeli avait illustré l’intensité du débat évoqué par Gisèle Ballaloud.
Les deux rapporteurs n’étaient en effet pas parvenus à tomber d’accord sur la question de la sanction : la députée socialiste Anne Yvonne Le Dain, s’était prononcée en faveur d’une légalisation contrôlée du cannabis dans la sphère privée, sous le contrôle de l’État, alors que le député Républicains Laurent Marcangeli, préférait l’idée d’une contraventionnalisation de l’usage de cannabis.
Les « stratégies marketing offensives »
L’avis du CESE porte sur de nombreux autres aspects de la lutte contre les addictions. L’avis suggère ainsi de s’attaquer aux « stratégies marketing très offensives » des producteurs d’alcool et de tabac à travers le sponsoring d’événements. Les auteurs estiment donc qu’il faut publier le rapport RSE (responsabilité sociétale des entreprises), le montant des dépenses que les entreprises du tabac, de l’alcool et des jeux en ligne consacrent, directement ou non aux actions de lobbying.
La prévention primaire est également mise en avant dans le texte et notamment en ce concerne le renforcement de la signalétique et la pertinence des messages de prévention. « On pourrait notamment installer des messages d’avertissement pour les femmes enceintes sur les têtes de gondole des magasins vendant de l’alcool ou du tabac » détaille Gisèle Ballaloud.
Conscient de la non-extensibilité des ressources à la disposition des acteurs de la santé publique pour prévenir efficacement les comportements addictifs, le CESE propose d’intensifier les efforts sur les moments de clés de l’adolescence, à l’entrée en 4e.
Oui aux salles de consommation à moindre risque
Les auteurs de l’avis espèrent que la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) publiera bientôt la circulaire précisant les conditions dans lesquelles l’employeur peut limiter la consommation d’alcool sur le lieu de travail.
Le CESE prend également position en ce qui concerne les salles de consommation de drogue à moindre risque dont l’expérimentation est prévue dans l’article 9 de la future loi de modernisation du système de santé. « Nous pensons que c’est un bon dispositif, explique Gisèle Ballaloud, de telles salles devraient systématiquement être implantées à proximité d’un centre de santé. »
Cet avis du CESE intervient alors que la France prépare sa participation à la session spéciale de l’Assemblée générale de l’ONU sur les drogues (UNGASS) de 2016. Les auteurs de l’avis participeront d’ailleurs aux travaux préparatoires menés par la MILDECA afin de définir la position de la France, notamment en ce qui concerne la réponse pénale à la consommation de drogues.
Damien Coulomb
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